Décryptage

2022, une année charnière pour la tech

01 janvier 2023
Par Benjamin Logerot
2022 a été, à bien des égards, une année charnière pour la tech mondiale.
2022 a été, à bien des égards, une année charnière pour la tech mondiale. ©A. Solano/Shutterstock

En cette fin 2022, nous regardons en arrière et analysons ce qui a fait de cette année une période mouvementée pour la tech dans le monde.

Et par mouvementée, nous ne pensons pas uniquement aux points négatifs, pourtant nombreux, à avoir secoué le monde de la tech. Des dizaines de milliers de personnes ont perdu leur emploi, les grandes entreprises ont été secouées et ont montré qu’elles n’étaient pas imperturbables. Mais 2022, c’était aussi une année de succès, comme avec le Steam Deck ou la Pixel Watch, et d’innovations toujours plus impressionnantes les unes que les autres. 2022 a sans aucun doute été étrange et a marqué définitivement la fin d’un certain âge d’or.

Crypto et NFT : après la fête, le retour à la réalité

Elles avaient rencontré un formidable engouement durant les années Covid, mais ces tendances ont vécu une année 2022 bien loin de leurs espérances. Il est difficile de résumer cette année en détail, mais un rapide tour devrait faire comprendre les difficultés rencontrées par les autrefois tout-puissants NFT et autres crypto.

Il n’y a qu’à prendre le cours du Bitcoin, la plus grosse cryptomonnaie du monde, pour se rendre compte des changements du secteur. Alors que son prix culminait à 50 000 $ il y a encore un an, celui-ci a perdu plus de 60 % de sa valeur, atteignant 15 660 $ le 28 décembre 2022.

Une baisse monumentale, effet d’une bulle générale incontrôlée et d’un contexte économique et géopolitique mondial incertain. La sortie de la crise du Covid dans le monde, couplée aux nombreuses conséquences liées à la guerre en Ukraine déclenchée par la Russie il y a presque un an, a secoué un grand nombre d’acteurs de la tech, parmi bien d’autres secteurs. Le clou dans le cercueil ? La faillite de FTX, parmi les plus grosses plateformes d’échanges de crypto, annoncée en novembre et l’arrestation pour fraude de son patron Sam Bankman-Fried.

Suite à la chute de FTX, de nombreux clients veulent être remboursés immédiatement.©Sergei Elagin / Shutterstock

Conséquence directe de cette déroute, le marché des NFT, ces images non fongibles vendues sur les plateformes de cryptomonnaies, a perdu une part importante de sa valeur cette année. Comme le rapporte l’AFP, ce n’est pas nécessairement le nombre de ventes qui a diminué (-5 % de transactions au troisième trimestre), mais bien les volumes d’échanges et donc la valeur moyenne des ventes.

Au troisième trimestre, le volume de ventes est passé de 7,3 milliards à 1,67 milliard de dollars, soit une baisse significative de 77 %. Si le secteur a perdu une énorme part de sa valeur, il a par ailleurs su répondre en partie aux principales critiques qui lui étaient attribuées : sa pollution jugée trop importante.

La plateforme Ethereum a par exemple lancé en septembre dernier The Merge, sa grande mise à jour logicielle. Un lancement réussi et sans fioritures selon un article de The Verge. The Merge a rendu le minage de cryptomonnaies (et donc l’utilisation de très nombreuses cartes graphiques énergivores) obsolète, et a permis de réduire de 99,9 % les émissions de CO₂ d’Ethereum.

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Le métavers ne décolle pas, mais entraîne un nouvel engouement pour la réalité virtuelle

Le métavers était LA promesse de renouveau de l’exploration numérique, portée notamment par Mark Zuckerberg. Le créateur de Facebook avait d’ailleurs changé le nom de son entreprise en Meta à la fin de l’année 2021, avec cette nouvelle stratégie en ligne de mire. Meta termine donc sa première année complète d’existence, avec des résultats bien loin des espérances. La division Reality Labs a fait perdre plusieurs milliards de dollars à l’entreprise pour son développement. Les résultats n’ont cette année pas été à la hauteur, suscitant plus souvent les moqueries que l’admiration.

Preuve en est, l’action de l’entreprise, qui valait encore 338 $ à la fin de l’année 2021, en vaut un peu moins de 117 à l’heure où ces lignes sont écrites, ayant même vécu une période, entre fin octobre et début novembre, sous la barre des 100 $. Oui, le métavers a vécu une année difficile. Certes, Meta n’est pas la seule entreprise à s’être positionnée sur le segment, mais la démesure de ses investissements dans cette technologie a occulté en partie la concurrence.

On retiendra donc de cette année 2022 un lancement en majorité moqué de Horizon Worlds. L’univers en réalité virtuelle présenté comme une révolution s’affichait avec des graphismes considérés comme trop datés et « laids ». Un ratage complet sur lequel l’entreprise a répondu quelques mois plus tard. Meta présentait des finitions plus modernes. Là encore, un échec, puisqu’en lieu et place de ce qu’elle avançait comme une mise à jour prête à être déployée n’était en réalité qu’une vidéo pré-rendue, conçue spécifiquement pour rassurer.

Enfin, autre polémique ayant tourné, là encore, à la dérision : l’affaire des jambes. Horizon Worlds offre la possibilité de contrôler des avatars personnalisables. Mais, ceux-ci ne possédaient pas de jambes. Meta a finalement apporté ce qui manquait, l’amenant à l’aide une communication grandiloquente au premier degré, suscitant l’hilarité de bon nombre d’internautes.

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Là où le métavers échoue, son support, lui, a su séduire. Les casques de réalité virtuelle connaissent depuis deux ans un nouvel élan. C’est d’ailleurs Meta et son Meta Quest qui dictent les règles, puisque l’appareil de l’entreprise représenterait environ 90 % des parts de marché. Selon les analystes du secteur, l’année 2022 pourrait voir s’écouler approximativement 13 millions de casques. 2023 devrait d’ailleurs vivre une dynamique semblable, puisqu’Apple pourrait enfin annoncer son casque de réalité mixte.

L’IA divise autant qu’elle impressionne

Autre technologie qui souhaitait simplifier la vie et qui a fait les gros titres cette année : l’intelligence artificielle générative. Très mise en avant par les entreprises Open AI et Midjourney avec la mise en circulation par exemple de Dall-E 2 puis de Chat GPT, l’IA générative impressionne autant qu’elle questionne.

Grâce aux avancées du machine learning, l’outil Dall-E 2, suivi d’autres utilisés pour des filtres sur les réseaux sociaux par exemple, propose des images impressionnantes générées automatiquement à partir d’une série de mots clés. Si l’excitation de la découverte de ces outils puissants a battu son plein pendant quelques mois, le monde artistique n’a pas manqué de monter au créneau.

Les réalisations de DALL-E 2 sont impressionnantes, mais elles divisent fortement l’opinion publique. ©OpenAI

Les créations par IA évoluent encore actuellement dans un flou juridique qui provoque le malaise des artistes, dont certains ont manifesté leur mécontentement sur le site ArtStation, appellnt à une meilleure régulation des images générées. La création d’images générées par une IA peut en effet nuire à l’emploi (déjà précaire) des artistes selon eux. Autre problème, les IA, pour leur apprentissage, piocheraient directement dans des créations d’artistes sans leur autorisation. Il faudra encore patienter pour voir arriver des régulations sérieuses concernant l’IA, à commencer par un encadrement sur la facilité de génération d’images à caractère pornographique, voire pire.

Les appareils connectés, grands gagnants de 2022 ?

Au début du mois de novembre, plusieurs dizaines de grandes entreprises de la tech (dont Google, Apple et Amazon) lançaient le protocole unique Matter. Cette technologie vient simplifier le contrôle des objets connectés dans la maison en permettant de gérer les appareils compatibles en un seul et même endroit plutôt qu’en passant par une multitude d’applications et de hubs. Il faudra encore attendre quelques mois pour voir arriver une flotte suffisante d’appareils connectés compatibles Matter, mais les entreprises ont déjà commencé à mettre à jour leurs objets existants. Une avancée bien pratique dans la vie de tous les jours.

Google Pixel Watch test
La Google Pixel Watch a su convaincre pour un premier essai. ©Pierre Crochart/L'Éclaireur

Toujours sur les objets connectés, les montres intelligentes semblent avoir enfin trouvé leur rythme de croisière. Le marché est propulsé par des plus petites marques, notamment indiennes, qui offrent le strict minimum fonctionnel. Mais les plus grandes marques du secteur, comme Apple ou Samsung, ont réellement réussi à apporter les modifications nécessaires, particulièrement avec le déploiement de Wear OS 3. Et que dire de l’arrivée sur le marché de la très attendue Pixel Watch, que nous avons pu tester. Google, pour un premier coup, s’en est très bien sorti, apportant un peu plus de diversité dans le secteur.

Terminons ce segment en abordant rapidement le cas des smartphones. S’il en est sorti beaucoup trop cette année pour les dénombrer, ils n’ont pas démérité dans leurs avancées. Ainsi, 2022 a été notamment l’année où le grand public, surtout chinois pour le moment, a vu arriver les capteurs photo d’un pouce, promesse de clichés toujours plus convaincants. Les marques rivalisent d’ingéniosité pour proposer non seulement des smartphones plus puissants (Qualcomm et Mediatek apportent leur expertise dans les puces), mais aussi capables de réaliser des photos toujours plus qualitatives.

Le Steam Deck s’impose, l’OLED et les pliants se diversifient

https://www.youtube.com/watch?v=AvokyBOYe8Y&ab_channel=Valve

Alors que les ventes de Nintendo Switch stagnent et que la console du constructeur japonais commence à accuser son âge, Valve est arrivé avec succès sur le terrain des consoles portables.

Malgré quelques craintes (souvenons-nous des Steam Machines) et cafouillages à son lancement, la console de l’éditeur américain a rapidement su séduire son public et se rendre disponible. Non seulement elle propose une conception solide et de qualité (malgré une autonomie à revoir), mais elle offre également le catalogue de lancement le plus conséquent pour une console. Celle-ci met à disposition à ce jour un peu plus de 10 % du catalogue Steam, soit déjà des centaines de jeux compatibles et jouables où que l’on soit. Les plans de Valve pour le futur de son Steam Deck ajoutent encore à son statut de console incontournable du moment.

D’autres marques ont affiché leur volonté de se positionner sur le segment des consoles portables. Logitech ou Razer ont toutes deux annoncé cette année leurs consoles spécialisées dans le jeu dans le nuage : la Logitech G Cloud et la Razer Edge.

Des questions se posent cependant. La stratégie de ces consoles dédiées au jeu dans le cloud, se basant sur leur capacité à capter suffisamment de réseau wifi ou 5G et non sur la puissance de leurs composants, justifie-t-elle des prix de vente commençant à plus de 300 €, sans compter les prix d’abonnement des services de jeux dans le cloud ? D’ailleurs, l’un des principaux services de jeux dans le cloud, Stadia, fermera définitivement ses portes dans quelques jours, le 18 janvier.

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Toujours côté objets du quotidien, les appareils pliants se sont diversifiés cette année. Si les smartphones continuent de se tailler la part du lion, des constructeurs d’ordinateurs comme Asus et Lenovo se sont essayés à l’exercice avec respectivement le Asus Zenbook 17 Fold et le Lenovo ThinkPad X1 Fold. Il faudra encore un peu de temps pour peaufiner la recette et, surtout, la rendre accessible (un ordinateur de ce genre se vendant plus de 3000 €). Même son de cloche pour les smartphones pliants, dont les modèles se multiplient mais restent pour l’heure cantonnés en Europe aux écuries Samsung et Huawei.

Pour terminer ce tour d’horizon de la tech, 2022 a vu l’arrivée des moniteurs externes OLED. Si la technologie ne date pas d’hier, le marché des moniteurs n’était toujours pas concerné par ce procédé. Dell a été la première marque à se positionner plus tôt dans l’année, avec son écran gamer Alienware A3423DW. Samsung s’est aussi lancé en dévoilant à l’IFA son écran incurvé OLED Odyssey G8. Problème, ces moniteurs sont encore très chers à l’achat, avec des prix dépassant les 1 300 €. La marque sud-coréenne LG a aussi apporté sa solution, en proposant un écran plus petit et, surtout, plus abordable, annoncé sous la barre des 1 000 $.

Dans quelques jours s’ouvrira une nouvelle édition du CES à Las Vegas, la première édition physique depuis trois ans. Un véritable baromètre de l’industrie, qui devrait déjà nous permettre de prendre la température et de dénicher quelles seront les tendances de 2023 dans le monde de la tech.

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