La série « 37 Secondes », diffusée dès ce 3 avril sur Arte, revient sur le mystérieux naufrage du chalutier Bugaled Breiz en 2004. Et retrace avec sobriété le long combat des familles des victimes en quête de vérité.
37 secondes, c’est le temps qu’il aura fallu au chalutier breton Bugaled Breiz pour sombrer au large des côtes anglaises le 15 janvier 2004. A son bord, cinq marins. Seuls trois corps seront retrouvés. Ce drame maritime bien réel suscitera une vive émotion et soulèvera de nombreuses interrogations. Comment ce bateau si costaud a-t-il pu couler ? Était-ce un accident ? Et si le navire était entré en collision avec un sous-marin militaire ?
C’est à ces questions vertigineuses que tenteront de répondre les proches des pêcheurs disparus. Si l’enquête judiciaire s’était conclue en 2016 par un non-lieu, les familles ont porté cette affaire devant la justice britannique en 2021- qui s’est rangée à la thèse de l' »accident de pêche ». Aujourd’hui encore, les proches poursuivent leur quête de vérité, confrontées au mystère qui entoure les circonstances du naufrage.
La bande-annonce de la série Arte 37 Secondes
Pour raconter ce combat acharné, les créatrices de la série, Anne Landois et Sophie Kovess-Brun (qui ont toutes les deux travaillé sur la série Engrenages), ont opté pour une immersion dans l’intimité des familles endeuillées, entremêlant habilement faits réels et fiction. Car bien que les scénaristes aient rencontré certaines figures liées à l’affaire pour en saisir au mieux les contours tant humains que techniques, les personnages ici restent fictifs. « Nous avons choisi l’angle fictionnel pour parler des familles et de leur combat parce qu’on ne voulait pas les déranger. C’est assez compliqué de recueillir la parole de personnes qui ont vécu un drame et de leur dire : ‘Ce que tu m’as raconté, je vais en faire de la fiction’», explique ainsi l’une des co-créatrices, Anne Landois.
Un hommage au combat des familles
Sans jamais verser dans le pathos outrancier ou le sensationnalisme, 37 Secondes se distingue par sa sobriété. Elle explore à la fois les rebondissements de l’enquête et la difficile reconstruction des proches face à un deuil empêché. Et offre une nouvelle occasion à la formidable Nina Meurisse, tout juste récompensée d’un César pour L’Histoire de Souleymane, de prouver l’étendue de son talent. L’actrice incarne ici Marie, employée au mareyage du coin et belle-sœur de l’un des marins, que la tragédie du Bugaled Breiz va révéler à elle-même. Elle deviendra la porte-parole des familles des victimes, vent debout face aux silences et les zones d’ombre, et épaulée par l’avocat Me Christophe Costil (excellent Mathieu Demy).
Portée par son énergie brute et sa détermination sans faille, 37 Secondes offre un bel hommage à la résilience et à la dignité des travailleurs de la mer. Et pour renforcer l’authenticité de ce récit, la série s’ancre dans les paysages sauvages du Finistère, face à un océan omniprésent, dont la force et la menace imprègnent les six épisodes.
Mathieu Demy et Nina Meurisse dans « 37 Secondes »
Navigant entre tumultes intérieurs et méandres institutionnels, ce true crime maritime, récompensé du prix de la meilleure série française au festival Séries Mania 2025, dresse un panorama juste et respectueux de l’affaire. Et bien que le dossier soit officiellement clos, il semble n’avoir pas encore tari tous ses mystères.
37 Secondes pourrait-elle permettre d’ouvrir un nouveau chapitre du feuilleton du Bugaled Breiz ? « On espère, peut-être naïvement, que la fiction pourrait faire bouger des lignes, ouvrir des portes qui sont restées fermées pendant longtemps. Qui sait ce qui pourrait en découler ? », confie Anne Landois.
