Entretien

En rayon avec… DOA

21 mars 2024
Par Thomas Chouanière
En rayon avec… DOA
©Francesca Mantovani

Parole rare du roman policier français contemporain, DOA incarne pourtant, depuis les années 2000, le polar hexagonal d’un goût nouveau, dont les influences sont plutôt à chercher chez Don Winslow et Norman Mailer que chez Dashiell Hammett. En plus de ses évocations politiques, l’auteur a multiplié les clins d’œil à l’univers de la musique dans ses romans. Retour sur quelques titres emblématiques de sa playlist pour « En rayon »…

Le rock, anglais ou américain, a une place importante dans Citoyens clandestins. Pourquoi ?

Dans Citoyens clandestins, ce n’est pas tant le rock que la musique en général qui compte, pour y être associée à un personnage particulier. Elle est notamment un signe avant-coureur de choses à venir le concernant dans l’intrigue, puisqu’elle apparaît souvent à des moments-clés de celle-ci, à la façon d’une instruction pavlovienne. Dans la suite du Cycle, elle a été réutilisée, mais de manière moins ciblée, principalement parce que la première playlist était l’une des dimensions qui avaient séduit les lecteurs. J’avais donc décidé d’en reprendre le principe, avec d’autres contraintes.

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Quel disque écoutez-vous pour écrire ?

J’écris en silence, j’en ai besoin pour me concentrer. Dès lors, la musique, apparue dans le premier tome de ce qui est devenu le Cycle clandestin (Massive Attack, Prodigy ou les Doors figurent parmi les artistes cités, NDLR), doit être vue comme un outil, c’est l’un des truchements par lesquels j’ouvre par exemple une porte sur la psychologie d’un certain personnage.

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Quelle musique représente le mieux le roman noir ?

Quelle question difficile ! Il y a tant de morceaux qui pourraient illustrer un roman noir. Longtemps, et je pense que c’est générationnel, le jazz a été le genre musical associé au noir. Aujourd’hui, on peut oser beaucoup de choses en la matière ; tout est fonction du thème de l’intrigue, de son lieu, de son époque. Et des goûts de l’auteur. Mais parce qu’il faut bien un titre et que c’est un groupe que je me suis remis à écouter récemment, je vais vous proposer Murderer de Low.

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Quel a été votre premier disque culte ?

Scary Monsters (and Super Creeps) de David Bowie.

Et le dernier en date ?

Culte ? Il n’y en a pas. Acheté, Scarlet de Doja Cat.

Un concert qui vous a inspiré, côté ambiance ?

J’ai longtemps été spectateur assidu du festival Jazz à Vienne et j’ai passé de très bons moments dans le cadre magique du théâtre antique de cette ville. Sans doute mes meilleurs souvenirs en concert, notamment à l’occasion de l’une des dernières apparitions de Miles Davis sur scène, au début des années 90. Je choisirais donc ce concert-ci.

L’artiste qui vous vient en tête lorsque vous écrivez Lykaia et pourquoi ?

Ce n’est pas un artiste, plutôt un label anglais de musique électronique, un temps basé à Berlin, qui s’appelle Blackest ever black. Il a disparu aujourd’hui. Je me souviens très bien avoir passé beaucoup de temps à écouter leurs productions et notamment une compilation publiée par eux, I can’t give you the life you want, alors que j’effectuais à Berlin, Prague et ailleurs mes recherches pour Lykaia.

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Un mot sur SCH (et Freeze Corleone) ? Comment le rap s’est introduit dans votre univers littéraire ?

Ayant des goûts musicaux très éclectiques, un héritage des trois premiers artistes qui m’ont influencé, respectivement David Bowie, Prince et Sakamoto Ryuichi, le rap figure depuis sa naissance parmi les courants que j’écoute. Dans le cas de Rétiaire(s), puisque les artistes cités dans la question sont mentionnés dans le roman, c’était une association assez naturelle. Le texte est contemporain, et parle cités et trafic de drogue.

Pour donner un indice sur votre prochain livre, quel morceau ou album nourrit votre travail ces temps-ci ?

Certains jours, des schlagers, le reste du temps, l’intégrale de Wagner (sourire). 

DOA, maître ès polar

C’est avec Citoyens clandestins, adapté en minisérie cette année par Arte, que DOA a connu un grand succès à la fin des années 2000. Dès lors, il a créé une saga autour des personnages de ce premier roman, que ce soit le mystérieux Lynx, le déraciné Fennec ou la journaliste d’investigation Amel, qui gravite dans la sphère des renseignements puis de la sécurité militaire en Afghanistan – Le Serpent aux mille coupures puis les deux tomes de Pukhtu. Ses romans récents prouvent son ouverture d’esprit : Lykaia plonge dans l’interlope milieu du sadomasochisme des clubs berlinois, quand Rétiaire(s) retrouve l’esprit de son cycle clandestin en le transposant dans l’univers des services policiers spécialisés dans la lutte contre la drogue.

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Article rédigé par
Thomas Chouanière
Thomas Chouanière
Journaliste
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