A l’occasion du 8 mars, journée internationale des droits des femmes, voici une sélection de dix films engagés de réalisatrices, mettant à l’honneur les combats féministes d’hier et d’aujourd’hui.
Les Suffragettes – Sarah Gavron (2015)
Angleterre, 1912. Celles que l’on nomme les suffragettes militent pour l’obtention du droit de vote pour les femmes. Maud Watts (Carey Mulligan), jeune Anglaise mère et mariée, est l’une de ces femmes engagées se battant pour l’égalité. Inconsidérées, Maud et ses camarades cessent de mener une lutte pacifique, passant à des actions clandestines plus brutales. Pour la défense d’un droit commun, les courageuses suffragettes prendront le risque de perdre ce qui leur est cher.
Sorti courant 2015 et réalisé par Sarah Gavron (Rocks, Rendez-vous à Brick Lane), Les Suffragettes est un long-métrage portant sur l’obtention du droit de vote des femmes en Angleterre. Bien que celui-ci ne fut acquis qu’en 1918 et réservé uniquement aux femmes de plus de 30 ans – il faudra attendre la loi de juillet 1928 pour qu’elles puissent toutes y accéder sans restriction – le film revient sur les luttes menant à l’obtention du « women’s suffrage« .
Porté par un casting de haute volée (Carey Mulligan, Helena Bonham Carter, Meryl Streep, Brendan Gleeson), le long-métrage se démarque par son réalisme et sa violence nécessaire au vu du contexte historique. Émouvant, engagé et juste, Les Suffragettes souligne l’obscurantisme du début du 20e siècle, ainsi que la volonté et la force de ces femmes, mise en œuvre pour s’extirper du joug masculin.
L’une chante, l’autre pas – Agnès Varda (1977)
Paris, 1962 : deux jeunes femmes que tout oppose, Pauline (Valérie Mairesse), étudiante désirant devenir chanteuse, et Suzanne (Thérèse Liotard), mère dévouée à ses deux enfants, sont liées par une amitié indéfectible. Toutes deux, indépendamment l’une de l’autre, militent pour leurs droits de femmes vivant dans ce monde d’hommes.
Nul besoin de présenter l’immense Agnès Varda. La cinéaste franco-belge signe en 1977 L’une chante, l’autre pas, un long-métrage touchant sur les droits des femmes et plus précisément sur leur droit à l’avortement. « Mon corps est à moi, et c’est moi qui sais, si je veux ou pas mettre bas », chante fièrement Pauline.
S’étirant de 1962 à 1976, années-charnières dans la lutte des droits des femmes (rappelons que le droit à l’avortement est voté en 1975 avec la Loi Veil en France), le long-métrage met en avant une diversité de sujets sociaux dans un mélange délicat de rires et de larmes. Une film à (re)découvrir pour son propos engagé, mais également pour sa poésie.
L’événement – Audrey Diwan (2021)
En 1963, Anne Duchesne (Anamaria Vartolomei), étudiante en lettres, tombe enceinte. La jeune femme désirant avorter fait face à la loi qui, à son époque, le lui interdit. Voyant ses examens de fin d’année approcher, rongée par la situation qu’elle doit cacher, Anne embarquera dans une dangereuse course contre la montre, essayant par tous les moyens de braver les interdits pour libérer son corps de ce qu’il ne veut porter.
L’Evénement, adaptation du roman d’Annie Ernaux réalisée par Audrey Diwan, dénonce une période où la contraception et l’avortement en France étaient interdits, poussant de nombreuses femmes à recourir à des pratiques clandestines souvent dangereuses. Le long-métrage nous permet de pleinement conscientiser le combat éreintant de ces femmes obligées à être mères.
L’actrice Anamaria Vartolomei (récompensée par un César de la meilleure révélation féminine pour son rôle) incarne puissamment la torture physique et mentale vécue par celles qui essayaient, par tous les moyens, de se libérer de leurs grossesses indésirées, parfois au péril de leur vie. Un film engagé et émouvant qui met en lumière la douleur de nos aïeules et appuie pleinement le discours historique de Simone Veil au Parlement le 26 novembre 1974 : « Nous ne pouvons plus fermer les yeux sur les 300.000 avortements qui chaque année mutilent les femmes dans ce pays, bafouent nos lois et humilient ou traumatisent celles qui y ont recours. »
Une Femme d’exception – Mimi Leder (2018)
Ruth Bader Ginsburg (Felicity Jones), jeune avocate Américaine, s’empare, avec son mari (Armie Hammer), d’une affaire fiscale qui pourrait engendrer un changement de regard sur la discrimination sexiste. Un cas judicaire déterminant qui lui permettra de fonder sa renommée dans le milieu et d’effectuer son ascension jusqu’à la Cour Suprême.
Une Femme d’exception, long-métrage réalisé par Mimi Leder, revient sur le parcours de la juriste Ruth Bader Ginsburg, surnommée « Notorious RBG ». Seconde femme nommée à la plus haute juridiction fédérale, grande défenseuse de la cause féminine, des minorités et de l’environnement, Ruth Bader Ginsburg est l’une des figures à qui l’ont doit une partie des grandes avancées législatives en Amérique. Ce biopic revient sur le combat acharné de cette avocate déterminée et souligne sa volonté de changer des textes de lois archaïques pour tenter de mettre fin au pouvoir patriarcal.
Promising Young Woman – Emerald Fennell (2020)
Promise à un brillant avenir médical, Cassie (Carey Mulligan) troquera sa blouse pour une jolie moue. À la nuit tombée, elle se fait passer pour une jeune femme ivre, attirant à elle les hommes sans morale prêts à commettre des abus sexuels. Une fois le prédateur pris au piège, Cassie fait tomber le masque et lui règle son compte pour assouvir sa vengeance. Une routine singulière cachant un lourd secret gouverné par les fantômes de son passé.
Avec Promising Young Woman, Emerald Fennell (révélée en tant qu’actrice dans le rôle de Camilla Parker-Bowles) signe un thriller féministe fascinant. À travers ses tons pop, ses chansons entraînantes et son humour noir, ce conte féministe dénonce – dans un discours à peine dissimulé – les violences sexuelles faites aux femmes, rendant hommage aux victimes oubliées, celles qui n’ont été crues. Révoltant, habile et engagé, ce long-métrage récompensé par l’Oscar du meilleur scénario en 2021 est le film post-#MeToo que l’on attendait.
Frida – Julie Taymor (2002)
Mexique 1925. Frida Kahlo (Salma Hayek), dix-huit ans, est grièvement blessée dans un accident de bus. La jeune femme dont la colonne vertébrale sera impactée, fera preuve d’une volonté sans égale pour tenter de regagner sa mobilité afin de continuer à peindre et vivre de sa passion. Elle deviendra celle que l’on connaîtra pour ses œuvres surréalistes, son engagement politique et sa relation tumultueuse entretenue avec son mari, le peintre Diego Rivera (Alfred Molina).
C’est un bel hommage que rend la cinéaste Julie Taynor avec ce biopic dédié à la grande Frida Kahlo. Salma Hayek incarne prodigieusement la peintre mexicaine, tenant ici le rôle de sa vie. Entre respect historique, mise en lumière du duo Kahlo/Rivera et casting quatre étoiles (Geoffrey Rush, Antonio Banderas, Edward Norton), ce long-métrage valorise la force politique, artistique et féminine de l’icône mexicaine.
Noémie dit oui – Geneviève Albert (2022)
Noémie (Kelly Depeault) est une adolescente bouillonnante avec qui la vie n’a pas été tendre. Placée dans un centre jeunesse depuis trois ans, sans espoirs, ni repères, elle décide de fuguer pour rejoindre son amie Léa (Emi Chicoine), une ancienne pensionnaire. Une fois intégrée à la bande d’amis de sa copine, Noémie tombera sous le charme de Zach (James-Edward Métayer), un proxénète qui jouera de l’attache que la jeune adolescente lui porte pour l’inciter à se prostituer durant le Grand Prix automobile du Canada.
Avec Noémie dit oui, Geneviève Albert signe un drame poignant qui reflète une dure réalité bien trop souvent passée sous silence. La cinéaste dénonce les manipulations infantiles et la prostitution des mineures dans le milieu du sport automobile et délivre un message engagé derrière ce long-métrage bien pensé. La jeune actrice Kelly Depeault est bluffante dans la peau de cette ado en proie à la difficulté qui se révoltera contre le système qui l’a broyée.
Mustang– Deniz Gamze Ergüven (2015)
Pour fêter la fin d’année, Lale (Güneş Şensoy) et ses quatre sœurs (İlayda Akdoğan, Tuğba Sunguroğlu, Elit İşcan, Doğa Zeynep Doğuşlu), jouent dans l’eau avec leurs amis à la sortie de l’école. Une rumeur se propage alors dans leur petit village de Turquie et laisse entendre que ce jeu candide était en réalité obscène. Adoptées par leur grand-mère et leur oncle conservateur, les cinq jeunes filles sont alors privées de liberté, forcées à suivre des cours de pratiques ménagères et mariées de force. Elles tenteront de s’émanciper et de s’extraire de cette prison familiale pour pouvoir enfin atteindre leur rêve de liberté.
Avec Mustang, la cinéaste Deniz Gamze Ergüven propose un film engagé et bouleversant sur l’émancipation de cinq sœurs prises dans l’étau d’un régime patriarcal strict. La mise en lumière des épreuves qu’elles subissent (examen d’intégrité hyménale, tenues austères, enfermement, mariage forcé) met en relief la soumission des femmes toujours présente dans de nombreux pays.
À travers leur révolte, la réalisatrice franco-turque donne à voir la volonté d’indépendance de ces jeunes femmes qui souhaitent, comme tant d’autres, ne plus avoir à se plier aux diktats archaïques et à la tyrannie de la société patriarcale.
Les règles de notre liberté – Rayka Zehtabchi (2019)
Au nord de l’Inde, dans le village d’Hapur, un groupe de femmes fabrique des protections hygiéniques. Arpentant leur village, elles tentent de lutter contre la stigmatisation des menstruations tout en vendant leurs serviettes périodiques. Elles génèrent ainsi des revenus qui leur vont leur permettre de gagner en indépendance financière.
Oscar du meilleur court-métrage documentaire en 2019, Les règles de notre liberté par la réalisatrice irano-américaine Rayka Zehtabchi pointe du doigt le tabou qui perdure autour des règles. Aux quatre coins du monde, les menstruations demeurent souvent entourées de silence et de désinformation. Ce documentaire montre l’ascension de la parole féminine sur ce sujet et la volonté de déconstruire le stigmate, tout en mettant en avant l’émancipation financière des femmes et leur autonomisation.
Sur le même thème, on vous conseille 28 jours de Angèle Marrey, un court-métrage argumenté et informatif qui explore l’expérience des règles, mais aussi les tabous, les stéréotypes et les défis sociaux liés à ce phénomène biologique.
Radioactive – Marjane Satrapi (2019)
Fin du 19e siècle, Paris. Marie (Rosamund Pike) est une scientifique hautement qualifiée, mais ses travaux reçoivent peu de reconnaissance, en grande partie en raison de l’influence patriarcale qui prévaut. La scientifique s’allie à Pierre Curie (Sam Riley), son futur mari, et tout deux entament des recherches sur la radioactivité révélant ainsi deux éléments inconnus à l’époque : le radium et le polonium. Une découverte majeure qui leur vaudra une renommée internationale.
Marie Curie fait partie de ces femmes inspirantes portées à l’écran. Avec le biopic Radioactive, la réalisatrice et autrice franco-iranienne Marjane Satrapi (Persepolis) met l’accent sur la détermination de la chercheuse, tout en dénonçant le sexisme d’une société qui aura longtemps invisibilisé les recherches de la scientifique au profit de son époux. Un film qui met en lumière une triste réalité, encore d’actualité : une femme aura souvent à lutter deux fois plus qu’un homme pour se faire entendre et obtenir la reconnaissance qu’elle mérite.
