La musique est un art en constante évolution. Au point qu’il semble parfois vain de cataloguer les différents genres, sous-genres et sous-sous-genres ! Fluctuants, se réinventant sans cesse, les styles musicaux sont irrémédiablement appelés à changer. La fusion exacerbe ce phénomène en mélangeant deux styles, parfois opposés. Retour sur cette tendance qui redistribue les notes !
Et la fusion fut…
Avant d’être une tendance, la fusion était un genre musical à part entière. Née pendant les années 1960, la « fusion » désigne un mélange de rock et de jazz. L’improvisation et les structures libres du jazz sont confrontées aux rythmiques lourdes et percutantes du rock pour créer un hybride expérimental qui a inspiré bon nombres d’artistes des deux bords. Parmi les plus célèbres on compte l’immense Miles Davis, Herbie Hancock et Return to Forever.
Un groupe comme Mahavishnu Orchestra a ainsi opéré une fusion entre rock, jazz et musiques traditionnelles indiennes ! Le souffle originel de la fusion se perd ensuite pendant les années 1970, le terme devient passe-partout et générique, jusqu’à être carrément galvaudé. Seuls de rares artistes comme Chick Corea perpétuent encore de nos jours la « fusion » dans cet esprit. Actuellement, la fusion est une tendance ponctuelle qui consiste à mélanger deux genres musicaux. Certains artistes en font leur identité sonore distinctive, d’autres y ont recours le temps d’un tube.
Le son d’un soir
Il s’agit parfois tout simplement d’être au bon moment avec le bon son ! Le meilleur exemple est ainsi Lil Nas X qui enflamme en ce moment les hits parades du monde entier avec son tube Rap & Country « Old Town Road ». Accompagné de Billy Ray Cyrus, il a été en tête du classement américain plus de 17 semaines, performance inégalée depuis 60 ans… Propulsée aux sommets grâce à l’application Tik Tok, la chanson cumule des milliards d’écoutes grâce au streaming.
Dans un toute autre registre, les trublions teutons de Rammstein, pourtant connus pour célébrer un rock industriel particulièrement corsé, jouent aux petit fripons sur « Ausländer ». Issu de leur dernier album en date, Rammstein, le morceau mélange allègrement métal et dance. Le groupe allemand s’y moque avec ironie et une bonne dose de provocation de l’attitude postcolonialiste qui a la vie dure en Europe.
Une marque de fabrique
Disparu récemment, Johnny Clegg fut un des plus illustres représentants de la fusion tout au long de sa carrière, à l’image de son ultime album studio King of Time. Le « zoulou blanc » a ainsi mélangé la pop au Mbaqanga, tradition musicale sud-africaine issue du brassage de différents styles locaux : musiques xhosa, zulu et sotho, du marabi et de la kwela. Le terme Mbaqanga signifie « pot au feu du pauvre ». Moins exotique et plus terroir, des artistes français ont choisi de s’affranchir des frontières de genres. Avec ses envolées lyriques, ses textes exaltés et une présence scénique bouillonnante, le groupe Feu ! Chatterton a créé une véritable adhésion populaire pour son style qui mélange des sonorités pop-rock et du spoken word. Un titre comme L’Ivresse, issu de l‘album L‘Oiseleur illustre à merveille l’univers du groupe.
Autre concept : Bon Entendeur est un trio français pourvoyeur de mixtapes toujours étonnantes et extrêmement cohérentes. Sur son album Aller-retour, les trois garçons usent également du spoken word voire même d’interviews de célébrités (par exemple Pierre Niney) réalisées pour les besoins des morceaux, et tissent un monde sonore envoûtant où se côtoient pop, funk, disco et électro. Pionniers d’un autre genre, les musiciens de Caravan Palace ont perfectionné l’art de l’electro-swing. Adeptes de l’électro et fans de jazz manouche, ils ont ainsi tracé une voix/e singulière que l’on retrouve avec plaisir sur un album comme Chronologic.
De la fusion originelle Jazz’n Rock à la fusion tout feu tout flamme transgenres de ces dernières années, la musique n’aime décidément pas se voir étiqueter. Et elle n’a pas fini de nous le rappeler.