La fin d’année, c’est l’occasion pour les éditeurs de dégainer des éditions de prestige, des rééditions collector de monuments cultes ou au contraire de chefs-d’œuvre oubliés. Des livres à offrir, mais surtout de beaux objets à collectionner.
| La Chute de Gondolin, de J.R.R. Tolkien
C’est un morceau d’histoire que l’on tient dans les mains. Le résultat d’un « grand travail d’exhumation » entrepris depuis des années par Christopher Tolkien, troisième fils et exécuteur littéraire du pape de la fantasy britannique, créateur de génie à qui l’on doit toute la mythologie de la Terre du milieu, le grand J.R.R. Tolkien. Avant d’à son tour tirer sa révérence, Christopher Tolkien, décédé en 2020, a redonné vie de la plus belle des manières à La Chute de Gondolin, dernier des Trois Grands Contes du premier âge, écrit dans les tranchées en 1916.
Alors qu’il vient d’échapper de justesse aux Orques, Tuor, guidé par le dieu Ulmo, découvre un passage vers la cité elfique de Gondolin, prochaine cible désignée de Morgoth. Le dieu maléfique avance irrémédiablement avec son armée des ténèbres composée de Dragons et Balrogs. Face à lui se dressent certaines figures illustres, comme Glorfindel et même Legolas, héros du Seigneur des anneaux. Outre l’histoire principale, parfois labyrinthique, bourrée de termes et de références spécifiques, qui plaira surtout aux fans de la première heure, la magie de ce livre tient dans l’univers qu’il déploie. Pour la première fois, 20 ans avant le Hobbit et 40 ans avant Le Seigneur des anneaux, Tolkien pose les bases de sa Terre du Milieu. Une découverte émouvante, magnifiée par les illustrations exceptionnelles d’Alan Lee.
| Naufragés, histoires vraies, de Daniel Fiévet
C’est l’un des podcasts originaux les plus écoutés de la plateforme Radio France. En janvier 2023, Daniel Fiévet inaugure cette série de récits radiophoniques consacrés aux plus grands drames de l’histoire de la navigation et à celles et ceux qui sont parvenus à survivre coupés du monde, dans des conditions impossibles.
Des épisodes restés célèbres, comme la véritable histoire de Robinson Crusoé, celle du Radeau de la Méduse ou encore des révoltés du Bounty, mais aussi des tragédies moins connues comme le massacre du Batavia ou l’expédition suicidaire d’Ernest Shackleton dans les glaces de l’Antarctique. Ces récits haletants sont aujourd’hui transposés dans un livre sublime où le texte s’appuie sur des documents d’archives et une iconographie magnifique mêlant photographie et peinture. Un bel objet pour les amoureux de la mer, fascinés par les forces indomptables qui régissent les flots.
| Jaws, les dents de la mer, de Peter Benchley
On pourrait remplir des bibliothèques entières de romans dont l’existence même a été éclipsée par la destinée glorieuse de leur adaptation au cinéma. Qui se souvient d’Harry Grey, d’Armitage Trail ou de Michael Chrichton ? Pourtant, Il était une fois en Amérique, Scarface et Jurassic Park, ces histoires cultes dont ils sont originellement les auteurs, sont devenues des films inoubliables, entrés dans la légende. Grâce au travail des éditions Gallmeister, au moins une de ces injustices va enfin pouvoir être réparée. Pour célébrer en grande pompe les 50 ans de la publication originelle du roman et à quelques mois du cinquantième anniversaire de son adaptation au cinéma par le tout jeune Steven Spielberg, elles republient dans un coffret collector Les Dents de la mer de Peter Benchley.
Un corps mutilé s’échoue sur la côte près d’Amity, cité balnéaire paisible du Massachusetts. Sans aucun doute l’œuvre d’un requin. Si, pour beaucoup, il s’agit là d’un drame isolé, pour Martin Brody, chef de la police locale, l’affaire est sérieuse et la bête aux dents acérées va très vite réattaquer. Seul contre tous, il tente, d’abord en vain, d’alerter la population et de sauver des vies. Mais très vite, alors que les corps s’amoncèlent, le face-à-face devient inévitable. Aux côtés de Quint, un chasseur de requin misanthrope, et de Hooper, un jeune océanographe, il s’engage dans une traque sanglante, en pleine mer. Une réédition savoureuse du classique des classiques horrifiques, dont on entendrait presque jaillir la musique entêtante de John Williams. Un vrai plaisir de lecteur, pour ceux qui aiment jouer à se faire peur.
| Figures du fou du Moyen-Âge aux Romantiques
En collaboration avec le Musée du Louvre, qui accueille l’exposition du même nom jusqu’en février prochain, les éditions Gallimard nous offrent le beau-livre d’art indispensable de cette fin d’année. 350 œuvres exceptionnelles sont réunies dans cette somme qui prétend explorer toutes les facettes de la folie et de celui qui l’incarne, le fou, figure qui déchaîne les passions des créateurs de toutes les époques et de tous les horizons.
Du Moyen-Âge à la Renaissance et jusqu’à l’époque moderne, un parcours exceptionnel dans l’art de l’Europe du Nord. Une déambulation historique et esthétique passionnante où l’on croise des sculptures troublantes comme celle d’Aristote et Phyllis, mais surtout des grands tableaux de maîtres s’emparant de la thématique, comme La Nef des fous de Jérôme Bosch, Le Fou de peur de Gustave Courbet ou encore ce Portrait de fou regardant à travers ses doigts, une peinture flamande méconnue de 1537 qui s’affiche également en couverture.
| Je t’aime, de Dominique Marny
Les Saints-Pères, la maison la plus chic du plateau germanopratin, spécialisée dans les éditions rares de notes, d’illustrations d’écrivains et surtout de manuscrits des plus grands classiques de la littérature, publie cet hiver un trésor inestimable. Enfin si, estimable, pour la modique somme de 200 euros.
Mais l’investissement en vaut la peine tant cet ouvrage s’apparente à une pièce de collection. Dans Je t’aime, Dominique Marny, la petite-nièce de Jean Cocteau – qui lui avait d’ailleurs dédié un livre, Chambre avec vues, publié chez la même maison d’édition –, nous propose de « vagabonder dans une carte du tendre intemporelle ». Des citations, des extraits littéraires illustrés par des œuvres picturales méconnues pour célébrer l’amour sous toutes les coutures et, peut-être, conquérir le cœur de votre futur(e).
| Anatomie d’une chute, de Justine Triet et Arthur Harrari
Le film français événement de ces dernières années, récompensé de la Palme d’or à Cannes et de l’Oscar du meilleur scénario s’offre une nouvelle en vie en livre.
Gallimard vient en effet de publier dans un bel objet collector le scénario commenté par ses auteur·rice·s, Justine Triet et Arthur Harari, et illustré par David Lynch en personne, qui visiblement a bien aimé le film.
