Chaque mois, L’Éclaireur vous propose une sélection de livres permettant de comprendre un sujet lié au numérique. Au menu de ce septième article : l’impact des écrans et des réseaux sociaux sur les jeunes.
C’est un fait : les écrans sont omniprésents dans nos vies. Nous y sommes exposés pour travailler, communiquer et nous divertir à travers une pléthore d’appareils. Leur impact, notamment sur les plus jeunes, en inquiète plus d’un. Malgré la recommandation « pas d’écrans avant 3 ans », les enfants y sont exposés dès leur plus jeune âge. Mais quelles conséquences cette utilisation a-t-elle sur eux ? Voici cinq livres pour y voir plus clair à ce sujet.
Les Enfants et les Écrans, d’Anne Cordier et Séverine Erhel
« Les écrans altèrent le développement de l’enfant et de l’adolescent », « les jeux vidéo sont nuisibles à la santé physique et psychique des enfants et des adolescents »… Ces phrases que l’on entend souvent font partie des mythes et réalités les plus répandus au sujet des écrans. Ils sont aussi passés en revue dans cet ouvrage qui a pour but d’aider à mieux comprendre l’impact de ces derniers, de distinguer ce qui relève du mythe et ce qui est fondé scientifiquement.
Coordonné par Anne Cordier, professeure en sciences de l’information et de la communication, et Séverine Erhel, maîtresse de conférences en psychologie cognitive, il pointe les clichés et les discours alarmistes, et propose de les dépasser pour « engager un débat rationnel en cernant les enjeux en termes de santé publique et sociale ». À une époque où nombre de personnes se demandent s’il faut supprimer les écrans et écarter les enfants de ces appareils, les deux coordinatrices estiment qu’il ne faut pas les interdire. « Aujourd’hui, il s’agirait plutôt d’éduquer à ce type de médias, d’amener les individus à avoir une utilisation plus vertueuse, plus rationnelle des outils numériques et à se prémunir des dangers de ces derniers », souligne Séverine Erhel.
La Fabrique du crétin digital, de Michel Desmurget
Obésité, dépression, problèmes de concentration, les écrans sont réputés pour les effets néfastes qu’ils ont sur nous. Alors que les jeunes passent de nombreuses heures sur leurs smartphones, ordinateurs et autres appareils numériques, Michel Desmurget, docteur français en neurosciences, alerte sur les « lourdes conséquences » de « cette profusion d’écrans [qui] est loin d’améliorer les aptitudes de nos enfants ».
« Ce que nous faisons subir à nos enfants est inexcusable. Jamais sans doute, dans l’histoire de l’humanité, une telle expérience de décérébration n’avait été conduite à aussi grande échelle », estime-t-il. Reprochant aux psychiatres, médecins, sociologues ou encore journalistes de multiplier les déclarations indulgentes pour rassurer les parents et le grand public, il considère que leur enthousiasme général dissone avec la réalité des études scientifiques, qui montrent les effets délétères chez les enfants et les adolescents. « Alors, qui bluffe ; qui se trompe ; et où est la vérité ? Cette “révolution numérique” est-elle une chance pour la jeune génération ou une sombre mécanique à fabriquer des crétins digitaux ? C’est l’objet du présent ouvrage que d’essayer de le déterminer », fait savoir Michel Desmurget.
Les Écrans-Rois, de Carole Bienaimé Besse
Alors que la crise sanitaire a radicalement modifié notre rapport au numérique, Carole Bienaimé Besse, ancienne membre du collège de l’Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique (Arcom), s’inquiète de la place centrale qu’ont prise les écrans dans la société. Dans cet essai, elle démontre comment ces derniers affectent la santé mentale des plus jeunes, leur développement intellectuel et leur vie sociale. Elle met aussi en lumière les pièges auxquels nous sommes tous confrontés, comme les contenus inappropriés, la surveillance de masse ou encore la distraction perpétuelle. Le tout « sans jamais sombrer dans le fatalisme ».
Carole Bienaimé Besse estime en effet qu’« il serait trop simple de diaboliser ces outils sans les comprendre et sans s’arrêter dans un premier temps sur l’origine de la philosophie de leur conception ». Souhaitant aider les enfants à reprendre le contrôle, Carole Bienaimé Besse propose également des solutions concrètes pour aider les parents, les éducateurs et les adolescents à « naviguer dans cet univers complexe » qu’est le numérique. « Avec un peu de compréhension du numérique, et pas mal de dialogue, il serait facile d’apprendre aux adolescents comme aux enfants – et à nous-mêmes ! – à mieux utiliser nos outils de communication numérique et à ne plus se laisser dévorer par eux », affirme l’ancienne membre du collège de l’Arcom.
Nos ados sur les réseaux sociaux, même pas peur !, de Béatrice Kammerer
Addictifs, abêtissants, néfastes pour la santé des adolescents… Tels sont des adjectifs employés pour qualifier les réseaux sociaux aujourd’hui. Alors que ces plateformes font peur aux parents et aux éducateurs, Béatrice Kammerer, journaliste scientifique, se demande si ces inquiétudes sont toujours justifiées. « Que sait-on des usages en ligne des jeunes ? De quelles données dispose-t-on pour évaluer leurs effets ? », s’interroge-t-elle.
Pour répondre à ces questions, elle a mené une grande enquête journalistique auprès de chercheurs, de professionnels de santé et d’acteurs associatifs. Objectif : « Déconstruire les idées reçues et mieux comprendre les pratiques adolescentes. » Donnant des clés pour instaurer un dialogue constructif avec les adolescents et agir différemment, le sous-titre de ce livre – Même pas peur ! – n’est pas une provocation, mais un cri de ralliement, précise Virginie Sassoon, directrice adjointe du Centre pour l’éducation aux médias et à l’information, dans les premières pages. « Nous ne sommes pas dupes des dangers et des risques, mais pensons que face à la peur, il est essentiel de proposer des alternatives qui tiennent compte de la complexité des pratiques », indique-t-elle.
La Folle Aventure du doudou d’Emma, de l’association L’Enfant bleu
Si l’on pense souvent aux jeunes quand on parle de réseaux sociaux, ces plateformes sont aussi utilisées par les parents, qui sont nombreux à s’en servir pour publier des photos de leurs enfants. Une pratique connue sous le nom de sharenting – contraction des mots anglais sharing (partager) et parenting (parentalité) – et qui est loin d’être sans risque. Pour sensibiliser les parents aux dangers de celle-ci, l’association L’Enfant bleu a publié ce livre jeunesse qui cache un message de prévention.
Destiné à être lu aux enfants par leurs parents, il raconte l’histoire du doudou d’Emma, que sa maman ne peut s’empêcher de prendre en photo et de partager sur ses réseaux sociaux. Le cliché va alors rencontrer un énorme succès, étant vu et échangé par des milliers de personnes et finissant entre les mains des fans de doudous. À la fin du livre, l’association invite les parents à le relire seuls, en remplaçant la photo du doudou par celle de leur enfant. « Les fans de doudous deviennent alors des pédocriminels sévissant sur les réseaux sociaux afin de récupérer un maximum d’images d’enfants pour alimenter des sites pédopornographiques », alerte-t-elle. Pour éviter cela, elle renvoie les parents vers une page dédiée de son site, afin de les sensibiliser aux bonnes pratiques numériques.
