Les pionniers du voyage dans le temps

La Machine à explorer le temps, H. G. Wells

La Machine à explorer le temps est considéré comme le roman fondateur du genre puisqu’il fut publié par H. G. Wells en 1895. L’inventeur de la machine nous entraine dans le futur en 802701. Il y découvre un monde occupé par deux populations, les Eloïms, pacifiques, peuple de la lumière, et les sauvages Morlocks, peuple des ténèbres qui sont en fait exploités par les Eloïms. Fervent socialiste, Wells, livre ainsi une réflexion sur l’évolution de la société de son temps et ses injustices dans une analyse quasi hégélienne.

Le Voyageur imprudent, René Barjavel 1940

Tout comme dans le roman de Wells, le savant du Voyageur imprudent, Noël Essaillon, invente un moyen de voyager dans le futur. Pierre Saint-Menoux, son assistant, fera le voyage. Il entraine le lecteur en l’an 100 000 où les humains se retrouvent spécialisés à l’extrême, un monde pas très enviable. L’imprudence du voyageur est énoncée par Barjavel sous le terme de « paradoxe du grand père », une notion vulgarisée avec humour dans la trilogie Back to the future.

La patrouille du temps, Poul Anderson

Pas de sélection sur les voyages dans le temps sans mentionner Poul Anderson et le cycle La patrouille du temps, dont certaines histoires seulement ont été traduites en français. Cette série de récits écrits sur une période de plus de 20 ans, à partir des années 1950, met en scène Manse Everard et son équipe de patrouilleurs, chargés par de lointains descendants de l’humanité des années 19000, de se documenter sur des époques mal connues, mais surtout, de lutter contre les uchronies, c’est-à-dire de maintenir la préservation de la « ligne historique ». Poète, auteur de polar comme de livres pour enfants, l’américain Poul Anderson est surtout connu pour ses romans de SF où les voyages temporels tiennent une grande part. Ils lui ont valu de nombreux prix, dont un prix Prometheus spécial pour l’ensemble de son œuvre en 2001, année de sa disparition.

Les historiens voyageurs

Blitz, Connie Willis

Et si l’histoire ne s’apprenait plus dans les livres ? En 2060, un groupe d’historiens de l’université d’Oxford s’apprête à revivre le Blitz, épisode crucial et passionnant de la Seconde Guerre mondial. Mais quand l’étude consiste à voyager jusqu’en 1940 et à s’immerger dans la période, cela devient extrêmement dangereux. Blitz est un dyptique paru en 2010, composé de Black-out et All Clear. Ces romans en forme de thriller historique au rythme soutenu sont aussi très bien documentés. Mais les problématiques du voyage dans le temps comme l’éventualité de modifier le passé y sont également abordées. Connie Willis a obtenu les prix Locus, Nebula et Hugo pour ce dyptique.

Prisonniers du temps, Michael Crighton

Désert de l’Arizona, ITC, est une entreprise de technologie de pointe hautement mystérieuse. Rives de la Dordogne, un groupe d’historiens de l’université de Yale fait des fouilles autour d’un monastère du XIV^e siècle sous la direction du professeur Johnson. Le rapport ? Un mystérieux message trouvé sur un parchemin : « À l’aide »,  signé du professeur Johnston, disparu récemment. À son équipe de le retrouver en faisant un « voyage quantique », orchestré par ITC, dans la Dordogne de 1357, en pleine Guerre de cent ans… Si les historiens ont suffisamment de connaissances pour savoir se comporter dans le passé, les accompagnateurs d’ITC seront un peu moins regardants. Avec Prisonniers du temps, Michael Crichton nous plonge lui aussi en plein paradoxe temporel…

Les « touristes » temporels

Les Déserteurs temporels, Robert SIlverberg

Marre de cette époque, je vais voir ailleurs… En 2490 Les Déserteurs temporels, protagonistes du premier tome du dyptique Time opera, ne supportent plus leurs conditions de vie dans ce XXV^e siècle foncièrement inégalitaire avec sa pollution, son chômage, sa surpopulation. La solution ? Fuir dans le temps, vers une époque plus propice, le XXI^e siècle. Les archives historiques attestent en effet de cet afflux majeur de réfugiés temporels. C’est totalement illégal. D’où l’intervention de Quellen, responsable des affaires criminelles, chargé de retrouver l’instigateur de cet exode. Mais comment arrêter cette « fuite en arrière » sans compromettre la suite de l’histoire ? Toujours ce fameux paradoxe : on ne touche pas impunément au passé…

Les Temps parallèles, Robert Silverberg 

Les Temps parallèles est le deuxième tome, plus léger, du dyptique de Robert Siverberg. En 2059 la mode est au tourisme temporel. Après avoir raté son master d’histoire, Jud Elliott III est embauché au Service Temporel comme messager temporel. Il devient guide touristique et accompagne les groupes qui souhaitent visiter l’ancienne Constantinople. Il doit y veiller, tout comme les patrouilleurs du temps, à ce que les touristes ne provoquent des altérations dans le cours des événements. Jusqu’au jour où il est lui-même victime d’un « paradoxe transtemporel », lorsqu’il tombe amoureux de sa lointaine aïeule Pulchérie…

Les Voies d’Anubis, Tim Powers 

Les Voies d’Anubis de Tim Powers, grand ami de Philip K. Dick entraine le lecteur dans le Londres des années 1800. Le professeur Brendan Doyle accepte l’offre d’un milliardaire d’assister en 1810 à une conférence du poète Coleridge, grâce à une brèche temporelle. Coincé dans cette époque, Doyle se trouve aux prises avec une faune londonienne faite de mages égyptiens décidés à faire revivre leurs anciens dieux pour vaincre l’empire britannique, d’un loup garou, et de bohémiens louches. Classé chez les steampunk dont Tim Powers est un des représentants, Les Voies d’Anubis  est aussi un roman d’aventures très documenté sur l’Égypte antique et la littérature britannique qui a obtenu les prix Apollo et Philip K. Dick.

Refaire sa vie ?

Replay, Ken Grimwood publié en 1986

Recommencer, refaire ce que l’on pense avoir raté, faire différemment, c’est un peu ce qui arrive au héros de Replay, roman fantastique de Ken Grimmwood. Jeff Winston meurt en 1988 à 43 ans et se retrouve en 1963, étudiant de 18 ans. Ayant gardé tous ses souvenirs, il mène sa vie différemment, pour mourir à la même date et revivre encore dans une succession de boucles temporelles durant lesquelles il vivra chaque fois autrement (entre réussites et echecs) et qui le rapprocheront toujours davantage de la date prévue de sa mort. Et si c’était à refaire ?

L’Anomalie, Hervé Le Tellier

Le thème du voyage dans le temps et de la brèche temporelle n’est pas l’apanage des écrivains de l’imaginaire, la rentrée littéraire nous en offre un bel exemple avec L’Anomalie. Les passagers du Vol AF006 reliant Paris à New York arrivent à l’aéroport JFK le 21 juin après avoir subi une grosse tempête. Chacun reprend le cours de sa vie. Mais deux mois plus tard, le même vol avec les mêmes voyageurs arrive à New York. Pour eux nous sommes le 21 avril. Qui est le double de qui ? Que faire de ces doubles à qui il manque deux mois de vie ? Sachant ce qui est advenu de leur « autre moi » peuvent-ils en tirer les leçons et faire mieux ? Qui a la garde des enfants, etc… Autant de questions « paradoxales », que nous pose Hervé Le Tellier, avec beaucoup d’humour et d’intelligence.

—

Aller + loin : Les meilleurs romans sur l’uchronie : à bâbord vers un monde plus juste ?