Figure centrale de la Nouvelle Vague, artiste aux talents multiples, Agnès Varda est décédée la nuit dernière à l’âge de 90 ans. L’infatigable créatrice belge aux cheveux bicolores laisse derrière elle une œuvre majeure et intemporelle.
Une vie avant le cinéma
Si le grand public la connaît pour ses chefs d’œuvres cinématographiques – de Cléo de 5 à 7 à Sans toit, ni loi, en passant par le dernier, Visages, villages –, Agnès Varda n’a pas toujours tenu une caméra à la main. Arlette, de son vrai prénom, est née en Belgique, à Ixelles, en 1928. À 12 ans, pour fuir la guerre, elle part avec sa famille s’installer à Sète. L’adolescente rencontre ensuite Jean Vilar et son épouse, un coup de foudre artistique. La passion première d’Agnès, c’est la photographie. En 1951, son ami Jean lui demande de devenir la photographe officielle du festival d’Avignon. Ce goût pour l’art exigeant et accessible se forge durant ces années photographiques.
Cinéma-liberté
Son premier long-métrage sort en 1955. Avec La Pointe courte, Agnès Varda filme les déboires amoureux d’un homme (joué par Philippe Noiret) en vacances à Sète… Réalisé avec trois francs six sous, son film reçoit les compliments d’un certain André Bazin, l’un des tauliers des Cahiers du Cinéma. Selon le magazine, le jeune cinéma incarné par Truffaut and co lui doit tout… Varda a enchaîné les expériences filmées où l’abstrait se mêle au réel et où le spectateur devient un acteur majeur de l’histoire. Après le succès de Cléo de 5 à 7 en 1962, la réalisatrice ne cesse de travailler et d’imaginer de nouvelles formes cinématographiques. Sa carrière lui vaut un quadruplé mérité : un Lion d’Or à Venise pour Sans toit ni loi (1985), un César d’honneur en 2001 et une Palme d’honneur en 2015, et elle recevait un Oscar d’honneur à Los Angeles, en 2017, pour l’ensemble de son œuvre !
Toujours engagée
Sa vie ne saurait être séparée de celle de Jacques Demy, l’homme de sa vie. Avant sa disparition, la réalisatrice a d’ailleurs eu l’idée ingénieuse de faire un film sur l’enfance de son mari, Jacquot de Nantes. Grande humaniste, elle a participé à de nombreux combats, à commencer par celui de porter le « Manifeste des 343 » (1971), un appel pour la légalisation de l’avortement. On se souviendra également du documentaire Les Glaneurs et la glaneuse (2000), un incroyable parcours humaniste qui dénonce les aberrations de la société de consommation.
Son regard vif et aiguisé sur le monde invisible et son esprit toujours truculent auront bien du mal à être remplacés…