Alors que, cet été, Classique et Jazz prendront traditionnellement résidence dans leurs lieux de villégiatures festivaliers, voici notre sélection « grande musique » de juillet, histoire de vous mettre en appétit : de Rostropovitch au Trio Wanderer, de Charlie Parker à You Sun Nah, entre hommages, perles rares, découvertes et confirmations.
Côté classique
Le violoncelle du siècle, Mstislav Rostropovitch
Anthologie pour un génie
Profondément épris de liberté, fervent défenseur des droits de l’homme, humaniste et virtuose, Mstislav Rostropovitch nous quittait il y a 10 ans déjà. Interprète brillant des pièces du passé, commanditaire curieux et créateur insatiable de pièces nouvelles, le violoncelle du siècle a marqué de son empreinte la musique et, au-delà, l’histoire du 20e siècle. Warner rend hommage au maître en éditant une passionnante anthologie de trois CD, rassemblant ses plus grands moments de bravoure : de Camille Saint-Saëns à Nikolaï Myaskovsky en passant par Jean-Sébastien Bach.
Bach : French Suites, Zhu Xiao-Mei
La virtuosité en toute simplicité
« Gagner en liberté, c’est gagner en simplicité »… Les mots sont de Miro mais ils sont aussi au cœur des notes de la pianiste chinoise Zhu Xiao-Mei, grande amoureuse et brillante interprète de l’œuvre de Jean-Sébastien Bach. Elle nous en délivre ici avec liberté et en toute simplicité les Suites Françaises, six pièces charmantes, pures et insouciantes. Six airs à danser, représentatives des éternelles obsessions du compositeur allemand, la pédagogie et le rythme.
Stravaganza d’amore !, Raphaël Pichon et l’Ensemble Pygmalion
La naissance de l’opéra à la cour des Médicis
Amour, musique et poésie… Joli et délicat programme que celui de ce Stravaganza d’amore ! Fascinante immersion baroque au cœur de la Renaissance du 16e siècle. Sous la direction du jeune et brillant contre-ténor Raphaël Pichon, l’Ensemble Pygmalion revisite, avec chœur et instruments d’époque, ces Intermèdes, pièces autrefois intercalées dans les pièces de théâtre de la cour des Médicis (et d’ailleurs), destinées à susciter émerveillement et stupéfaction chez les spectateurs. Au programme, notamment, les six divertissements de La Pellegrina, une comédie de Girolamo Bargagli. Et au final, un merveilleux voyage imaginaire dans l’histoire et dans le temps, jusqu’aux origines de l’opéra.
Dvorák : Piano Trios Opus 65 & 90, Trio Wanderer
30 ans, 2 trios et 1 hommage
Pour fêter ses 30 ans de carrière sans aucune fausse note discographique, le Trio Wanderer nous offre un hommage émouvant au grand compositeur tchèque Antonín Dvořák à travers l’interprétation de ses deux derniers trios pour piano. Le Trio n°3 en fa mineur, à la fois sombre et intense, et surtout, ce célèbre et étonnant, parce que libre et innovant, Trio n°4 en mi mineur, dit « Trio Dumky » où la mélancolie vient se disputer avec génie à la passion.
Verdi se donne des grands airs…
« Viva Verdi ! »… Les patriotes italiens du 19e siècle en avaient fait leur devise de ralliement. Mais par « Verdi », il fallait alors entendre « Vittorio Emanuele Re d’Italia », le bon roi unificateur de la botte transalpine. Toujours est-il que, depuis, ce « Viva Verdi ! » n’a jamais cessé d’être acclamé par les Italiens à la fin de chacun des opéras de celui qui demeure comme l’un des plus grands maîtres de l’art lyrique. Cet album en rassemble ses plus grands airs, de Nabucco à Aida en passant par La Traviata, portés par les plus grandes voix, dont celles de Maria Callas, Montserrat Caballé, Placido Domingo, le tout dirigé par l’incontournable Riccardo Muti.
Côté jazz
She Moves On, Youn Sun Nah
Come-back coréen
Quatre ans se sont écoulés depuis son dernier album, Lento. La Sud-Coréenne Youn Sun Nah est de retour avec son nouvel opus, She Moves On. Entre les deux, un heureux retrait sabbatique, chez elle, en Corée, pour se reposer, se ressourcer. Grand bien lui en a fait puisqu’elle nous revient aujourd’hui avec cet album aux inspirations totalement nouvelles. Le long d’un répertoire plus pop-rock que jazz, entourée du multi-instrumentiste Jamie Saft et du guitariste Marc Ribot, Youn Sun Nah laisse ondoyer cette même et tendre voix qu’on lui connaît. Ainsi y rencontre-t-on Lou Reed, Paul Simon, Peter, Paul & Mary, Joni Mitchell ou même Jimi Hendrix ! Un pari étonnant mais réussi.
Ode provençale à la Bonne Mère
L’amour d’Ahmad Jamal pour cité phocéenne n’est pas un secret. Il en aime l’histoire, ses habitants venus « d’ici et d’ailleurs », son énergie et sa musicalité. Après avoir déjà loué la Ville Rose (sur son album The Essence), voilà Ahmad le magnifique, dit « le monstre aux deux mains droites, de déposer, à 86 ans, son immense talent aux pieds de Marseille, la belle provençale. Un hommage précieux rendu par l’une des dernières légendes vivantes de la blue note. Une déclaration polyphonique où les lignes du piano toujours délicates se parent ici et là des voix de la diva Mina Agossi et du rappeur-slammeur made in France Abd Al Malik.
Happy Bird’s Day !
En 2015, on honorait le 60e anniversaire de la mort de Charlie Bird Parker. Mais pas toujours facile de trouver les mots et les notes appropriés au jour j et à l’instant t pour célébrer un tel monument. Il aura fallu deux ans à Larry Klein pour trouver l’art et la manière de faire rechanter l’ « Oiseau », non pas en enregistrant une énième réinterprétation de ses plus grands standards bebop mais en s’évertuant à raconter et mettre en scène sa vie et, à travers elle, à rendre compte de son immense influence sur le jazz et son histoire. Parmi les « narrateurs » privilégiés de cette folle Passion pour Charlie Parker, on trouve, entre autres, Jeffrey Wright, Gregory Porter, Melody Gardot, Luciana Souza ou encore Madeleine Peyroux.
Les Liaisons dangereuses, Thelonious Monk
L’album porté-disparu
Quelle histoire que ces Liaisons dangereuses du grand pianiste Thelonious Monk. Restés jusqu’ici inédits, les enregistrements de cet album refont aujourd’hui surface, rassemblés dans une superbe édition, enrichie d’un précieux livret de 60 pages qui nous en délivre tous les secrets. Ces enregistrements, ce sont ceux d’un Thelonious Monk millésime 1959. Des compositions qu’il destine, à l’époque, à la BO du prochain film de Roger Vadim, Les Liaisons dangereuses, avec Jeanne Moreau (déjà auréolée de son expériences ciné-jazz Ascenseur pour l’échafaud de Louis Malle) et Gérard Philippe. On pensait cette bande-son à jamais perdue dans les limbes de l’histoire du jazz. La revoilà comme revenue de l’au-delà. Un enregistrement exceptionnel, historique.
Le Nouveau Quintette : les années de guerre, Django Reinhardt
Pour seule arme, sa guitare !
À la tête de leur mythique Quintette à cordes du Hot Club de France, les trublions que sont le guitariste Django Reinhardt et le violoniste Stéphane Grappelli ont écrit certaines des pages les plus endiablées de l’histoire du jazz. Seule parenthèse à cette fantastique et créative collaboration, la guerre. En 1939, alors que Stéphane reste à Londres, Django rejoint la France. Ils ne se reverront qu’en 1946. Mais cette séparation ne met aucunement un coup d’arrête aux élans créateurs de Reinhardt. Bien au contraire, dans ce lapse de temps, Reinhardt redouble d’inventivité, de vitalité pour finalement hisser le jazz manouche jusqu’à ses plus hauts sommets. En voici 34 exemples sur cet album consacré aux années de guerre 1940-1943. 34 morceaux magnifiquement remasterisés, comme revivifiés et autant de symboles de l’irrépressible désir de vie et de paix de toute une époque.