Vous ne comprenez pas pourquoi tout le monde parle de ce film ? Vous ne connaissez pas cette fameuse réplique ou n’avez pas vu cette incroyable scène ? Pas d’inquiétudes, chaque mois, on vous aide à y voir plus clair et on vous explique en 3 points pourquoi c’est culte. Et ce mois-ci, nous mettons à l’honneur la trilogie Le Parrain de Francis Ford Coppola, 50 ans après la sortie du premier volet, en 1972.
Je vais te faire voir un film que tu ne pourras pas refuser…
Tout d’abord, un bref rappel de ce qu’est le premier opus de la trilogie du Parrain, réalisé en 1972 pas Francis Ford Coppola. En 1945, nous faisons la connaissance de la famille Corleone, dont le patriarche, Don Vito Corleone (le « Parrain »), dirige l’une des 5 familles de gangsters les plus influentes de New York. Nous suivons en parrallèle le retour de son fils, Michael Corleone, fraîchement médaillé de guerre. Michael nous est présenté comme un anti-conformiste dans cet univers de mafieux, qui ne compte pas se salir les mains, et reste en marge des activités illégales de la famille. Don Vito règle ses affaires à coup de tête de cheval placée dans le lit (délicate attention) de ses ennemis, et autres décisions prises en bon père de famille. Mais au cours de ce premier opus, Don Vito se retrouve menacé, ce qui a pour conséquence de propulser Michael en tant que chef de famille, et chef de guerre. On ne vous en dit pas plus…
Mais il y a de quoi faire, en matière de rebondissements, trahisons, et sauvageries, avec près de 9h de films, de quoi rivaliser avec les plus grosses trilogies bien épiques comme on les aime. Sans jamais tomber dans la débauche de violence inutile, dans laquelle tombent de nombeaux films du genre, la trilogie du Parrain se distingue par l’humanisation de ses personnages, des choix et directions crédibles pour le spectateur.
Si la mise en scène se veut relativement classique, celle-ci sert complètement le récit, avec des plans assez francs qui soulignent le sous-texte : par exemple, une scène très marquante à la toute fin du premier opus, malgré sa simplicité : une porte qui se ferme entre deux personnages, qui souligne leur éloignement, et le détachement de l’un, qui endosse de nouvelles responsabilités, face à la peur et l’isolement de l’autre…
Le Parrain : une narration fondatrice du « film de gangster »
Le décor est planté, les personnages aussi, il ne manque plus qu’une intrigue. Adaptée du roman éponyme, Le Parrain de Mario Puzo, paru en 1969, la trilogie relate la guerre des familles italiennes pour le contrôle de New York, roman étant lui-même fortement inspiré de la vie d’Al Capone, le célèbre génie du crime de Chicago. La trilogie se fonde sur le classique schéma « Rise and Fall », pour traduire, les films montrant tout d’abord l’ascension, puis la chute d’un personnage central. On pourra citer d’autres exemples dans la veine des « films de gangsters » comme Les Affranchis ou Casino, de Martin Scorcese, mais on peut aussi citer des films qui ne sont pas spécialement centrés sur l’univers du crime organisé, mais souvent biographiques, comme Le Loup de Wall Street, de… Martin Scorcese, décidément, ou bien de La Môme, par exemple, d’Olivier Dahan.
En termes de narration, afin d’introduire le spectateur dans un univers et des codes qu’il ne maîtrise pas, Coppola introduit le personnage de Kay, la nouvelle petite amie de Michael au début du premier volet, et qui va formuler à voix haute les interrogations du spectateur. Alors, certes, Coppola n’a pas inventé un procédé vieux comme le monde, mais il l’a bien introduit dans cet univers, procédé qui sera souvent repris dans d’autres films du genre, l’exemple le plus parlant étant celui du film Les Affranchis.
Enfin, Le Parrain a créé de nombreux « codes » au cinéma de gangster, avec l’apparition de personnages types, comme ceux de Don Corleone, figure patriarche du père de famille qui prend des décisions réfléchies, ou bien de Fredo, à savoir ce personnage trop lâche et faible pour être bien intégré dans la famille, et qui causera inévitablement sa perte. Des archétypes que l’on retrouvera dans les plus grands classiques du genre.
Un trio d’acteurs aussi authentiques que la trilogie du Parrain
Al Pacino, Marlon Brando, Robert De Niro. S’il y a bien trois noms qui résonnent dans nos têtes comme les incarnations parfaites des gangsters au cinéma, ce sont bien ces trois là. Chacun dans leur style, ils ont su perfectionner leur attitude et leurs manières, afin d’incarner au mieux ces rôles d’hors-la-loi. Marlon Brando, transformé en Parrain, va jusqu’à tourner avec des morceaux de tissu dans les joues, afin d’alourdir ces dernières, et avoir vraiment l’air d’un vieillard. Pour l’anecdote, les producteurs n’étant pas certains du choix de Brando, celui-ci a du se plier à l’exercice du casting, fait rare pour une les stars de l’époque. Cette performance de Brando lui vaudra d’ailleurs l’Oscar du meilleur acteur, Oscar qu’il refusera d’aller chercher sur scène, afin de signifier son soutien à la cause amérindienne, et son exploitation par l’industrie du cinéma.
Pour le rôle de Michael, après avoir envisagé Robert Redford, ou Ryan O’Neal, deux grandes stars d’Hollywood, Coppola fait marche arrière, car il souhaite absolument caster un authentique italo-américain. C’est chose faite avec Al Pacino qui, à l’époque, n’avait pas encore explosé pour le grand public. Grand bien lui fasse, car c’est dans ce film une vraie révélation, et Al Pacino se destinera à devenir un des tout meilleurs quand il s’agit d’interprêter les mafieux et gangsters au grand écran, avec des films tels que Scarface, L’Impasse, Heat, Donnie Brasco, ou Ocean’s Thirteen.
Enfin, bien que présent uniquement dans le second film (le plus long de la saga), Robert De Niro incarne Don Corleone lorsqu’il est jeune, et qu’il émigre de sa Sicile natale aux Etat-Unis. Il faut savoir que pour offrir une authenticité totale au spectateur, des spécialistes de la culture et de la langue sicilienne ont été engagés sur les tournages des trois opus, afin de s’assurer de la cohérence des paroles, des manières des personnages, voire même du contenu de leurs assiettes ! Gage d’authenticité donc, dans un film qui s’est voulu le plus proche possible de la réalité crue du monde des « affaires », sans oublier cette pincée de classe et de raffinement. Quitte à se faire la guerre, autant la faire en costume italien sur mesure, non ?