Le 30 avril 2020 disparaissait le batteur et musicien nigérian Tony Allen. Pionnier de l’afrobeat, il a collaboré avec nombre d’artistes et de groupes internationaux, dont Fela Kuti & Africa 70 avec lesquels il a enregistré pléthore de disques aux rythmes endiablés.
Du Nigéria à la naissance de l’afrobeat
Né à Lagos au Nigéria, Tony Allen est passionné des musiques de Dizzy Gillespie et Art Blakey. Batteur autodidacte, il se produit dans des clubs de jazz locaux et il rencontre Fela Ransome Kuti qui l’auditionne. L’artiste cherche en effet un nouveau batteur pour son groupe des Koola Lobitos. Impressionné par la performance hors norme du jeune Tony, il l’engage et ils tournent ensemble dans toute l’Afrique de l’Ouest, avec un courant musical qu’ils créent ensemble, le highlife-jazz.
En 1969, les deux amis quittent l’Afrique pour les États-Unis. Impressionnés par le funk de James Brown, galvanisés par les discours de Martin Luther King et Malcolm X, gagnés par les revendications égalitaires des Afro-américains, Kuti et Allen créent un courant musical qui englobe toutes ces énergies, l’afrobeat, mêlant textes engagés, rythmes traditionnels nigérians et groove jazzy. Jusqu’en 1980, Fela Kuti & Africa 70 vont faire danser le monde entier, avec l’enregistrement de plusieurs disques par an, dont Expensive Shit en 1975, Zombie en 1976 ou encore Shuffering and Shmiling en 1978 et No Agreement en 1979.
Un désir d’indépendance
Après une telle décennie explosive et politisée et tandis qu’il a déjà été leader de quelques projets avec les Africa 70 (comme les albums Jealousy ou Progress), Tony Allen s’émancipe de Fela Kuti et fonde son propre groupe, les Afro-Messengers, avec un premier album différent, plus calme et sensuel, No discrimination, en 1980. Il enregistre avec Manu Dibango et Ray Lema, s’installe à Paris où il travaille notamment avec Jean-Louis Aubert et entame une nouvelle collaboration en binôme fructueuse avec le producteur Docteur L., issu du groupe de rap Assassin. L’afrobeat se mélange désormais à la pop, au rap, à l’électro et joués avec The Allenko Brotherhood Ensemble, au début des années 2000.
Des participations prestigieuses
Très demandé, le batteur œuvre sur de nombreux albums d’artistes internationaux tels que Sébastien Tellier sur l’album Politics, Damon Albarn avec qui il crée le groupe The Good, the Bad and the Queen, Charlotte Gainsbourg pour l’album 5:55, Air pour Pocket Symphony, Jimi Tenor pour Inspiration Information, vol.4 et il reprend U2 pour l’album In the name of Love : Africa Celebrates U2.
Infatigable, Tony Allen poursuit sa collaboration avec Damon Albarn en créant un nouveau groupe, Rocket, Juice and the Moon où les rejoint Flea des Red Hot Chili Peppers, participe à la pop minimaliste de l’album Film of Life et à la musique électronique dans N.E.P.A., tout en travaillant avec Jeff Mills sur l’EP jazz et techno Tomorrow Comes The Harvest ou avec Hugh Masekela sur l’album Rejoice, retrouvant les rythmes afrobeat de sa jeunesse. Tony Allen a donné son dernier concert dans une église londonienne en mars dernier, avec un ultime solo de baguettes magiques…