Ira Sachs et Ben Wishaw ont dévoilé à L’Éclaireur leurs œuvres culturelles incontournables, mais aussi leurs derniers coups de cœur. Retour sur les recommandations des deux artistes pour un été réussi.
En juin dernier, L’Éclaireur a rencontré Ira Sachs et Ben Wishaw à l’occasion de la présentation en avant-première au Champs-Élysées Festival de Passages. Durant ce rassemblement cinématographique à travers lequel les cinémas indépendants français et américain se rencontrent et se mélangent, les deux artistes sont revenus sur le douzième long-métrage d’Ira Sachs, porté par le trio cosmopolite constitué de Franz Rogowski, Ben Wishaw et Adèle Exarchopoulos.
Tout en revenant sur leur carrière et leur univers cinématographique, Ira Sachs et Ben Wishaw avaient également livré leurs recommandations culturelles. Cinéma, photographie, ou encore danse, ke duo a dévoilé ses œuvres de référence, ses coups de cœur et ses attentes pour 2023 et un été culturel réussi.
Quel est le dernier film qui vous a vraiment émus ?
Ira Sachs : L’année passée, les deux films qui m’ont vraiment ému étaient Saint-Omer (2022) d’Alice Diop, et Aucun ours (2022) de Jafar Panahi. Je trouve que ce sont des films qui abordent la vérité dans sa façon la plus pure. Ce sont aussi des films marqués par une véritable conception cinématographique.
Ben Wishaw : Je suis allé voir un super film islandais qui s’appelle Godland (2022). C’est vraiment bien. Le film est brillamment exécuté. Il y a une vraie expertise de cinéma qui était à couper le souffle, mais aussi une vision sans compromis, à la fois sombre et vivifiante, des êtres humains. C’est une petite communauté en Islande qui devient folle. Les gens deviennent fous dans un petit espace avec ce paysage très inhospitalier. Ils font face aux éléments, à leur brutalité, ainsi qu’à Dieu. Il y a de grandes choses dans ce film qui ont une forme humaine.
Ira, quel long-métrage de votre filmographie recommanderiez-vous à quelqu’un qui ignore tout de votre univers cinématographique ?
I.R. : Je recommande Passages, car j’ai l’impression que chacun de mes films exprime qui je suis et mon métier tel qu’il est aujourd’hui. Je sens qu’il y avait quelque chose de spécial dans Passages. Je me sentais très libre quand je réalisais le film. J’avais l’impression qu’en tant qu’artiste, mon métier avait rattrapé mes instincts. J’avais des instincts quand j’étais jeune qui étaient très tangibles, mais mes compétences étaient nouvelles. J’ai l’impression que ce film est le début d’un nouveau chapitre, et c’est une œuvre que je veux vraiment partager.
Quel est votre film préféré ?
I.R. : Un jour, quelqu’un m’a demandé si j’étais dans le désert, quel film j’emporterai. Je pense que ce serait Mes petites amoureuses (1974) de Jean Eustache, car c’est l’une des choses les plus belles jamais faites. Il contient de la tendresse et une rigueur sans fin.
Quelle œuvre devez-vous absolument rattraper cet été ?
I.R. : Je vis en Équateur actuellement, mais je veux vraiment retourner à New York, comme ça je pourrais rattraper la série The Real Housewives of New York (2010-2022), car j’y suis très attaché, curieusement. À certains égards, je suis attiré par la téléréalité et la fiction sur le petit écran, car finalement, il y a un certain réalisme.
Ben, vous êtes un grand amateur d’art, plus précisément de photographies et de sculptures. Quel artiste pourriez-vous recommander ?
B.W. : Actuellement, je suis complètement obsédé par l’œuvre d’un photographe qui s’appelle Peter Hujar. C’est un photographe américain, queer, qui vivait à New York. Il a notamment photographié des artistes issus du milieu underground, principalement à New York dans les années 1970 et 1980. Ses photos sont exquises. Grâce à son objectif, il est parvenu à voir à travers l’âme de certaines personnes. Ses œuvres sont assez connues, en vérité, car elles sont très utilisées sur les couverture de livres.
Quelle est l’oeuvre que vous avez hâte de découvrir cette année ?
I.R. : Je veux vraiment voir le nouveau film d’Aki Kaurismäki. J’adore son travail et je suis très curieux de voir ce qu’il nous réserve pour la suite.
B.W. : Je vais vous dire la première chose qui me passe par l’esprit ! Je dois avouer que je n’y connais rien à la danse, mais j’adore regarder la danse contemporaine. Un jour, je suis allé voir une pièce de danse, vraiment géniale, d’une chorégraphe israélienne qui s’appelle Sharon Eyal. C’était tellement excitant. Dès que j’ai vu cette première pièce, je me suis dis qu’il fallait que je vois sa prochaine œuvre.
Du coup, j’y vais d’ici quelques mois. C’est à Manchester, alors ce n’est peut-être pas utile pour vous, mais je vous invite à suivre son travail extraordinaire. D’ailleurs, elle pourrait débarquer à Paris, qui sait ? C’est une super chorégraphe et elle a créé ce spectacle qui s’apparente à une performance dans laquelle elle crée une atmosphère similaire à celle d’un club, mais c’est dans un théâtre. Ça vous donne une telle énergie. Son oeuvre a beaucoup de vie.