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Rentrée littéraire étrangère : les papys font de la résistance

04 septembre 2024
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James Ellroy.
James Ellroy. ©Joël Saget pour l’AFP

Dans la cohue d’une rentrée littéraire foisonnante, L’Éclaireur s’écarte un instant de la France et des nouveaux talents pour se délecter de la plume de trois auteurs américains bien en place, dont les années n’ont pas émoussé la virtuosité.

Dénicher les talents de demain, assister à l’éclosion de jeunes écrivain·e·s, être à la fois témoin et acteur d’une nouvelle ère en train de s’ouvrir : voilà un des plaisirs avoués du métier de journaliste littéraire. Alors, chaque rentrée littéraire, on scrute d’un œil attentif les noms encore inconnus, les profils qui détonnent, les plumes qui incarnent un changement et viennent bouleverser les codes établis. Mais on observe aussi attentivement comme la vieille garde réagit. Comme si on assistait à une nouvelle confrontation des Anciens et des Modernes.

James Ellroy, Richard Ford, Michael Cunningham : trois noms auréolés de gloire littéraire qui convoquent avec eux des œuvres cultes, des univers envoûtants, des personnages inoubliables. Des géants éternels qui, livre après livre, marquent un peu plus la littérature de leur empreinte. Hommage critique à trois romanciers qui n’ont que faire du temps qui passe et qui jouent des coudes avec la nouvelle génération.

| L’American dog James Ellroy au sommet de sa forme

Cinq ans après La Tempête qui vient, James Ellroy, auteur acclamé, dont les romans cultes ont été de nombreuses fois adaptés (Le Dahlia noir ou L.A Confidential, notamment) réenclenche son deuxième quatuor de Los Angeles, un cycle romanesque qui nous confronte aux esprits les plus diaboliques de La Cité des anges. Les Enchanteurs est un condensé furieux et détraqué de tout ce qui fait le sel de cette littérature noire hors norme, aussi bien par sa langue touffue et argotique que par sa construction narrative labyrinthique.

©Joël Saget/AFP

Le nouveau protagoniste de James Ellroy est un modèle d’anti-héros comme il sait si bien les trousser. On s’attache immédiatement à Freddy Otash et, pourtant, on a affaire à une sacrée ordure. Ex-flic corrompu, détective privé aux méthodes plus que contestables, spécialiste des filatures et des écoutes illégales, indic et même rédacteur des pires bobards pour la presse à scandale, camé notoire… Il aligne toute la panoplie de l’enfoiré magistral.

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Ce qui en fait le prestataire idéal pour les frères Kennedy, Bob et John Fitzgerald, le Président des États-Unis himself, qui ont besoin d’un homme de l’ombre pour désamorcer une bombe nommée Marilyn Monroe. Elle et JFK ont eu une liaison secrète, une liaison chaotique qui s’est mal finie. Et l’actrice, torturée, en roue libre, risque bien de faire éclater la vérité. Alors, il faut réécrire l’histoire, trouver des moyens de dénigrer l’actrice, de la faire passer pour plus folle qu’elle n’est. Un boulot parfait pour un salaud de la trempe de Freddy Otash.

Une nouvelle merveille de roman noir, délicieusement surannée. Cruel, sulfureux, drôle, le cocktail est hautement inflammable. Et si l’histoire qui nous était contée contenait sa part de vérité ?

| Michael Cunningham, à la bonne heure

Il aura fallu dix ans d’une attente interminable pour retrouver Michael Cunningham en librairie. Le romancier américain, auteur de l’envoûtant Les Heures, prix Pulitzer de la fiction 1998, adapté au cinéma par Stephen Daldry en 2003, a pris son temps pour façonner son nouveau roman et on ne peut que l’en remercier. Un jour d’avril est un brillant exercice de funambule mariant avec subtilité et émotion, puissance de la langue et construction millimétrée du récit.

Michael Cunningham.©Lev Radin/Shutterstock

Dans un appartement de Brooklyn qui prend l’eau, comme le symbole de la lente érosion du rêve américain, se regroupe une famille au bord de la crise de nerfs. Le père, Dan est un ancien sex-symbol devenu un loser bedonnant qui se rêve en rocker alors qu’il n’a aucun talent. Sa femme, Isabel, se débat dans une presse écrite new-yorkaise aux abois et subit les caprices de certaines divas. Plus rien ne rapproche ces deux êtres et leurs deux enfants, Nathan, 10 ans et sa sœur Violet, 5 ans, essaient de fermer les yeux sur le fossé qui se creuse. Pour ne rien arranger, Robbie, le frère gay d’Isabel a élu domicile dans le grenier et la solution temporaire semble partie pour durer.

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Pour raconter le délitement et l’implosion de ce foyer dysfonctionnel sur fond de confinement dû à la pandémie, Michael Cunningham découpe son récit en trois parties, trois jours d’avril en 2019, 2020 et 2021. Avec une douceur contagieuse, mais aussi quelques fulgurances acerbes, l’auteur interroge les nouvelles formes de relation entre les êtres, il questionne l’amour et l’amitié, la fratrie et le mariage. En ces temps troublés, il met en scène un touchant petit théâtre de l’humanité.

| Richard Ford, road trip mélancolique et féroce

Il y aurait un roman à écrire sur le lien qui unit certains romanciers avec leurs personnages récurrents. Des doubles de papiers qui les suivent comme une ombre et symbolisent les affres de leur existence. Frank Bascombe accompagne Richard Ford de livre en livre depuis plus de 30 ans.

©Philippe Matsas/Leemage/Éditions de L'Olivier

Alors que s’ouvre Le Paradis des fous, nouveau roman de l’auteur américain, il vient d’avoir 74 ans. Pour corriger les erreurs du passé avant qu’il ne soit trop tard et enfin assumer son rôle de père, il décide d’embarquer son fils Paul, 47 ans, atteint de la maladie de Charcot et auquel il ne reste plus que quelques mois à vivre, dans une virée pas comme les autres à travers les monuments les plus loufoques et les plus kitsch de l’Amérique.

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En arpentant le palais du Maïs, un musée unique au monde, dans un hôtel-casino indien ou face au fameux mont Rushmore, représentant les « dead presidents », les deux êtres réapprennent à vivre côte à côte et font de leur mieux pour réussir leurs adieux. Une quête intime au plus profond d’une relation père-fils, un voyage truculent au cœur des illusions du rêve américain. Du grand Richard Ford.

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