Dans le monde des jeux vidéo, il y a les gamers qui jouent à tout et ceux qui, lassés par la linéarité et les modes faciles, ne se frottent qu’aux jeux dits “hardcore”. Aussi appelés “punitifs”, ces jeux proposent un niveau de difficulté très (très) élevé. Quel plaisir y a-t-il à s’infliger de telles souffrances ?
Le seigneur des ténèbres
Les jeux difficiles ont existé de tout temps. À l’époque des consoles 8 et 16 bits, certains titres avaient déjà la réputation d’être interminables. Les plus anciens se souviendront avec nostalgie des parties enflammées de Metroid, Castlevania, ou Megaman. Des jeux qui ne proposaient pas de sauvegarde automatique ou de vies infinies. Chaque erreur était fatale : il fallait recommencer tout son parcours… Un procédé qui paraît absurde aujourd’hui, mais qui a forgé une génération de gamers dans l’idée qu’une victoire se mérite. L’évolution des jeux vidéo a ensuite connu une période plus mainstream et linéaire, en offrant des jeux aux scénarios certes plus élaborés, mais où le mode facile était de mise.
En 2009, le studio FromSoftware sort Demon’s Souls de Hidetaka Miyazaki. Plongé dans un univers de dark fantasy médiévale, le joueur a pour mission d’affronter des créatures redoutables, des adversaires humains pouvant tuer d’un coup d’épée. Le jeu est une véritable bombe : beaucoup de joueurs néophytes sont déconcertés par le niveau de difficulté. FromSoftware en rajoute une couche l’année suivante avec le désormais mythique Dark Souls. Trempant dans le même univers impitoyable que son prédécesseur, ce RPG a défrayé la chronique en incarnant à la perfection le terme “punitif”. Une bonne partie des gamers adoube pourtant le titre, permettant à son concepteur de développer un deuxième et troisième volet. La trilogie a été remastérisée depuis pour la Xbox et la Nintendo Switch.
La sombre beauté de la difficulté
Dark Souls, comme tous les jeux hardcore, demande un investissement total de la part du joueur. D’une part, en termes de temps, car le nombre d’heures passées face à l’écran est imposant. Et d’autre part, c’est un effort intellectuel : un jeu hardcore s’appréhende, il faut le comprendre, se plonger dans son univers et faire siens ses codes.
Le défi dans Dark Souls est de survivre, car chaque décision peut signer la fin. On ne peut pas se jeter tête baissée dans une partie, il y a un minimum d’analyse et de réflexion à fournir. Chaque victoire nécessite une stratégie, rien n’est prémâché. À une époque où beaucoup de développeurs essayent de faire plaisir aux joueurs, en veillant à rester accessibles, une telle philosophie a de quoi brusquer les gamers récalcitrants à l’épreuve. Et pourtant ces jeux trouvent un écho très favorable auprès d’un public fervent.
La lumière au bout du chemin
Le joueur hardcore sait bien qu’en fin de compte, une fois le jeu compris, il va aboutir à une récompense ultime : la satisfaction d’avoir surmonté un obstacle perçu comme infranchissable au départ. Chaque ennemi est une étape vers cette libération ultime. Contrairement à des titres qui proposent des boss plus ou moins difficiles, mais calqués sur le même moule, le jeu hardcore impose au joueur de comprendre l’ennemi, quitte à recommencer beaucoup, beaucoup de fois. Rien n’est insurmontable ni injuste.
Le jeu hardcore titille le cortex du gamer en lui proposant des énigmes plus élaborées que la norme grand public. La joie de progresser n’en est que plus précieuse. Une école du jeu qui n’est pas si différente de celle de la vie et cette proximité entre les deux est peut-être ce qu’il y a de plus irritant pour certains joueurs qui veulent s’évader du quotidien.
Mais difficulté ne rime pas forcément avec austérité. Hidetaka Miyazaki l’a prouvé avec brio avec des titres comme Bloodborne ou le dernier-né Sekiro Shadow Die Twice. Même une franchise aussi mondialement réputée que Star Wars a fait le pari de la difficulté avec Jedi Fallen Order. Le mainstream qui embrasse la difficulté, voilà peut-être le signe d’une évolution significative et la preuve que le jeu vidéo ne cesse de se réinventer afin de proposer des défis toujours plus stimulants.
Notre top 10 (subjectif) des jeux les plus durs de l’histoire
10. F-Zero GX (GameCube)
9. Super Mario Bros : The Lost Levels (Super Nes)
8. Contra (Super Nes)
7. Super Meat Boy (Xbox 360 et PC)
6. Demon’s Souls (PlayStation 3)
5. Castlevania : The Adventure (Game Boy, Nintedo Switch et 3DS)
4. Mega Man (Super Nes et PlayStation)
3. Dark Souls (PlayStation 3, Xbox 360)
2. Sekiro : Shadows Die Twice (PlayStation 4, Xbox One et PC)
1 ex-aequo. Ghosts’N Goblins (Arcade et Super Nes) et Battletoads (Super Nes)