Critique

Alonzo prouve pourquoi il est le « Capo dei Capi »

03 septembre 2015
Par Grégory
Alonzo prouve pourquoi il est le « Capo dei Capi »

L’évolution d’Alonzo en solo est assez remarquable. Membre des Psy4 de la Rime le plus « rue », il est aussi celui qui colle le mieux à des tendances qui lui correspondent parfaitement, la preuve avec sa mixtape « Capo dei Capi ».

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Avec Capo dei Capi, Alonzo suit cette mode qui revient avec force : refaire des mixtapes. La tendance n’étant qu’un éternel recommencement et la consommation de la musique étant en pleine évolution, même des rappeurs confirmés qui n’ont plus rien à prouver comme Alonzo des Psy4 de la Rime (faut-il vraiment le répéter ?) se (re)mettent à faire des mixtapes que l’on appelle aussi communément « des projets intermédiaires » censés donner des nouvelles d’un artiste entre deux albums « officiels ». Ça, c’est pour la partie business et gestion de carrière. En réalité, particulièrement dans le cas d’Alonzo, la vérité est peut-être plus simple.

Pour le Marseillais, c’est certainement un bon moyen d’enfoncer le clou. Depuis quelques années et son émancipation solo, il a trouvé sa voie, son personnage et son univers, un savant mélange de rap street et de trap music dans lequel il s’épanouit avec fracas. C’est pourquoi, dans son cas précisément, la mixtape est certainement le meilleur moyen de se faire plaisir, d’ouvrir totalement les vannes sans les contraintes qu’impose un album studio. Ici, il n’est question que de kif et Alonzo déroule cette combinaison rap de rue/trap sans se gêner montrant ainsi qu’il est largement au niveau de la nouvelle garde qui débarque férocement porté par ce style comme Gradur ou Kaaris. Alonzo, en plein dans la tendance du rap actuel, se régale. On sent d’ailleurs bien que cela faisait longtemps qu’il rongeait son frein de pouvoir donner un jour sa pleine mesure dans cette atmosphère qui lui sied à merveille. Aujourd’hui, tous les voyants sont au vert et le plaisir qu’il prend est tellement évident qu’on le sent, qu’il en devient quasiment palpable. D’ailleurs, ce n’est pas un hasard si cette mixtape n’est que le volume 1, c’est en effet toute une série qui est en préparation

Et quand on fonce dans une direction, on ne fait jamais les choses à moitié. Ce n’est pas le genre du papé de toute façon : autotune, trap music, argent, femmes, rue et gros egotrips sont évidemment au programme. C’est qu’à l’heure actuel, Alonzo est un homme et un artiste qui a réussi et qui n’a aucune, mais alors aucune envie de regarder en arrière même s’il ne renie rien de ce qui a fait son parcours. Mais lui ne voit que devant, définitivement. Alors on n’y trouvera pas forcément des thèmes politiques ou sociaux même s’ils s’expriment entre les lignes. Alonzo laisse plutôt son côté quartier s’exprimer sans lui mettre de barrières ou tenter de le freiner. Au contraire, il est fort, violent, percutant, sans retenue, un mot : libérateur.

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Et le principe de la mixtape étant évidemment celui de la liberté, cela permet au papé de mettre en avant de jeunes artistes qui ont la chance d’avoir un morceau entier sur ce projet. On pense à Elams, Kof, Graya, Houssein ou S.Téban. Ce type de format sert aussi à ça : donner de la force et une exposition à ceux qui en ont moins et partager la lumière avec des rappeurs talentueux mais encore méconnus. Chacun y met vraiment du sien, conscient de tenir une vraie chance de pouvoir faire partager son savoir-faire avec un public aussi large. Alonzo, c’est une grosse exposition, il s’agit d’en profiter.

Si les thèmes sont largement ceux de la trap comme on l’a dit plus haut, il y en a tout de même un qu’il convient de mettre en exergue. Il s’agit des femmes. Objet de désir et de convoitise, il y a aussi une certaine défiance, une nécessité de faire attention à leur duplicité, à leur pouvoir. Du coup, on prend conscience de la fragilité des hommes devant la gent féminine et d’une sorte de confusion des sentiments qui ressort dans plusieurs morceaux, ceux d’Alonz’ mais aussi de ses invités. A tel point que c’est parfois l’incompréhension devant le mystère féminin et seule la mama (ou presque) trouve finalement grâce aux yeux des artistes. Bien sûr, il y a d’autres choses dans ce projet. Notamment quelques egotrips bien sentis comme dans Finis-lesAlonzo rappelle son parcours pour mieux expliquer qui il est aujourd’hui et pourquoi il est beaucoup trop loin, beaucoup trop haut pour le commun des rappeurs. Il n’est pas le « Capo dei Capi » pour rien. Rappelons pour mémoire que cette expression mafieuse signifie « le chef des chefs ». Une formule qui sied aussi bien à Marseille et à son histoire contemporaine tourmentée.

Mais qu’importe, même si la vie est difficile, qu’il y a des galères, il y a aussi de la joie et cette vie, et bien on l’aime quand même et, malgré tout, il y a quand même beaucoup d’amour. Finalement, la conclusion d’un tel projet est donnée par Alonzo lui-même dans le dernier morceau du tracklisting, Grand Sud dans lequel il rappe sec et explique qu’il a « lâché tout ce [qu’il avait] dans la tête », qu’il fait du son « crapuleux », un peu « énervé », seule manière pour lui d’exprimer son « désarroi ». Un excellent résumé de l’ensemble de son disque.

Alonzo – Capo dei Capi Volume 1 disponible sur Fnac.com

Article rédigé par
Grégory
Grégory
Disquaire
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