Frédéric Taddéï, l’une des figures les plus importantes du paysage médiatique français des trente dernières années, n’en finit pas de nous surprendre. Le revoilà avec la collection littéraire des Birthday Books (Grasset) qui s’intéresse à tout ce que les gens célèbres ont fait, ou pas, à toutes les époques et dans tous les domaines, à chaque âge. L’occasion de le passer au scan du désormais célèbre rendez-vous de L’Éclaireur : En rayon…
Si vous pouviez rejouer la scène, comment fêteriez vos 18 ans ?
C’est tout le principe des Birthday Books que je viens de lancer. Dans le volume « 18 ans », vous retrouvez tous ceux qui ont eu 18 ans avant vous : Mary Shelley qui écrit Frankenstein, Eminem qui travaille dans la cuisine d’un restaurant pour 5,50 dollars de l’heure, Blanche Gardin qui est punk à Naples, Charlie Chaplin qui s’essaye au stand-up et n’a aucun succès, Jeanne d’Arc qui est prisonnière des Anglais, ou Elvis Presley qui devient chauffeur de camion… Moi, ce serait avec Miles Davis au Minton’s, le temple du bebop. A 18 ans, il y passe toutes ses soirées, dans l’espoir d’y croiser ses idoles, Charlie Parker et Dizzy Gillespie.
Une anecdote découverte en travaillant sur cette collection que vous souhaitez partager avec nous ?
Savez-vous quel âge avait Lee Harvey Oswald quand il a tiré sur le président Kennedy ? 24 ans. Et Gavrilo Princip, quand il a assassiné l’archiduc François-Ferdinand à Sarajevo, déclenchant par la même occasion la Première Guerre mondiale ? 19 ans. Et Lafayette quand il a été nommé général dans l’armée américaine ? 19 ans.
Un artiste disparu avec qui vous auriez aimé diner ?
J’aurais bien aimé dîner avec Arthur Rimbaud quand il a écrit Les Illuminations, à 19 ans. Est-ce qu’il savait qu’il n’écrirait plus jamais rien ? Ou avec Lauryn Hill, 23 ans, dont le premier album solo, The Miseducation of Lauryn Hill se vend à vingt millions d’exemplaires. Savait-elle qu’elle n’en ferait jamais d’autre ? Ou avec Daniel Day-Lewis à la sortie de The Boxer. Il a 40 ans et il arrête le cinéma pour aller travailler incognito chez un cordonnier, à Florence, en Italie. Savait-il qu’il allait y passer quatre ans, loin des caméras ?
Une femme célèbre disparue avec qui vous auriez aimé débattre ?
Avec Anne de Beaujeu, la fille de Louis XI, qui, à 22 ans, commence à gouverner la France en attendant que son petit frère soit majeur. Ça va durer huit ans. C’est elle qui a inventé le pouvoir au féminin en France et même en Europe. Ou avec Marie-Thérèse d’Autriche, qui règne personnellement sur l’Autriche, la Hongrie et la Bohème, tout en dirigeant en sous-main le Saint-Empire romain germanique à la tête duquel elle a fait élire son mari, et ça ne l’empêche pas d’accoucher de seize enfants en vingt ans. Elle, c’était une superwoman avant l’heure. J’aurais adoré l’interviewer.
Avec qui aimeriez-vous faire la fête aujourd’hui ?
Je fêterais bien Noël avec le Père Noël. Depuis le temps que je l’attends…
Votre dernière découverte culturelle ?
Que La Boétie n’avait que 18 ans quand il a écrit son célèbre Discours de la servitude volontaire.
Une oeuvre plaisir coupable à avouer ?
The Servant, un film de Joseph Losey avec Dirk Bogarde, sur un scénario d’Harold Pinter. C’est le film parfait. Et c’est très transgressif.
Travaillez-vous en musique ?
Oui, Sur Dolores, l’album de Bohren & der Club of Gore.
L’album musical de votre vie ?
Le premier album de Betty Davis.
Le premier album acheté dans votre vie ?
Physical Graffiti, de Led Zeppelin.
Votre dernier craquage à la Fnac ?
Les deux derniers album du trompettiste de jazz Erik Truffaz, Rollin’ et Clap !, dans lesquels il reprend des musiques de films, des Tontons flingueurs à L’Armée des ombres. C’est extraordinaire !