Pour beaucoup de nos compatriotes, la musique des Antilles francophones se réduit à Zouk Machine et à la Compagnie Créole. Voici une sélection de 10 grands noms d’hier et d’aujourd’hui qui témoignent de la vitalité et de la variété de la musique antillaise.
Eugène Mona
Parti bien trop tôt, Eugène Mona demeure plus de 30 ans après sa mort une figure essentielle de la culture antillaise. Chanteur revendicatif et engagé, il a sa vie durant chanté la fierté de sa Martinique natale et sa révolte contre l’injustice, d’une voix puissante reconnaissable entre toutes.
Prônant un retour à la nature et à la tradition, il était totalement à contre-courant de la volonté de modernité ambiante. Sa musique met en valeur la flute des mornes, un instrument en bambou dont il jouait en virtuose, mais aussi le tambour, instrument symbolique s’il en est dans les Antilles Françaises.
S’il est souvent vu comme un chantre de la musique traditionnelle, Mona doit plutôt être vu comme un défricheur et un créateur. Cela explique peut-être qu’il soit aussi respecté de la jeune génération, mais aussi de la scène jazz. Parmi ses titres phares qui font maintenant partie du patrimoine martiniquais, on peut citer Ti Milo, mi moin mi ou, Ma maman m’a dit, Doudou Menard ou encore Siano et Mango vè a. Les titres de Mona font régulièrement l’objet de reprises, preuve de la pérennité de son œuvre. Découvrez l’univers d’Eugene Mona sur Deezer.
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Victor O
Né en Martinique, Victor O a connu comme bien d’autres jeunes antillais l’exode vers la région parisienne, alors qu’il avait 11 ans. Ce déracinement lui a inspiré un de ses plus beaux titres, Diaspora, disponible sur l’album Diasporas (In Tempore Conquestus).
La musique de Victor O est métissée et mêle rythmes africains, zouk, tambour, dans une pop créole inspirée et tantôt dansante, tantôt mélancolique, tantôt revendicatrice. L’écoute d’un album de Victor O sonne comme une invitation au voyage. On ressent dans les paroles une volonté de réappropriation de sa culture, comme une recherche d’un paradis perdu.
Ce qui étonne dans sa discographie, c’est sa façon de passer d’un style à l’autre avec une forme d’évidence que l’on retrouve chez peu d’artistes. Pour mieux s’en rendre compte je vous invite à découvrir son album Le Collector qui rassemble ses principaux titres, un vrai régal.
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Admiral T
Bien de l’eau a coulé depuis la sortie de son tout premier album Mozaik Kréyol. Le guadeloupéen, qui a grandi à Boissard, un quartier chaud au cœur de Pointe-à-Pitre, est devenu au fil des années un des acteurs majeurs de la scène Reggae Dance Hall au niveau local, puis national et même international.
La musique d’Admiral T a ceci de remarquable qu’elle est à la fois urbaine, engagée, très influencée par les sons traditionnels (notamment le gwo-ka) et relativement transgénérationnelle. Son éclectisme se retrouve dans ses collaborations, au nombre desquelles on peut trouver aussi bien Wyclef Jean (ex Fugees pour rappel) que Kassav ou Diam’s.
Comme il le dit lui-même, Admiral T fait du Dance Hall conscient avec des paroles sensées. Pour découvrir son univers et son incroyable énergie sur scène, rien de mieux que le DVD de son concert de 2011 au Zenith.
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Tony Chasseur
Le boss ! La Perfecta, Marius Cultier, Kassav, Sakiyo, Malavoi, Fal Frett, il a collaboré -en tant que membre ou invité- avec tous les artistes et groupes essentiels de la musique antillaise depuis plus de 35 ans. Amoureux des rythmes de son île natale la Martinique, Tony Chasseur est aussi un grand fan de musique noire américaine et de jazz.
Plus actif que jamais, il est le co-créateur (avec Thierry Vaton) du premier Big Band Antillais, Mizikopeyi, et l’une des figures majeures du courant Jazz Créole. Toujours aussi doué pour s’entourer et insatiable promoteur de sa culture, il produit des concerts, écrit, chante, anime des émissions radio, opère en tant que directeur artistique, avec ses complices de toujours mais aussi en donnant une belle exposition à de jeunes artistes de talent.
Depuis pas mal d’années maintenant, Tony Chasseur propose, sous son nom ou au sein de Mizikopeyi, une vision jazzy des standards de la musique antillaise à côté de compositions personnelles aussi travaillées que mélodieuses. En tant que très grand fan (ça s’est vu ?!), je vous conseille de découvrir sans tarder son concert live Lakou Misic.
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Tanya Saint-Val
Issue d’une famille de musiciens, la diva guadeloupéenne Tanya St Val avait un avenir tout tracé. Dotée d’une voix puissante et réputée pour son professionnalisme, Tanya Saint-Val est l’une des rares artistes antillaises à être restée au top sans discontinuer depuis plus de 35 ans !
Sa carrière est jalonnée de tubes, de collaborations prestigieuses, d’aventures musicales dans des styles différents. Tanya est réputée pour ses concerts très bien préparés où elle fait étalage de sa richesse vocale mais aussi de son degré élevé d’exigence.
A mille lieues de certaines chanteuses de zouk « kleenex » dont le talent réside davantage dans leur look que dans leur voix, Tanya Saint-Val est vraiment chez elle sur scène, là où elle a appris son métier. Chantant essentiellement du zouk, genre dont elle est l’une des icones depuis ses débuts, elle est aussi très à l’aise dans la musique traditionnelle, la soul et la variété.
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Soft
Soft est un groupe guadeloupéen composé de trois musiciens, Philippe Sadikalay qui joue du saxophone, Joël Larochelle qui œuvre à la contrebasse et le charismatique Fred Deshayes, chanteur, guitariste, compositeur. Né en 2002, Soft a connu un succès monstrueux aux Antilles avec son album Kadan’s a peyi la, un superbe exercice de style tout en équilibre, en gouaille et en virtuosité vocale comme instrumentale.
La force de Soft c’est une certaine élégance dans les compositions, des textes à portée sociale et puisant dans la culture guadeloupéenne, et enfin une production soignée. Si je devais résumer Soft en un seul mot, ce serait l’harmonie. Mais Soft est aussi une expérience live savoureuse, avec un Fred Deshayes qui joue avec son public et le fait rentrer dans son univers.
Produisant peu (4 albums en 20 ans) mais ne se contentant que de l’excellence, Soft est un groupe qui réussit à toucher un vaste public en faisant de la musique qui n’est pas vraiment commerciale, ce qui n’est pas donné à tout le monde ! Pour découvrir leur musique, rien de mieux que leur best of.
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La Perfecta
La Perfecta est sans aucune contestation possible l’orchestre martiniquais le plus emblématique de l’âge d’or de la musique antillaise. Né il y a plus de 50 ans (!), le groupe existe toujours, même si les membres fondateurs l’ont quitté depuis bien longtemps.
Getting Out Of The Darkness, La Divinité, A Youskous pa fè fou, Tout Bagay Paré, En nou Allé, Baille Chabon, Help Me Baby, Yo Ké Save, Il le Fallait, etc., la liste des tubes entrés dans le patrimoine musical antillais est trop longue. Notamment sous l’impulsion d’un génie du piano devenu son chef d’orchestre, le légendaire Daniel Marie-Alphonsine, la Perfecta a donné ses lettres de noblesse à la musique martiniquaise. Les titres de la période 1978 à 1982 sont à ce titre les plus aboutis et témoignent d’une modernité étonnante pour l’époque. Le répertoire est composé en majorité de titres de cadence (genre dérivé du compas haïtien), mais comporte aussi des biguines, des boléros, des salsas, etc.
Précurseur dans de nombreux domaines, le groupe est resté très populaire dans toute la diaspora et continue à drainer les foules lorsqu’il se produit. Rien d’étonnant, les chansons du groupe ayant bercé de nombreux antillais de tous âges, dont votre serviteur.
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Tabou Combo
Quand on parle des Antilles francophones, on pense à la Guadeloupe et à la Martinique, mais on oublie trop souvent que le français est l’une des deux langues officielles d’Haïti.
Si l’île nous a donné des myriades de groupes de compas, genre qui a longtemps dominé la scène musicale antillaise avant l’arrivée du zouk, Tabou Combo est un cas à part. Par sa longévité, tout d’abord, puisque le groupe existe depuis 55 ans ! Mieux encore, certains membres de la toute première formation sont toujours aux commandes, à commencer par le très populaire chanteur Shoubou, présent depuis 1967.
Tabou combo propose un compas haïtien aux accents funk plutôt festifs. Le groupe a fait danser des générations de fans sur plusieurs décennies. Jeunes et moins jeunes, les antillais connaissent par cœur les refrains de tubes aussi immortels que New York City, Voyé Monté, Baissé Bas, Mabouya, Boléro Jouc li Jou, Jojo nan Carnaval, Juicy Lucy, Aux Antilles, Fénomène Tabou, et bien d’autres. Le groupe compte de très nombreux albums, à découvrir avec le top titres sur Deezer.
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Malavoi
Malavoi est un groupe martiniquais dont la formation initiale a vu le jour en 1972. Toujours en activité, Malavoi est un groupe singulier dont la musique se reconnait immédiatement, notamment du fait de la présence d’une section de cordes, pour le moins inhabituelle dans la musique antillaise.
Mazurka, biguine, quadrille et salsa sont les styles principaux que l’on retrouve sur les nombreux albums de Malavoi. Malavoi chante l’amour, la vie quotidienne et sa Martinique natale, dont le groupe fait connaitre la culture en donnant des concerts dans le monde entier.
Nombre de morceaux de Malavoi sont devenus des classiques, parmi lesquels La Filo, Gram è Gram, Case à Lucie, Caressé Mwen, Jou Ouvé du regretté Paulo Rosine ou encore Ababa avec la voix unique de son chanteur historique Ralph Thamar. La compilation Les essentiels vous permettra de découvrir les principaux titres du groupe et de comprendre pourquoi il tient une place particulière dans le cœur des antillais.
A découvrir aussi : Fal Frett, Alain Jean-Marie, Marius Cultier, etc.
Gilles Floro
Sa mort accidentelle à seulement 35 ans en 1999 a choqué les très nombreux fans de ce chanteur-auteur-compositeur brillant. Très talentueux, il commença très jeune et fit ses armes au sein de plusieurs groupes dont deux des plus fameuses formations guadeloupéennes, les Vikings et les Aiglons.
Gilles Floro fut, comme le tout autant regretté Patrick Saint Eloi, un des précurseurs du genre Zouk Love. Le succès commercial fut au rendez-vous dès son premier album, l’excellent Rêve Bleu, et ne se démentit pas tout au long de sa trop courte carrière. Doué d’un sens aigu de la mélodie, sa musique traduit une exigence et une rigueur qui semble hélas passée de mode.
Des titres comme Ten Kout, A pas Pawol en lè, On Doucè, Diaman Deben, Rêve Bleu, Karamel, Bel Pawol pou en famn (avec Jean-Claude Naimro de Kassav) et bien d’autres témoignent du talent de celui qui restera comme un des plus doués de sa génération. Pour mieux connaitre sa musique, retrouvez la page qui lui est dédiée sur Deezer.
A découvrir aussi : Eddy Marc, Jean-Luc Guanel, Patrick Saint-Eloi, etc.