Avant une tournée hexagonale en 2024, Viktor Vincent présente son spectacle, Fantastik, à Paris. À l’occasion de ce nouveau seul-en-scène, L’Éclaireur a rencontré le mentaliste le plus connu de France pour une interview un petit peu spéciale.
Depuis le 6 octobre 2023, Viktor Vincent présente son spectacle Fantastik au Théâtre de la tour Eiffel, à Paris. Pendant plus d’une heure, les spectateurs sont transportés dans l’atmosphère feutrée et intime du XIXe siècle afin de vivre une expérience unique.
Tout commence par le récit d’un homme qui se réveille seul dans un train, au milieu de la nuit. Dans la vitre, il aperçoit son reflet, mais ce visage n’est pas le sien. Cette mystérieuse vision va permettre à Viktor Vincent de passer de l’autre côté du miroir et d’offrir une véritable séance de mentalisme au public, entre histoires incroyables et démonstrations hallucinantes.
Dans Fantastik, l’artiste joue constamment avec l’imagination de son audience. En proposant des expériences immersives, il sonde au fur et à mesure le public, plonge dans ses pensées et son passé au moyen de l’illusion. Avec ce nouveau spectacle, Viktor Vincent offre une soirée placée sous le signe du mystère, qui engage réellement le spectateur afin de le faire voyager dans un nouveau monde.
L’Éclaireur a voulu tenter l’expérience, pour transcender la réalité et comprendre davantage l’art du mentalisme. Nous avons donc envoyé notre journaliste Lisa Muratore confronter Viktor Vincent pour une séance sur mesure. Sans divulguer tous ses secrets, l’artiste a tenté de décoder son comportement, de cerner sa personnalité ou encore de lire ses pensées. Une expérience aussi amusante que déroutante. Verdict.
Avant que vous ne commenciez à me “sonder”, comment parvenez-vous à cerner les gens autour de vous ?
Je pense que cela vient d’une forme d’empathie que j’ai. Je suis finalement comme une sorte d’éponge, on peut le dire ainsi. Je ressens des émotions très fortes, notamment durant le spectacle lorsque je convoque le passé des gens, le souvenir d’un moment ou d’une personne qui a compté.
Je me sers aussi beaucoup du regard. Je regarde beaucoup les gens, je scrute leur visage. Je ne joue d’ailleurs jamais dans le noir total. J’ai besoin de vous voir, de voir les réactions, les attentes aussi.
Justement, qu’avez-vous pensé de moi dès notre rencontre ? Que parvenez-vous à ressentir dans mon comportement ?
Je ressens beaucoup de choses chez vous, depuis le moment où l’on s’est serré la main. Après, je ne sais pas si j’ai raison… Je me disais en vous écoutant que j’aimerais que ma fille soit comme vous, plus tard. Tout à l’heure, je voulais vous demander votre âge, mais je me suis dit que ça ne se demandait pas. C’est pour savoir où vous en êtes dans la vie aujourd’hui.
N’hésitez pas à me poser des questions à votre tour !
Je vois en vous une sérénité absolue, d’une précision folle et d’un vif intérêt. J’ai le sentiment que vous aimez ce que vous faites et que vous avez une grande ouverture d’esprit.
C’est un très beau compliment ! Je prends cela comme une bonne réponse [rires].
Après, je donne beaucoup d’interviews et je rencontre beaucoup de journalistes. Je pense que toutes ces qualités définissent aussi votre métier, mais avec vous il y a quelque chose de différent. Vous semblez à votre place aujourd’hui.
Vous avez vu juste ! J’ai arrêté mes études de droit pour me lancer dans le journalisme, après un master en droit international. J’ai fait cinq ans d’études pour ensuite me lancer dans cette voie. C’est ce que j’ai toujours voulu faire, depuis que je suis toute petite ; je veux écrire. Comment êtes-vous parvenu à cette déduction ?
Je crois en la théorie du miroir et vous me rappelez quelqu’un que je connais bien. Vous ne vous ressemblez pas du tout physiquement, mais vous avez des points communs qui sont différents du critère physique. Si vous vous ressemblez, ce n’est pas pour rien. C’est peut-être parce que vous avez vécu les mêmes choses au même moment, que vous êtes intéressés peut-être par les mêmes choses, ou que vous venez du même environnement.
J’ai presque l’impression de vous connaître, alors que je ne vous connais pas. Ceci dit, on ne peut pas résumer une personne à une impression ou au fait qu’elle ressemble à quelqu’un d’autre. Je dois aussi ajouter que vous ne me paraissez pas dangereuse.
Je ne pense pas l’être et j’espère ne pas dégager cela !
Du coup, j’ai envie de vous raconter ma vie maintenant [rires] ! Je pense que c’est important pour votre métier.
Êtes-vous dans l’analyse constante des gens autour de vous ?
Je ne mets aucun mot sur ce que je ressens par rapport aux rencontres que je fais, ou bien vis-à-vis de la nôtre. Vous aussi, vous ressentez des choses envers moi, car vous faites votre métier, qui est de poser des questions pour cerner la personne en face de vous. Nous avons tous des ressentis envers tout le monde, mais, à la différence des autres, nous nous devons d’utiliser ces sentiments pour écrire un article ou créer un spectacle. Nous ne sommes pas si différents, finalement.
J’avoue que je ne m’amuse pas à cerner tout le monde autour de moi. Parfois, on me demande même si on peut me mentir. Bien sûr ! Évidemment ! Heureusement ! S’il n’y avait pas le mensonge, on serait en train de se taper dessus. Je vais vous proposer un test : prenez ce dé, agitez-le dans ce gobelet et ne me dites pas quel chiffre vous voyez. Puis, vous allez compter d’un à six en me regardant dans les yeux.
Un, deux, trois, quatre, cinq…
Là ! C’était là et au moment où j’ai dit “là”, vous avez prononcé dans votre tête le chiffre 6.
C’est bien ça, comment avez-vous su ? Est-ce que c’est le fait que je cligne des yeux qui me trahit ?
Non, pas votre clignement, mais vous me regardez quand vous prononcez le bon chiffre… Recommencez !
Un, deux, trois…
C’est le trois ! L’avantage, avec le dé, c’est que c’est du pur hasard. Après, sans vous révéler tous mes secrets, je dirais juste qu’il faut regarder au bon endroit. Je donne toujours cette explication. Quand on sait où regarder, les choses sont plus faciles. Je peux vous dire une dernière chose, ce n’est jamais là où on croit. Mon travail, c’est de faire croire que c’est ici alors que c’est ailleurs. C’est l’art de la diversion.
Le magicien va vous dire de regarder quelque part alors que ça se passe ailleurs, moi je vais vous dire de penser à ça, alors que c’est autre chose. Ce que j’essaie de faire dans mes expériences, c’est une progression. Je laisse un doute dans l’esprit de quelqu’un. Il va en déduire un comportement pour déjouer mes attentes et entrer dans un labyrinthe dont il connaît la sortie. Mais, à la fin, il va avoir un mur devant lui et se rendre compte qu’il ne peut plus sortir. C’est alors que le secret devient insondable.
En connaissant toutes les techniques de mentalisme et d’après les exercices que nous venons de faire, pensez-vous que je sois prévisible ?
Je ne sais pas si vous l’êtes, mais de manière plus générale, les gens sont prévisibles. On sait que dans la masse, on l’est tous, moi y compris. Quand quelque chose se passe, on va avoir l’émotion facile. Nous sommes prévisibles et manipulables, et c’est bien ! J’ai envie de l’être parfois.
Est-ce que la liberté, c’est de ne pas être manipulé ? Peut-être… La liberté demande beaucoup d’efforts et de travail, en tout cas. Je n’ai pas envie d’être libre constamment. J’ai envie qu’on prenne des décisions pour moi. C’est difficile de prendre des décisions, et on n’a pas toujours envie de le faire.
Suis-je, selon vous, quelqu’un de très porté sur les énergies ou bien est-ce que je préfère adopter un comportement plus rationnel dans ma vie quotidienne ?
Je pense que vous n’êtes pas vraiment sensible à cette “force”, “aura”, “empathie”, mais c’est ce que j’aime chez vous. Vous êtes plus rationnelle que sentimentale dans la vie de tous les jours.
C’est vrai ! Je dois avouer en revanche que c’est un peu frustrant d’être trop rationnelle. Je trouve les gens doués d’une certaine sensibilité fascinants. Ce n’est sûrement pas la même approche de la vie !
Peut-être, et c’est intéressant ce que vous dites, car c’est très difficile de se séparer de l’histoire familiale. Il y a une histoire d’ancêtre qui doit trainer en vous pour que ça attise une curiosité chez vous. Moi, j’aime les femmes froides, et c’est peut-être ce que j’aime chez vous. Pour exemple, le personnage de Claire Underwood dans la série House of Cards me fascine.
Elle est dangereuse et doit être froide pour s’en sortir dans ce milieu d’hommes. Sauf que cela crée une barrière, car les femmes “doivent” aussi être chaleureuses. Vous, vous arrivez à être ce parfait mélange entre froideur et générosité. Vous n’êtes pas dangereuse.
Pensez-vous que j’ai des enfants ?
Non, je ne pense pas que vous soyez mère aujourd’hui. Après, je vous imagine dans la démarche d’en avoir un jour.
Tout à fait. Que pouvez-vous me dire sur ma situation amoureuse ? Suis-je célibataire, en couple ? Peut-être mariée ?
Vous n’êtes pas mariée, en revanche vous êtes en couple, il y a quelqu’un dans votre vie. Vous vivez depuis longtemps ensemble sous le même toit.
Oui, cela fait 11 ans que je suis en couple avec cette même personne et on vit depuis quatre ans ensemble !
Je dirais même que vous avez un animal de compagnie, peut-être un chat ? En tout cas, je vois quelqu’un ou quelque chose à poil long.
Je n’ai pas d’animal de compagnie… Mon compagnon est assez poilu, remarquez [rires] ! Est-ce que je viens de Paris ?
Une technique simple qui vous vend tout de suite : si vous posez la question, c’est que vous ne venez pas de Paris.
Mince, je me suis vendue ! Effectivement, je ne viens pas de Paris, mais du sud de la France.
Il y a une autre question sous-jacente qui me vient c’est : est-ce que vous faites provinciale ? Et là, je dirais pas du tout !
Est-ce que j’ai des frères et sœurs ?
Je dirais que vous avez un grand frère.
Manqué ! J’ai une petite sœur.
C’est marrant parce que je vous vois comme une personne assez forte. J’ai la sensation que vous avez grandi sous la protection d’un homme fort, comme un grand frère. Du coup, cela signifie que vous vous entendez bien avec vos parents, non ?
Oui, tout à fait !
Je vous imagine avec un grand frère dont vous seriez très proche. Peut-être s’agit-il de votre père, ou bien d’amis à vous avec lesquels vous avez grandi. Votre sœur est-elle beaucoup plus petite que vous ?
Non, elle a 25 ans, nous n’avons que deux ans et demi d’écart.
Ah c’est bien ça alors, vous avez 28 ans ! C’est ce que je vous donnais quand on s’est rencontrés tout à l’heure ! Vous voyez, j’ai fini par deviner votre âge précis…
Fantastik, de Viktor Vincent, au Théâtre de la tour Eiffel jusqu’au 7 janvier 2024 et en tournée dans toute la France à partir du 13 janvier 2024.