Accusant d’un retard certain sur le segment de l’Hybride, le spécialiste nippon a voulu rattraper son retard avec un EOS R largement perfectible. Canon revient sur le devant de la scène avec un appareil nettement plus affûté, destiné aux professionnels, le Canon EOS R5. Voici notre verdict.
Au côté de son petit frère EOS R6, ce boitier Hybride Canon se place au cœur du segment des appareils plein-format. Plus ambitieux, ce R5 affiche une fiche technique impressionnante, tant pour les reporters que pour les photographes de studio.
Prise en main : petit Reflex ou gros Hybride ?
Les Hybrides ont longtemps été plébiscités pour leur compacité et leur poids contenu. C’est moins vrai aujourd’hui puisque les appareils ont musclé leur jeu mais à gamme équivalente, l’EOS R5 se montre bien plus léger et compact qu’un Canon 5D Mark IV par exemple. Il n’empêche que Canon a tout de même bien pensé son ergonomie, notamment au niveau de la poignée.
Plus massive et creusée que chez de nombreux concurrents, la poignée assure un bon maintien. L’appareil tient parfaitement dans la main, ce qui facilite d’autant plus les manipulations avec un lourd téléobjectif. Il est ainsi possible de se balader, Hybride tenu à une seule main, et de dégainer rapidement sans souffrir de crampes. Les grandes mains n’auront par ailleurs aucun mal à positionner leurs doigts sur l’appareil, la prise est très agréable et instinctive. On sent d’emblée que cet appareil Canon pourra faire des merveilles aussi bien en intérieur qu’en extérieur, ce qui ravira les photographes animaliers par exemple.
L’appareil est très bien fini et le nippon annonce même une tropicalisation. Bien que Canon emploie toujours la même recette conférant à ses appareils un aspect un peu « plastique » peu flatteur, on sent toutefois que l’appareil est rigoureusement construit.
Les boutons et molettes de réglages sont nombreux. On trouve ainsi sur la face arrière, une molette cerclant le pavé directionnel et un joystick. Sur le dessus de l’appareil se trouvent 3 molettes de réglages. Cela permet ainsi de configurer son appareil pour une prise de vue rapide sans avoir besoin de fastidieusement passer par les menus.
Son gros point fort réside dans la présence de son petit écran de contrôle, sacrifié à l’autel de la compacité chez de nombreux concurrents. Les professionnels habitués à l’ergonomie des Reflex ne seront pas déroutés.
Navigation : clair et efficace, du Canon
Au premier démarrage, il est nécessaire de faire un tour dans le menu de l’appareil afin de le configurer selon ses préférences. Canon ne change pas ses habitudes et nous propose une navigation très simple et intuitive, grandement aidée par les molettes et joysticks. Le petit plus réside dans son écran tactile et utilisable dans les menus, contrairement à d’autres Hybrides. Il est donc vraiment très simple de naviguer dans le menu de cet appareil Canon ce qui rassure, surtout face à des appareils au menu chaotique et n’exploitant pas l’écran tactile.
L’un des meilleurs viseurs électroniques
L’un des critères majeurs lors de l’achat d’un appareil photo réside dans la qualité de son viseur. Les appareils Reflex, de par leur nom, profitent d’un système de miroirs et de prismes pour renvoyer à l’œil, une image de la réalité.
En ce qui concerne les appareils Hybrides, le procédé est un peu différent. Dénué de système de visé optique, de miroir ou de prisme, le viseur électronique se comporte comme un écran. Comme tel, plusieurs paramètres rentrent en compte : la taille, la définition et la fluidité. Avec ce viseur, Canon excelle dans les 3 catégories.
Comptant 5,76 millions de points, le viseur de l’appareil Canon fait partie des mieux définis du marché. Seuls quelques concurrents font mieux comme le tout récent Sony Alpha 1.
L’affichage est grand, on n’a pas l’impression de regarder à travers un trou de serrure tandis que la fluidité est au rendez-vous. Il est possible d’opter pour un taux de rafraichissement de 120 Hz ou 60 Hz, pour privilégier au choix, le confort ou l’autonomie. Je recommande personnellement de conserver le réglage sur 120 Hz, bien plus confortable pour les sujets rapides.
L’œilleton est également grand, dispose d’un correcteur de dioptries pour les porteurs de lunettes et assure une visée précise et confortable. Du tout bon pour ce viseur.
Du côté de l’écran, le constat est tout aussi flatteur. La dalle de 3 pouces propose un affichage convaincant comptant 2,1 millions de pixels. Les amateurs de cadrages artistiques apprécieront sa monture sur rotule permettant un contrôle total sur son inclinaison. Les amateurs de vlogs ou d’autoportrait seront ainsi parfaitement servis.
45 mégapixels et une dynamique hors normes
Les smartphones ne sont pas les seuls à vouloir tirer parti d’une grande définition. Si aujourd’hui on trouve des téléphones capables de rendre des clichés de 108 mégapixels, un grand capteur est nettement plus adapté à cette pratique. Le capteur plein format de ce Canon EOS R5 est ainsi capable d’afficher 45 mégapixels.
Comme on peut s’en douter, afin d’exploiter une telle définition, il faut un objectif adapté et de grande qualité pour retranscrire autant de détails. Les objectifs de la série L de Canon, comme le RF 70 – 200 ou le RF 50 mm f/1,2 utilisés ici, semblent répondre à cette exigence.
Comme attendu, les clichés obtenus offrent une grande résolution et les possibilités de travail en post-traitement sont énormes. La qualité de l’image ne souffrira d’aucun recadrage aussi marqué soit-il. Les impressions en grand-format seront le terrain de jeux favori de cet appareil Hybride.
Attention toutefois puisque des images d’une telle définition génèreront des fichiers de grande taille, environ 45 Mo. L’appareil offre la possibilité de générer des fichiers compressés, cRAW. Ces derniers permettent de diviser la taille de l’image par 2 pour des fichiers d’environ 22 Mo et pourtant, la différence de qualité entre les deux fichiers est imperceptible. Canon a réalisé un excellent travail et il sera dommage de se priver de cette compression, permettant tout de même d’enregistrer deux fois plus d’images !
Plus impressionnant, la plage dynamique de ce tout nouveau capteur est épatante. La plage dynamique représente l’écart entre les zones enregistrables les plus lumineuses et les plus sombres, très utile pour conserver des détails et des couleurs sur les scènes à fort contraste.
Sur ce point, Canon a longtemps été à la traine, notamment face aux appareils de chez Sony. Aujourd’hui, Canon a réussi à se remettre au niveau et rivalise presque avec ses concurrents les plus féroces. Les hautes lumières restent cependant le talon d’Achille de Canon mais l’amplitude dans les basses lumières est en revanche épatante. Il est toutefois possible de récupérer des informations dans les hautes lumières, et dans les ombres pour le travail en post-production.
Ce critère est très important pour les photographes agissant en extérieurs et ayant l’impossibilité de contrôler la lumière du Soleil. Les portraitistes et amateurs de paysages seront parfaitement comblés.
12 800 ISO et toujours exploitable
Avec un capteur aussi défini, on est en droit de se demander si la montée en ISO ne sera pénalisée. En effet, un grand nombre de pixels implique des photosites de plus petite taille, accueillant moins de lumière, donc nativement moins sensibles.
Les photos ainsi produites offrent une qualité optimale entre 100 et 400 ISO. Le bruit numérique fait sa première apparition à partir de 6400 ISO et devient plus marqué à 12 800 ISO, plage à laquelle l’image nécessite un peu de travail en post-traitement pour être complètement exploitable. Les couleurs et détails s’estompent progressivement jusqu’à 25 600 ISO, stade auquel récupérer une image devient plus laborieux mais pas impossible. Le bruit numérique reste parfaitement maitrisé et très fin, dû, justement, à la grande définition. Pour photographier en basse lumière, cet EOS R5 sera un allié de choix.
Bien entendu, en zoomant beaucoup dans l’image numérique, on décèle le bruit dès 3200 ISO, mais les photos sont rarement exploitées à de tels niveaux de recadrage. Il faudra vraiment s’attarder sur des détails pour que le bruit soit gênant.
Vitesse, autofocus et rafale, de quoi contrarier l’1DX Mark III
Chez Canon, le boitier Reflex 1DX Mark III est le roi de la photographie d’action. Mais l’ère des Hybrides vient marcher sur ses plates-bandes avec un R5 taillé pour l’action.
La détection automatique de l’œil est une fonctionnalité devenue indispensable pour bon nombre de photographes. Sony se targuait d’une certaine avance sur ses concurrents, mais Canon ne se laisse pas distancer pour autant. Avec ces nouveaux boitiers R5 et R6, le nippon rattrape son retard sur le segment des Hybrides et propose un autofocus plus véloce et plus précis que jamais.
Bien entendu, la détection de l’œil chez l’humain et les animaux est de la partie. Précis et rapide, le suivi du sujet se fait sans encombre. On note une légère latence lorsqu’il s’agit de récupérer le sujet une fois disparu du plan (une voiture qui passe devant, l’animal passant derrière un arbre….) mais rien de rédhibitoire.
L’appareil est également très véloce dans toutes les tâches. Le démarrage est parmi les plus rapides chez les Hybrides, de même pour la sortie de veille. Le photographe n’aura ainsi pas à patienter avant de shooter et évite ainsi toute perte de temps précieux, pouvant faire manquer le cliché du siècle. De la même manière, les clichés s’enchainent sans temps mort. Si vous avez pour habitude de photographier en continu et que vous avez impérativement besoin d’un boitier ultra rapide, vous tenez-là assurément un champion.
Du côté de la rafale, Canon présente son EOS R5 comme un cador de la catégorie, avec une cadence affichant 20 images par secondes.
Canon a également profité de l’annonce des EOS R6 et R5 pour présenter sa double stabilisation optique et mécanique. L’appareil est donc capable de combiner la stabilisation du capteur à celle des objectifs compatibles. Tout cela permettant de diminuer la vitesse d’obturation sans craindre le flou de bougé.
Le RF 70 – 200 f/2,8 est ainsi compatible avec cette technologie baptisée IBIS (In-Body Image Stabilization). Dans la pratique, nous avons pu réaliser des clichés au 200 mm au 1/60ème de seconde sans déceler de flou de bougé. C’est très bon et cela permettra aux photographes de faire des images parfaitement nettes même lorsque la lumière vient à manquer.
Rafale et buffer, du tout bon
Pour son EOS R5, Canon assure qu’il est capable de monter à 20 ips et d’encaisser des salves de plus de 200 images. A l’usage, la rafale de 12 ips était largement suffisante pour suivre les mouvements de chiens en plein jeu. Il ne faut pas oublier de rappeler que même à ces vitesses, le suivi du sujet et l’autofocus est toujours en marche !
Si on a des besoins plus poussés, il faut passer par l’obturateur électronique et activer la rafale H+, capable de rendre les 20 clichés par seconde. L’affichage se fait sans voile noir ce qui est très agréable et évite ainsi de perdre le sujet de vue.
Réglé sur H+ en enregistrant des images RAW (non-compressées) et Adobe 98, l’EOS R5 a été capable de maintenir une cadence de 18,5 ips jusqu’à saturation du buffer à 125 images. En passant en cRAW (compressé), la cadence a un peu augmenté, passant ainsi aux 20 ips promises, tandis que le buffer encaisse sans mal presque le double de clichés, soit 240. Il va être difficile de mettre cet appareil à défaut même lors des phases les plus nerveuses. En effet, l’EOS R5 est capable de tenir cette infernale cadence pendant plus de 10 secondes d’action !
Si vous photographiez plutôt en JPEG, l’appareil est alors capable d’enregistrer un nombre quasiment illimité d’images ! A condition, bien entendu, d’utiliser une carte CF Express rapide. Il est également possible d’enregistrer les images sur une carte CF et une carte SD grâce à deux emplacements dédiés, idéal pour séparer les JPEG et les RAW par exemple.
Optiques RF 70 – 200 f/2,8 et RF 50 mm f/1,2
Pour ce test, je disposais de deux optiques de série L (objectifs professionnels) à monture RF. Canon a donc profité du passage sur cette nouvelle monture Hybride pour mettre à jour deux de ses objectifs les plus célèbres. Le 70 – 200 mm est un must-have pour tous les photographes professionnels. Réputé pour sa grande qualité et son homogénéité à toutes les focales et ouverture, cet objectif ne déçoit pas.
La construction est sérieuse et le gabarit désormais plus compact n’empêche pas Canon de tropicaliser son caillou. La stabilisation optique est toujours efficace tandis que les divers commutateurs et bagues de réglages sont parfaitement agréables à utiliser et tombent naturellement sous le doigt. Le plus impressionnant demeure dans la qualité optique, exempt de toute déformation quelle que soit la focale. Les aberrations chromatiques sont également absentes même à la pleine ouverture (f/2,8) tandis que le vignettage est imperceptible.
Le 50 mm f/1,2 reprend les même qualités de construction. Egalement un must-have, le 50 mm offre dans cette configuration, une large ouverture idéale pour le portrait grâce à son bokeh très marqué. L’absence de stabilisation optique ne se fait pas du tout remarquer, inutile à cette focale, d’autant plus que la large ouverture permet de ne pas abaisser la vitesse d’obturation.
On note toutefois quelques aberrations chromatiques à f/1,2 mais rien d’alarmant pour une telle ouverture. Le département optique du nippon est toujours très efficace et promet de beaux objectifs répondant parfaitement aux besoins des photographes professionnels.
Verdict, sans défaut mais situationnel
Le Canon EOS R5 est un boitier rigoureusement pensé par les ingénieurs de Canon qui vient gommer le succès en demi-teinte de l’EOS R. L’ergonomie se rapproche de celle d’un reflex avec sa poignée très creusée est idéale pour soutenir es objectifs lourds tandis que toutes les molettes et boutons de réglages sont de la partie pour faciliter l’utilisation.
En tant qu’utilisateur de Reflex, ma plus grande crainte concernant les Hybrides provient de la visée et de l’autonomie. Pour ce premier point, Canon présente un système de visée électronique tout bonnement excellent. L’affichage est grand, précis, de qualité et fluide. Au niveau de l’autonomie, Canon se montre également surprenant. Alors que la fiche technique mentionne environ 250 clichés, j’ai réussi à en tirer plus de 900.
Nous sommes certes encore loin de ce que peuvent proposer les meilleurs Reflex, mais il faudra être très exigeant pour mettre en défaut la batterie de l’EOS R5. J’ai obtenu ce résultat dans le cas d’une utilisation réelle. L’appareil a été utilisé à 50 % pour des photos de portrait, et à 50 % pour des photos d’action en exploitant largement la rafale. Toutes les photos étaient prises au viseur électronique, tournant à 120 Hz pour un confort optimal.
La seule ombre au tableau réside en réalité dans sa définition de 45 mégapixels. Si les clichés offrent une excellente qualité, les images sont bien trop grandes et lourdes. Cela demande donc une machine performante pour les retravailler alors que je n’ai pas besoin d’une telle quantité de pixels. Bien entendu, les photographes ayant besoin des 45 mégapixels n’y verront aucun défaut.
Le choix de son appareil Hybride est à effectuer selon ses besoins et sa pratique. La mienne ne demande pas plus de 25 mégapixels, d’autant plus que le prix de ce R5 ne le montre pas accessible à toutes les bourses. Proposant des performances dynamiques similaires pour un tarif moindre et 20 mégapixels, l’EOS R6 peut-être une alternative de choix…