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Les tentatives de désinformation électorale ont eu des effets limités en France

29 juin 2022
Par Kesso Diallo
Les tentatives de désinformation n'ont pas eu les effets attendus.
Les tentatives de désinformation n'ont pas eu les effets attendus. ©Bits And Splits / Shutterstock

Selon une étude, des acteurs ont tenté d’influencer les élections présidentielle et législatives à travers de nombreux contenus, sans réel succès.

Des démarches qui ont été infructueuses. Une étude publiée ce 28 juin a révélé que les tentatives de désinformation et de manipulation en ligne lors de la période électorale ont été nombreuses. Cherchant à remettre en cause la sincérité du scrutin, en questionnant la validité des sondages ou encore par le biais de stratégies de mobilisation en ligne, elles ont cependant eu des effets limités.

D’après ses auteurs, quatre raisons expliquent la résilience de l’écosystème informationnel français lors des élections présidentielle et législatives de 2022. Pour commencer, la guerre en Ukraine et la suppression des médias russes Sputnik et Russia Today des grandes plateformes au sein de l’Union européenne (UE) ont affaibli les capacités d’influence de la Russie, qui est l’un des principaux acteurs des ingérences étrangères en Occident.

Une circulation de la désinformation limitée

La mobilisation des pouvoirs publics sur les questions de désinformation a également participé à cette résistance. Le gouvernement s’était préparé à ces ingérences numériques étrangères avec la mise en place de l’agence Viginum quelques mois avant l’élection présidentielle. Opérationnelle depuis octobre dernier, elle est chargée de lutter contre les manipulations de l’information. De plus, durant cette période électorale, la législation sur les services numériques (DSA), qui encadre la responsabilité des réseaux sociaux concernant les contenus illégaux et problématiques, a été adoptée. « Cela en a fait un terrain sensible pour les grandes plateformes soumises au futur texte », indique le rapport.

Plusieurs d’entre elles ont d’ailleurs pris des mesures pour lutter contre la désinformation électorale. Avec l’Agence France-Presse (AFP), Google a par exemple lancé le programme « Objectif Désinfox » destiné aux rédactions. Meta a collaboré avec différents médias afin d’aider les Français à décrypter les informations en ligne et a créé un centre de veille interne pour stopper les abus sur ses plateformes. De son côté, Twitter a, entre autres, apposé des labels sur certains comptes gouvernementaux ou médias associés à un État et a supprimé les contenus comportant de fausses informations.

L’absence de vote à distance, la présence de nombreux bureaux de vote sur le territoire français et le contrôle des publicités politiques au cours de la campagne ont, en outre « contribué à rendre plus difficile le succès des narratifs remettant en cause la légitimité de l’élection ». Enfin, l’influence des médias traditionnels, comme Le Monde, Le Figaro ou Les Echos, sur l’agenda médiatique ainsi que les réseaux de vérification mis en place par plusieurs médias ont permis de limiter la circulation de la désinformation à grande échelle.

Des contenus et des comportements inquiétants

Les chercheurs s’inquiètent cependant des discours remettant en cause la validité des sondages et le comptage des voix ou de ceux contestant la légitimité de la réélection d’Emmanuel Macron. Ils mentionnent notamment des théories provenant des États-Unis telles qu’un prétendu accord secret passé avec la société Dominion afin de compter les voix en France et de truquer les résultats en faveur du candidat sortant. Lors des élections américaines de 2020, cette entreprise a été accusée par Donald Trump et ses soutiens d’avoir facilité des fraudes. Les auteurs de l’étude ont aussi constaté un « comportement inauthentique coordonné » par rapport à la campagne présidentielle d’Éric Zemmour, afin d’amplifier de faux sondages de manière artificielle sur les réseaux sociaux. L’entourage du candidat a en effet partagé une étude de l’entreprise d’intelligence artificielle Qotmii sur le « potentiel électoral » des candidats, le donnant vainqueur au premier tour face à Emmanuel Macron.  « L’étude avait été présentée de manière trompeuse par Reconquête comme un sondage traditionnel, alors qu’elle se basait sur la prégnance des candidats dans les discussions sur les réseaux sociaux », explique le rapport.

À la suite de cette période électorale, les auteurs proposent des recommandations pour protéger les futures élections des potentielles manipulations susceptibles de remettre en cause l’intégrité du scrutin. Ils préconisent d’approfondir la régulation des grandes plateformes (transparence, audit des algorithmes de recommandation…), mais aussi d’améliorer les capacités de recherche dans les groupes de messagerie privés, comme Telegram, et de continuer à demander plus d’accès aux données.

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