Décryptage

Lexique TV : qu’est-ce qu’un « reboot » ?

26 juin 2020
Par Auxence
Lexique TV : qu’est-ce qu’un « reboot » ?
©uihere

Vous avez entendu parler d’une expression mais ne comprenez pas d’où elle vient ni ce qu’elle signifie ? Vous voulez maîtriser le lexique des séries télévisées pour devenir le maître de cérémonie des soirées TV entre amis ? Pas de souci, nous vous proposons dans chaque épisode le décryptage d’un mot de la culture télévisuelle passé à la postérité. Aujourd’hui, attaquons-nous à l’expression « reboot », qui dépoussière les fictions.

Le reboot, quésaco ?

En fiction, un « reboot » (« redémarrage ») est un procédé consistant à recommencer une œuvre du départ en gardant certains éléments d’origine, comme les personnages, leur histoire personnelle et les grandes lignes du récit. S’il s’agit de tout recommencer sans garder les acteurs et les événements de la fiction d’origine, on parlera de « rebrand » (« changement d’image »), mais si des acteurs et événements de la fiction d’origine rejaillissent dans la nouvelle fiction, on parlera plutôt de « soft reboot » (« redémarrage en douceur »).

À la différence du remake, qui modernise ou adapte à un nouveau public une fiction déjà existante, en restant proche de l’œuvre d’origine, le reboot a pour but de redynamiser une saga interrompue pendant une période longue ou d’en lancer une nouvelle, se souciant peu de ressembler à l’originale. Au cinéma, cette distinction semble plutôt claire et oppose par exemple des films tels que The Thing et Le Roi Lion, qui sont des remakes car ils n’apportent pas d’éléments nouveaux, aux deux derniers Spider-Man (Homecoming et Far From Home) qui sont des reboots, car ils relancent l’histoire et ajoutent à la mythologie du personnage. Dans les séries, la frontière entre reboot et remake est plus floue : certaines séries sont des remakes transposés dans d’autres cultures (The Killing US, Homeland, Shameless US, The Office US) mais sont aussi différentes de l’originale que d’autres séries considérées comme des reboots (Full Metal Alchemist: Brotherhood, Doctor Who). Un vrai casse-tête, en somme.

On parle également de « retooling » (« réorganisation ») lorsque le concept même d’une série est changé en cours de route, pour éviter une annulation faute de succès. C’est par exemple le cas de la série Happy Days, qui se focalise sur l’iconique Fonzi et devient plus comique après deux premières saisons en chute libre d’audience.

Pourquoi faire un reboot plutôt qu’une suite (ou un remake) ?

Tout est en fait question de posture par rapport à l’œuvre d’origine. Choisir un remake, c’est considérer qu’il faut respecter l’œuvre d’origine qui se suffit amplement. Choisir de « rebooter » une série, ce peut vouloir considérer que celle d’origine avait un manque aux yeux du public, des showrunners ou des critiques. Étymologiquement, reboot est un terme d’informatique qui désigne le fait de relancer une machine de zéro, car son ancien système était défaillant. En faisant table rase du passé, le reboot tient à corriger les erreurs de l’ancienne saga et intégrer des arcs narratifs qui répondent mieux et sont plus adaptés aux questions posées au départ. Ainsi, le film The End of Evangelion répond aux attentes des fans, qui sont restés sur leur faim avec le final de Neon Genesis Evangelion. La nouvelle saison de Twin Peaks n’est pas tant une suite qu’un éclaircissement des zones d’ombre de la série de 1990-91.

Un reboot est aussi un moyen de mettre au goût du jour une série culte, qui est suffisamment intéressante pour être relancée, mais qui doit se plier au canon des séries modernes. Black Mirror peut être assimilé à un reboot de La Quatrième Dimension, adapté aux inquiétudes et enjeux de notre époque… comme quoi l’appréciation de ce qui tient du reboot n’est pas gravée dans le marbre.

L’avantage du reboot sur le remake est donc de proposer une même cure de rajeunissement, mais en faisant avancer la saga au lieu de la faire mouliner sur place. Le remake peut souffrir d’une connotation de réchauffé opportuniste, qui veut dénaturer le propos d’origine pour en faire une série aseptisée, et remplacer les acteurs d’origine par des mannequins d’1,85 mètre, parce qu’un spectateur c’est idiot et il faut donc lui mâcher le travail (beauté = grandeur morale). Or, le reboot est plutôt l’initiative de passionnés qui veulent faire connaître une série auprès d’une nouvelle génération ou d’un public étranger, sans perdre les fans de la première heure.

Par rapport à une suite directe, un reboot a le double avantage de pouvoir renouveler l’intérêt de la série et de pouvoir changer de sujet sans donner l’impression de passer du coq à l’âne. Ainsi, même si les saisons précédentes traînaient en longueur, on ne reprochera pas au reboot de revenir à la charge, puisque l’on admet que tout ce qui s’est passé avant soit n’existe pas dans cette version, soit est mis en arrière-plan. Une hypothétique saison 6 du Bureau des Légendes ressemblerait à cette option. Les séries anthologiques reposent sur le principe même du reboot : tout en gardant l’esprit et l’esthétique des saisons précédentes (True Detective), voire ses acteurs principaux (American Horror Story), elles changent à chaque saison de thème et s’évadent ainsi d’un scénario limité.

Si toutefois vous n’êtes pas convaincu.e par tous ces néologismes, sachez que vous n’êtes pas seul.e. D’aucuns y voient une façon de snober le terme remake, tout en redisant la même chose. À vous de voir maintenant…

© Visuel d’illustration : wallpaperflare.com

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Auxence
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