Le mois de novembre sera marqué par la COP 30, organisée du 10 au 21 novembre à Belem, en Amazonie. Voici cinq bandes dessinées, de l’enquête à la dystopie, pour comprendre ce qui se joue lors de ce sommet international sur l’écologie.
| Une bouteille à la mer, de Zelba et Isabelle Autissier
« On ne naît pas écolo, on le devient. » Tout commence pour Zelba lorsqu’elle trouve sur la plage une bouteille, avec un mot glissé à l’intérieur, signé par la navigatrice Isabelle Autissier. Elle est alors saisie d’une urgence : rencontrer celle qui a été première femme à faire le tour du monde en solitaire et qui s’est engagée pour la protection des océans depuis les années 1990. Que connaît-on réellement de l’océan ? Comment s’engager concrètement contre le changement climatique ? Qui sont les scientifiques et militants qui se mobilisent au quotidien ?
Isabelle Autissier, également présidente de WWF France, se désole de voir un océan malade atteint « d’humanité aiguë »… Elle embarque alors Zelba dans un océan de découvertes scientifiques. Le but ? Montrer que l’eau est notre bien commun le plus précieux. Sans eau, pas de vie. L’eau, c’est comme « le meetic des molécules », précise, amusée, la navigatrice. L’idée étant de repenser notre rapport aux océans, afin d’anticiper les forces naturelles et non pas de les dominer. Dans Une bouteille à la mer (Futuropolis), le dessin sensible et survolté de Zelba illustre parfaitement l’engagement sans faille d’Isabelle Autissier.
| Inlandsis Inlandsis, de Benjamin Adam
Voyage au centre de la Terre. Dans Inlandsis Inlandsis (Dargaud), le dessinateur Benjamin Adam pose les bases d’un récit d’anticipation, qui se déploiera sur plusieurs tomes. En filigrane, c’est la question de la mémoire et du rapport collectif à la nature qui rythme le récit. Tout commence en 1955, lorsqu’un certain Claude Lorius embarque pour les premières campagnes polaires. En 1964, alors qu’il fait face à la grande barrière de glace, le scientifique a une intuition : l’inlandsis, cette épaisse couche de glace qui recouvre un continent, permet de remonter le temps. Grâce à l’air stocké dans ce bloc de glace, il est possible d’évaluer la température de l’air d’il y a des milliers d’années.
Le dessinateur nous projette dans un futur proche et dystopique, en 2046, où deux auteurs de bande dessinée sont envoyés sur le projet Ice Memory pour documenter les avancées scientifiques alors que le monde sombre dans une crise générale. Habitué des mises en abîme, Benjamin Adam s’inquiète pour son médium et anticipant une grande crise du papier, la bande dessinée étant devenue un objet de luxe menacé d’extinction. Morale de l’histoire : restez vigilant et lisez des BD !
| Les terrestres, de Raphaëlle Macaron et Noël Mamère
La menace de l’effondrement est-elle réelle ? Pour gérer son écoanxiété, la jeune dessinatrice Raphaëlle Macaron fait appel à Noël Mamère, pionnier de l’écologie politique. « Qu’est-ce que quelqu’un comme moi peut bien faire ? », s’interroge la dessinatrice. Le duo part alors en reportage à travers toute la France, à la rencontre de militants qui montrent que d’autres modes de vie sont possibles, loin d’une société capitaliste et de l’hyperconsommation.
Le collectif 100 noms, qui résidait sur la ZAD de Notre-Dame-des-Landes, présente la lutte sociale comme une porte d’entrée possible vers le combat pour l’écologie. La Ferme légère, à Pau, prône l’autonomie énergétique et alimentaire. Face à l’angoisse de la « collapsologie », la BD Les Terrestres (éditions du Faubourg), sortie en 2020 puis rééditée en 2025, montre qu’une autre manière de faire société est possible et que les mobilisations citoyennes sont nécessaires pour changer les choses. Si la jeune dessinatrice s’apprête à baisser les bras, les initiatives individuelles qui fleurissent un peu partout sont porteuses d’une lueur d’espoir.
| Champs de bataille, d’Inès Léraud, Léandre Mandard et Pierre Van Hove
La géographie est politique. L’histoire du remembrement, retracée par la journaliste Inès Léraud et le chercheur Léandre Mandard dans la bande dessinée Champs de bataille, illustre la mécanique à l’œuvre. À la fin de la Seconde Guerre mondiale, la France cherche à augmenter sa production agricole. Les terres agricoles sont alors redessinées et les modes de production repensés. Mais les conséquences sont désastreuses. La France paysanne et ses petites parcelles sont remplacées par de grosses exploitations et de grandes surfaces cultivables. Les chevaux de trait, principal mode de culture utilisé par les paysans à l’époque, sont envoyés à l’abattoir pour faire place aux tracteurs.
L’histoire du remembrement, trop souvent occultée, raconte aussi l’évolution de notre rapport à la terre et ce que l’on est prêt à sacrifier pour une production agricole massive. Après son enquête sur les Algues vertes, la journaliste Inès Léraud signe un nouvel album d’utilité publique.
| Dans l’indifférence générale, de Roberto Grossi
Une bande dessinée pour ne plus détourner le regard. Face à l’augmentation des températures, la fonte des glaces et la montée des eaux, Roberto Grossi veut en finir avec la stratégie de l’autruche. Dans son album Dans l’indifférence générale (La Boîte à bulles), il analyse le discours des médias, où le mot « gâteau » est prononcé dix fois plus que « changement climatique ». Il dénonce aussi une croissance excessive imposée par les dirigeants, le prix à payer pour « l’épanouissement » de la vie humaine.
Alors qu’il se remémore des souvenirs de vacances en famille lorsqu’il avait 11 ans, à la découverte de la mer de Glace, glacier du Mont-Blanc depuis disparu, Roberto Grossi mesure les conséquences désastreuses du capitalisme sur la nature. Le dessinateur croise récit personnel et analyse politique rigoureuse, qui n’hésite pas à bousculer nos croyances et nos habitudes.