Critique

L’Unreal Engine 5 propulse Gundam dans une nouvelle dimension

17 octobre 2024
Par Samuel Leveque
“Gundam : Requiem pour une vengeance”, le 17 octobre sur Netflix.
“Gundam : Requiem pour une vengeance”, le 17 octobre sur Netflix. ©Netflix, Sotsu, Sunrise

La franchise culte débarque sur Netflix avec Gundam : requiem pour une vengeance, un projet américano-japonais inédit. Grâce à l’Unreal Engine 5, l’animation 3D atteint de nouveaux sommets pour une immersion totale dans le conflit entre la Fédération et Zeon.

La licence Gundam reste assez méconnue chez nous, mais il s’agit, depuis 1979, de l’un des fleurons de la science-fiction à la japonaise. La franchise issue des studios Sunrise a eu une influence déterminante dans la diffusion de l’animation nippone, notamment en Asie et en Amérique du Nord.

N’hésitant pas à mêler drame politique, récits guerriers et humanisme poétique, les premières séries estampillées Gundam demeurent des œuvres cultes plus de 40 ans après leur diffusion, et font partie des licences les plus lucratives des industries culturelles mondiales.

Il n’est donc pas surprenant de voir débarquer en 2024 un très impressionnant projet américano-japonais, Gundam : requiem pour une vengeance, diffusé sur Netflix à compter du 17 octobre. Cette production en six épisodes choisit de placer son intrigue en parallèle du tout premier anime, tout en utilisant des moyens techniques encore jamais vus sur une série, avec l’utilisation du moteur Unreal Engine 5 d’Epic Games.

Un récit du point de vue de l’adversaire

Le show est coréalisé par l’artiste 3D Erasmus Brosdau et l’écrivain Gavin Hignight, deux immenses fans de pop culture japonaise. Le premier a travaillé sur le remake de Metal Gear Solid 3, et le second pour un dessin animé dans l’univers du jeu de combat Tekken. Ces fins connaisseurs de la licence ont donc écrit un scénario s’inscrivant parfaitement dans une saga qu’ils connaissent sur le bout des doigts : le conflit entre la Fédération (le gouvernement de la Terre) et le duché de Zeon, une organisation militaire d’inspiration fasciste luttant depuis l’espace contre cette dernière.

©Netflix

Ce qui frappe en premier lieu dans cette nouvelle série, c’est sa manière d’inverser la perspective habituelle des projets Gundam : si ces derniers ont toujours laissé énormément de place aux factions antagonistes et exploré en profondeur la psychologie des « méchants » de ses intrigues, elles ont rarement montré le quotidien du conflit du point de vue des soldats de Zeon.

C’est ici la perspective qui est choisie, en nous montrant le parcours d’une petite troupe de soldats désespérés par l’imminence de leur défaite et traqués par un RX-Gundam, un robot géant surpassant de très loin toutes leurs capacités de combat. On suit plus particulièrement le destin d’Iria Solari, une pilote de Zeon traumatisée par des événements liés au début du conflit et cherchant à sauver ce qui peut encore l’être au sein de son unité décimée.

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On pourra reprocher à Gundam : requiem pour une vengeance d’être à l’étroit dans son format de six épisodes et d’avoir un peu de peine à faire exister ses personnages et les enjeux de la guerre, faute de temps pour les développer. Mais force est de constater que le show a néanmoins un parti pris extrêmement efficace. En effet, il mise à peu près tout sur des scènes d’action à couper le souffle, une suite d’affrontements absolument sans relâche, et une exécution technique atteignant des niveaux rarement vus pour de l’animation 3D à ce jour.

Une prouesse technique qui augure du meilleur

Le très puissant moteur graphique Unreal Engine 5, dévoilé en 2020, n’est devenu accessible à la plupart des développeurs que courant 2022. Initialement pensé pour le jeu vidéo (Hellblade II, Lords of the Fallen…), il a très rapidement impressionné par sa capacité à rendre les effets de particules avec un réalisme stupéfiant et à gérer à merveille les effets lumineux, les ombres et les éclairages. Avec cet outil, de nouvelles possibilités s’ouvrent en termes de rendus de textures, de déformations de surfaces, d’explosions ou simplement de modélisations hyperréalistes de personnages.

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C’est clairement dans cette optique qu’a été conçue cette première série intégralement réalisée à l’aide de ce moteur. Il avait déjà été utilisé pour des courts-métrages ou sur des séquences précises dans certains shows à gros budget (Le Cabinet de curiosités de Guillermo del Toro, The Mandalorian…), mais jamais encore pour l’intégralité d’un programme. Davantage qu’un grand film de guerre, Gundam : requiem pour une vengeance est surtout une immense démo technique pour les possibilités ouvertes par ce moteur. Et quelle démo !

Tout au long des six épisodes, on reste absolument scotché à notre fauteuil à la moindre séquence de combat, atteignant un dynamisme et une fluidité jamais vus dans de l’animation 3D. Loin de se concentrer sur les seuls duels entre robots géants, marque de fabrique de l’univers Gundam, cette nouvelle proposition se concentre sur l’ensemble d’un arsenal militaire en action.

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Un catalogue allant du simple fantassin aux avions, en passant par les tanks, objets balistiques et autres camions logistiques. En changeant régulièrement d’échelle, la série montre aussi les prouesses que le moteur peut produire avec différentes perspectives : reproduire avec une fidélité des mouvements de troupes sur plusieurs dizaines de kilomètres, comme s’attarder sur l’assaut d’un seul peloton de quelques hommes que l’on suit « caméra à l’épaule ».

Les séquences mettant en scène des bombardements, des incendies et des explosions poussent le réalisme dans ses derniers retranchements, tout en laissant place à des moments plus calmes ou plus silencieux. Ces derniers permettent également d’admirer la capacité des artistes travaillant sous Unreal Engine 5 à reproduire à la perfection des décors extrêmement variés.

©Netflix

La production, qui se déroule dans une version futuriste de l’arrière-pays roumain, alterne ainsi les paysages de ruines industriels, de décors médiévaux, de bases militaires et de forêt brumeuses, tous rendus avec un niveau de fidélité bluffant. Dans l’ensemble, cet aspect technique est une incroyable démonstration de force, qui fait de Gundam : requiem pour une vengeance une des séries indispensables de l’automne si vous êtes un tant soit peu fan des évolutions dans le monde de l’animation.

Quelques points restent néanmoins perfectibles : les mouvements des personnages humains ne semblent pas toujours très naturels et certaines séquences sont encore légèrement rigides. Mais, pour un premier essai, c’est un coup de maître qui prouve que l’Unreal Engine 5 sera sans doute capable de permettre à des réalisateurs de perfectionner son utilisation pour livrer certaines des séquences les plus ébouriffantes de la décennie en matière d’animation 3D.

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