À l’ombre des grandes séries de l’été, Netflix dégaine une nouvelle comédie romantique coréenne, qui se révèle originale et ambitieuse.
Ban Ji-eum est une jeune fille atteinte d’un étrange symptôme : quand elle meurt, elle se réincarne en conservant le souvenir vivace de ses vies antérieures, qui lui reviennent dès qu’elle devient adolescente. Après sa (soudaine et traumatisante) dix-huitième mort, Ban Ji-eum n’a plus qu’un espoir : faire en sorte que tout cela s’arrête. Sauf que, magie de la fiction oblige, son chemin va croiser la route du beau Moon Seo-ha, son amour d’enfance venu de son incarnation précédente.
Elle est incapable de faire réaliser à son crush qu’ils se connaissent déjà, et il est traumatisé par la perte de son amour de jeunesse sans pour autant réaliser qu’il l’a sous les yeux. Ce synopsis, c’est la recette de cette comédie romantique, une série sur le thème du deuil et des retrouvailles. Une fois de plus, Netflix assure la distribution internationale de l’adaptation d’un webtoon très populaire, édité en France depuis l’année dernière.
J’irai te voir dans ma prochaine vie (See tou in my 19th life en VO) ne révolutionne pas le genre en profondeur, mais il est porté par un duo d’acteurs sonnant particulièrement juste et une héroïne entreprenante, moderne et drôle (campée par Shin Hye-sun, une comédienne au CV impressionnant), à laquelle il est difficile de ne pas rapidement s’attacher.
Le manhwa publié en ligne arrivait de manière assez habile à ne pas se prendre les pieds dans un ton mélodramatique, ni dans une dimension fantastique trop farfelue qui ferait perdre le fil de l’intrigue. La réalisatrice de la série se permet des écarts avec le matériau d’origine, quelques fulgurances et des plans magnifiques mettant en scène les différentes réincarnations de Ban Ji-eum, dont les vies s’étalent sur près d’un millier d’années d’histoire coréenne.
Une série intense, mais pas sinistre
Le ton plutôt léger de ce récit est à mettre en contraste avec un ton plus mûr, parfois plus sombre que beaucoup de comédies romantiques du même genre. J’irai te voir dans ma prochaine vie est avant tout le destin croisé de deux personnes traumatisées peinant à trouver la sérénité, faute de pouvoir trouver de l’aide pour résoudre leurs traumatismes.
La série n’échappe pas à certains clichés récurrents (il est forcément riche, elle est forcément un improbable canon de beauté), mais cette dimension psychologique plus travaillée donne un ton assez mélancolique à l’ensemble, qui pourra plaire bien au-delà de la clientèle habituelle des dramas coréens distribués massivement par Netflix.
À l’image de séries comme Kingdom (dans le registre de l’horreur), The Silent Sea (dans celui de la SF), ou d’Au-delà du mal (qui lorgnait plutôt vers le polar sociétal), J’irai te voir dans ma prochaine vie fait partie de ces œuvres qui cherchent à dépasser légèrement leur cadre pour toucher à différents registres, quitte à moins insister sur le cahier des charges attendu d’une comédie romantique coréenne classique.
Bien plus qu’un plaisir coupable
L’être aimé n’a jamais compris pourquoi vous passiez autant de temps devant des rom-com asiatiques, un domaine dont il ou elle n’a pas forcément tous les codes esthétiques en tête ? Voici probablement une des meilleures propositions de 2023 pour vous réconcilier devant une série qui sort des clous.
On n’avait aucun doute sur le fait que la série serait techniquement assez qualitative : la curation de Netflix en matière de dramas est de ce point de vue généralement assez solide. Le travail de la réalisatrice, Lee Na-jeong, est globalement assez exemplaire. Pas étonnant, c’est une grande habituée des comédies romantiques à twists, qu’elle enchaîne depuis une dizaine d’années (Oh my Venus, Love Alarm…).
Mais il serait dommage de se ranger derrière de simples arguments techniques (« C’est une comédie romantique, certes, mais c’est bien réalisé et c’est joli, promis ») qui viendraient souligner que le genre du drama romantique serait semi-honteux. Les séries comme J’irai te voir dans ma prochaine vie sont au contraire souvent de magnifiques fenêtres sur les problématiques de la société coréennes et des feuilletons de grande qualité.
Certes, on y cherche des romances tourmentées et impossibles entre de jeunes et beaux personnages, mais on vient également s’y confronter aux questions du deuil, de la solitude et de l’incommunicabilité dans une société rude et compétitive.
Le ticket d’entrée est parfois un peu élevé quand on n’a pas grandi avec la culture des séries télévisées asiatiques, ou que l’on n’a pas cherché à voir plus loin que la (superbe) Squid Game. La manière de jouer ou de réaliser, les thématiques, les rapports sociaux, le rythme, la durée des épisodes… La culture Hallyu peut avoir un côté déroutant. Mais ça tombe bien, nous vous avions déjà préparé un petit guide des indispensables en la matière il y a quelque temps, histoire de rattraper votre retard. Vous l’avez compris : vous n’avez plus d’excuses pour ne pas tenter J’irai te voir dans ma prochaine vie et commencer votre été par une chouette petite comédie romantique.
