Artiste fantasque, hors du commun, coloré et iconique à souhait : Elton John marque les générations depuis plus de 50 ans. Tantôt rock, tantôt pop et toujours glamour, le style incomparable du chanteur se centre autour de son instrument de cœur : le piano. Portrait d’un homme à la vie mouvementée, d’un archétype musical qui a inspiré plus d’un artiste, d’un virtuose unique en son genre.
Le génie rêveur
Elton Hercules John se nommait autrefois Reginald Kenneth Dwight. Petit garçon rouquin ayant grandi dans une famille modeste à Pinner, au Royaume-Uni, rien ne laissait présager une carrière musicale pareille. Mais Elton John était un rêveur qui aimait observer au-delà de ce qu’il pouvait voir. Déjà sensible à la musique, il s’est plusieurs fois trouvé à enchaîner quelques notes sur le piano du salon, révélant son talent naturel de musicien. C’est ainsi que le rêveur s’est croisé au génie, lui ouvrant grand les portes de la Royal Academy of Music.
Il y fait ses classes, il perfectionne sa technique et son talent avant d’en sortir couronné de succès. Il fonde son premier groupe, Bluesology, qui lui inspire son nom de scène, qui deviendra plus tard son patronyme officiel : Elton John. Il emprunte le prénom Elton à son saxophoniste et le nom John à son chanteur. Preuve définitive de son lancement dans le monde musical, il découvre son style et sa sexualité au fur et à mesure des tournées avec le groupe. C’est en 1967, au détour d’une petite annonce dans le journal, qu’Elton John fait la rencontre de sa vie, en la personne de Bernie Taupin.
Bernie, c’est en quelque sorte l’homme de la vie d’Elton, artistiquement parlant. Le parolier a trouvé son compositeur et vice-versa, créant ainsi une amitié d’une solidité hallucinante et une collaboration musicale indestructible, encore aujourd’hui. Un an après leur rencontre, l’éditeur Dick James les recrute au sein du label DJM Records et leur ouvre alors les portes du paradis : celles des Etats-Unis.
L’homme tourmenté
C’est Outre-Atlantique qu’Elton John affirme pleinement sa personnalité. Il trouve son style excentrique, ses lunettes emblématiques, ses couleurs explosives, cherchant à tout prix à s’éloigner de l’image de son enfance complexée. Et le succès ne fait que suivre cet élan d’affirmation de soi ! Il sort alors, en 1973, l’album triomphant Goodbye Yellow Brick Road, considéré encore aujourd’hui comme un de ses plus grands chefs-d’œuvre. Le petit génie rêveur devient un homme flamboyant qui, rapidement, se brûle les ailes. Les tourments d’Elton remontent à la surface, favorisés par sa popularité grandissante et sa réussite enivrante.
La tentation était dévorante, incontrôlable, et c’est ainsi que le chanteur goûta aux plaisirs diaboliques de l’alcool et la drogue. A force d’y goûter, il devint accro, dépendant, choisissant un mode de vie indubitablement malsain. Mais c’était une rock star, le spectacle devait continuer à tout prix malgré la solitude dans laquelle Elton John s’enfermait. Son purgatoire était encore et toujours la musique, ce qui s’est, d’ailleurs, ressenti dans ses compositions, quand on écoute le survoltage de l’album Captain Fantastic and the Brown Dirt Cowboy, sorti en 1975, et considéré comme le second chef d’œuvre de sa carrière. La troisième merveille de sa discographie n’était autre que Blue Moves, publié en 1976, marquant définitivement le tournant musical d’Elton John dans son parcours.
Les années 1980 poussent le chanteur à rester dans l’obscurité personnellement, tout en continuant à être brillant musicalement. La drogue et l’alcool sont toujours présents, mais n’empêchent pas Elton John d’atteindre des sommets avec des tubes incontournables tels que Blue Eyes, Sad Songs (Say So Much) ainsi que l’incroyable I’m Still Standing qui marque, à sa manière, le début de son chemin vers la rédemption.
L’icône intemporelle
Ce ne fût pas une tâche aisée, mais Elton John a finalement réussi à sortir de ses tourments, donnant un ton plus doux à sa carrière mouvementée. Sa sexualité assumée appuie son combat pour la cause homosexuelle, offrant une voix privilégiée à cette communauté brimée plus que jamais vers la fin du 20ème siècle. Il participe ainsi au Live Aid, le plus grand concert caritatif en faveur de la lutte contre le sida jamais égalé et s’implique de plus en plus dans cette cause qui lui tient à cœur. Les années 1990 le mènent à nouveau sur la route du succès, prenant en sagesse et en expérience après ses douleurs passées.
En 1994, il participe à la bande originale du Roi Lion, un des plus grands succès de la firme Disney, et s’illustre particulièrement avec Can You Feel The Love Tonight (L’amour brille sous les étoiles), qui remporte l’Oscar de la meilleure chanson cette année-là. La musique de film devient un nouveau terrain de jeux, accompagnant alors Hans Zimmer sur la bande originale de La Route d’El Dorado. Elton John se diversifie, et prend définitivement en maturité, pour le plus grand bonheur de ses fans et de son entourage, imposant avec d’autant plus de légitimité son statut d’icône de la musique.
Aujourd’hui, Elton John est en pleine tournée d’adieu, pour trois longues années, qui sonne avec beaucoup de bienveillance et de talent la fin d’une carrière forte de succès, de hauts, de bas. On a pu d’ailleurs la découvrir dans le film Rocketman, sorti en mai 2019, qui contait la vie presque fantasmée du chanteur, avec ses péripéties, ses réalités et ses inspirations. Une œuvre cinématographique qui a remis sa musique au goût du jour, touchant toutes sortes de publics, prouvant bien que peu importe la génération, Elton John reste un génie émouvant, avec ses forces et ses faiblesses, mais surtout… intemporel.