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Quand la pop culture dévoile la face sombre du Japon

09 août 2022
Par Laurent Frey
“The Journalist”
“The Journalist” ©Netflix

Le Japon n’est pas qu’un pays tout rose où tout est parfait. Comme partout dans le monde, la société japonaise comporte de nombreux vices, qu’on vous propose de découvrir à travers trois œuvres de la pop culture.

Homophobie, individualisme, racisme, et bien d’autres vices gangrènent le Japon. Vu de l’extérieur, le pays fascine par sa propreté, son accueil ou encore le respect de ses habitants. Parfois, il faut pourtant savoir regarder au-delà de la façade. C’est ce que proposent de faire les trois œuvres que nous vous faisons découvrir aujourd’hui.

1 La Virginité passé 30 ans, de Toshifumi Sakurai et Atsuhiko Nakamura

Une des préoccupations majeures de la société japonaise, c’est son taux de virginité à l’âge adulte. On estime qu’un quart des hommes entre 30 et 50 ans n’ont jamais connu d’expérience sexuelle, soit quatre millions de personnes. Les auteurs de ce manga unique en son genre se sont intéressés à ces hommes et en ont fait un livre documentaire. Au-delà de l’aspect moqueur du titre, c’est une lecture véritablement passionnante. Les hommes croqués dans ce manga existent tous et ils racontent leur quotidien, les raisons de leur virginité, mais, surtout, leurs souffrances.

©Akata

Sans aucun jugement de la part des auteurs, le fonctionnement de la société est vivement critiqué, car c’est elle qui individualise les Japonais et les empêche de trouver quelqu’un. Malgré sa thématique, c’est un ouvrage qui contient une grande humanité et une tendresse étonnantes. Chaque chapitre fait le portrait d’un « puceau tardif », qui raconte son histoire, mise en images par Toshifumi Sakurai.

2 The Journalist, d’Isoko Mochizuki

Dans cette minisérie disponible sur Netflix, on découvre le parcours d’Anna Matsuda, une journaliste chevronnée qui lutte pour dévoiler des vérités sur les méthodes du pouvoir en place. Entre corruption, falsification de documents compromettants et système politique globalement pourri jusqu’à moelle, la série veut montrer que le journalisme est le seul contre-pouvoir qui existe au Japon pour lutter contre un gouvernement qui œuvre pour son propre bien plutôt que pour celui des citoyens. C’est aussi une grande œuvre sur la liberté de la presse, fortement menacée au Japon.

©Netflix

Les journalistes sont muselés, menacés, empêchés, pour que les concernés puissent agir en toute impunité. Cette histoire, bien que fictive, s’inspire en grande partie d’un contexte réel depuis des années au Japon. La corruption des dirigeants est historique dans ce pays, et la série est sortie un an après un scandale qui a touché l’ex-Premier ministre japonais, Shinzo Abe (récemment assassiné). Accusé de corruption, il avait été poussé à la démission après avoir tenu sa place pendant neuf ans.

3 Platinum end, de Tsugumi Ōba et Takeshi Obata

Cette fois, pas d’œuvre sociale ou inspirée d’histoires vraies. Ce manga est un shonen fantastique dans lequel 13 candidats sont choisis par 13 anges pour prendre la place de Dieu. Ce qui est intéressant, c’est la manière dont ils sont choisis. Ils le sont car ils n’ont aucun attachement à leur vie. Ils le sont pendant leur tentative de suicide. Comme par hasard, tous ces candidats sont Japonais. On touche là à l’un des problèmes fondamentaux de la société japonaise : son taux de suicide est l’un des plus importants au monde. Certes, cette tendance est à la baisse ces dernières années, mais elle reste toujours importante.

©Shueisha

Au cours son histoire, le Japon a toujours eu un lien particulier avec le suicide. C’est un moyen d’éviter le déshonneur, un signe de protestation, mais surtout le symbole d’un mal qui ronge la société. On le voit dans le manga, les raisons qui poussent ces hommes et ces femmes au suicide montrent que quelque chose ne va pas : échec scolaire, harcèlement, perte de foi en l’espèce humaine. Quand les raisons du suicide d’un Japonais sont révélées, il s’agit souvent de ces mêmes justifications. La réussite étant très importante dans cette société, un étudiant qui échoue à l’entrée à l’université peut se voir mis au ban de sa famille.

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