Le maître de la soul est de retour avec une œuvre magistrale constituée de 11 titres puissants et prenants aux tripes. Guitare blues sur « Lowdown part II », ligne de bass ronde sur « Floating Parade » et section de cordes magnifiques, Kiwanuka confirme son statut de très grand. D’une beauté à couper le souffle.
L’équipe dans le détail
Small Changes porte bien son nom. Le Londonien de 37 ans d’origine ougandaise garde ses fidèles et apporte un peu de son neuf, notamment avec l’arrivée de producteurs historiques tels Jimmy Jam ou Pino Palladino. Bien sûr, Inflo et Danger Mouse sont toujours là : le changement dans la continuité, avec quelques nuances.
Dean Josiah Cover, alias Inflo, règle les cordes comme un Yvan Cassar. Ensemble, ils ont offert au public les projets Sault, aussi créatifs qu’hallucinants de trouvailles. On vous recommande vivement les titres Cold Little Heart sur l’album Love & Hate, Bow sur l’album Untitled de Sault ou encore le superbe Bitter Streets sur l’album Nine, également de Sault.
Inflo est un élément essentiel des compositions du chanteur britannique. La touche nostalgique et mélancolique de la soul façon Kiwanuka, c’est lui. Il en va de même pour monsieur Danger Mouse, alias Brian Burton. Ce dernier apporte une qualité de production rare, capable de donner une couleur hip-hop à un titre ici, puis une teinte soul à un autre là. Quand on est capable de passer d’Adele à Red Hot Chilly Peppers, la production n’a plus de secret.
Cette fois, l’effet de surprise côté petit personnel vient de la présence de Pino Palladino, et surtout de celle de Jimmy Jam. Le premier, écossais et bassiste de son état, a joué avec Tears For Fears, Phil Collins, D’Angelo, Erykah Badu, Common, Bilal… Une liste longue comme deux bras. Pour le deuxième, tout est là : un sorcier de studio qui a dominé la musique urbaine entre 1982 et 1997 avec son acolyte Terry Lewis. Une icône.
Le résultat
Michael Kiwanuka a ceci de rare : il prend son temps. C’est souvent le cas avec les Britanniques à la réflexion, comme Massive Attack ou Cinematic Orchestra… Prendre son temps est gage de qualité.
Depuis l’album éponyme de 2019, il s’est écoulé cinq ans. Entre temps, crise du Covid et projets Sault ont vu le jour. Cinq ans, cela semble être le temps nécessaire pour accoucher d’un chef d’œuvre. Car ne craignons pas les mots, Small Changes est à ranger dans cette catégorie. Il sera juste à côté de Superfly, What’s Going On et Songs In The Key Of Life sur vos étagères. Intemporel, d’une beauté à couper le souffle, il baigne dans ces genres qui ne meurent pas comme le blues ou la soul acoustique, et repose sur des instruments nobles comme les cordes par exemple. De plus, il est introspectif, véritable reflet de son époque. Ecoutez Lowdown Part I et II, et vous comprendrez mes propos.
Depuis Home Again en 2012, Michael Kiwanuka s’est imposé comme un grand auteur-compositeur. En effet, il écrit l’intégralité de ses chansons. Parfois seul, parfois en collaboration, mais c’est un fait, il n’est pas juste un interprète. Sur The Rest Of Me, il met en avant ses qualités de guitariste ; ce dernier ayant commencé sa carrière en accompagnant divers artistes à la guitare. Ici, guitare acoustique à la Bill Withers en intro. Small Changes est une œuvre très intimiste et personnelle que vous écouterez longtemps sans jamais vous en lasser. Et vous la redécouvrirez à chaque écoute.