Controversé autant par ses choix de rôles que son acting volontairement non-réaliste, Nicolas Cage ne laisse pas indifférent. Entre navets, séries B, films d’auteur bizarres et succès mainstream, Nicolas Cage aura offert un impressionnant éventail de personnages excentriques, souvent plus réussis que sa réputation le laisse croire. Retour sur les plus grands rôles de celui que David Lynch adouba comme « le jazzman de l’acting ».
Birdy
Dans cette adaptation du roman éponyme de William Wharton, Nicolas Kim Coppola dit Nicolas Cage joue Al dont la vie bascule dans le traumatisme après la guerre du Viet-Nam. Sandy Kroopf et Jack Behr font de Birdy un drama large qu’Alan Parker enveloppe d’une douloureuse gravité. Pour son premier grand rôle, Cage n’a peut-être que 20 ans mais il ne fait déjà pas les choses à moitié. Pour transcrire l’effondrement de son personnage, il perd 7 kilos, passe 5 semaines la tête enveloppée dans des bandages et se fait arracher deux de ses dents de devant sans anesthésie ! Les critiques applaudissent son intensité. 1984. Un acteur de l’extrême est né.
Arizona Junior
Film très décalé y compris pour les Frères Joel et Ethan Coen, Arizona Junior s’amuse de son pitch de base (un couple de stériles tente de kidnapper un bébé d’une famille de quintuplés) pour exercer un tour de force visuel et d’acting frappadingue. En abruti pur jus, Nicolas Cage en fait des caisses pour servir au mieux la tordante satire mâtinée de tendresse du film.
Eclair de Lune
Nicolas Cage en lead d’une comédie romantique avec Cher ? Pourtant, en objet des désirs d’une femme découvrant son attirance pour le frère de son fiancé, Nicolas Cage se montre l’homme de la situation. Ses crises de colère outrancières et son énergie irrépressible dynamisent le brillant scénario de John Patrick Shanley. Eclair de Lune est largement considéré comme la meilleure comédie romantique américaine des années 80. Le film achève de propulser Cage sous les projecteurs tout en revitalisant la carrière du réalisateur Norman Jewison.
Embrasse-moi, vampire
C’est principalement avec Embrasse-moi, vampire réalisé par Robert Bierman que Nicolas Cage commence à se détourner de l’acting naturaliste de mise dans le métier pour embrasser une méthode plus expressionniste, shamanique selon ses propres mots. Il peut ainsi déchaîner tout le brio burlesque du scénario de Joseph Minion (After Hours) dans ce pastiche de films de vampire où un homme croit être devenu un Fils de la Nuit et se comporte comme tel, avec des résultats aussi crétins que terrifiants. Hébétés, la critique et le public ne comprennent pas le surjeu calculé de Cage. Commence une longue période d’incompréhension entre l’acteur et les spectateurs. Au moins le film aura donné un des plus célèbres mèmes d’Internet…
Sailor et Lula
A la réflexion, il ne faut guère s’étonner que Cage et David Lynch, deux des plus bizarres rejetons d’Hollywood, se soient alliés. Dans Sailor et Lula, adaptation du roman de Barry Gifford (Lost Highway), Nicolas Cage et Laura Dern flamboient en couple épique poursuivi par des gangsters. Conquis par la passion frénétique, Cage assume un acting passé à un feu ardent et se met au diapason de la vague romantico-sanglante du réalisateur
Leaving Las Vegas
Ben Sanderson a tout perdu. Dans un baroud d’honneur, il voyage à Las Vegas pour se saouler jusqu’à la mort. Une prostituée au grand cœur le sauvera-t-il ou précipitera sa mort ? Fidèle à ses préparations extrêmes, Cage s’est copieusement saoulé pendant deux semaines pour avoir une meilleure idée d’un personnage embrumé par l’alcool. En suicidaire nihiliste, Nicolas Cage mène à bout de bras Leaving Las Vegas, incarne au détail près le roman de John O’Brien (qui se suicida avant la sortie du film) adapté par Mike Figgis. Pour sa compréhension fine des mécanismes d’autodestruction, Nicolas Cage décroche l’Oscar.
Rock
Cocktail classique d’action mis au point par les spécialistes du genre que sont le réalisateur Michael Bay et le producteur Jerry Bruckheimer, Rock est un témoignage encore pertinent des films d’action style 90’s. Nicolas Cage en revient à un acting plus traditionnel, développant plutôt la relation buddy movie avec Sean Connery. Il contribue beaucoup au succès et à l’ambiance popcorn du film.
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Volte-face
Nicolas Cage veut révolutionner l’acting, John Woo le cinéma d’action, ces deux-là étaient faits pour s’entendre. Un agent du FBI prend le visage d’un terroriste pour découvrir l’emplacement d’une bombe, ledit terroriste fait de même pour détruire l’agent. Volte-face bénéficie du scénario dingo de Mike Werb et Michael Colleary, base solide pour que Woo électrifie l’écran à coup d’action spectaculaire et chorégraphiée selon son style inimitable. Dans un double rôle, Nicolas Cage rivalise avec John Travolta d’acting écorché.
Adaptation
20 ans avant Un talent en or massif, Nicolas Cage s’essayait déjà au méta avec Adaptation, film mindfuck typique des scénarios de Charlie Kaufman. Incarnant un double rôle : le scénariste du film-même souffrant du syndrome de la page blanche et son frère, Nicolas Cage est mémorable, notamment en auteur s’abîmant dans une crise existentielle. Sa performance paroxystique, rehaussée par la réalisation impeccable de Spike Jonze, montre sa maestria à absorber tout élément : descente aux enfers, réflexion meta, humour…
Lord of War
Souvent considéré comme un de ses meilleurs films, Lord of War offre à Nicolas Cage une partition moins surchauffée mais parcourant toute la gamme des émotions. En Yuri, individu sans scrupules qui fait son trou dans le trafic d’armes, Cage joue aussi bien la toute-puissance que l’effondrement en passant par les vannes spirituelles et le flegme. Il est le guide ironique du film très documenté du génial Andrew Niccol.
Joe
Après Lord of War, Nicolas Cage, frustré par les contraintes d’Hollywood et de personnages trop normés à son goût, préfère jouer dans les navets les plus biscornus où il peut faire étalage de son acting délirant. Au sein de la cascade hallucinante de plantages ridicules qu’il va enchaîner sans interruption pendant 13 ans surnage Joe, rude étude sur la violence pensée par Larry Brown (d’après son roman) et le scénariste Gary Hawkins. En homme belliqueux qui protège un jeune garçon de son père violent, Nicolas Cage trouve l’un de ses plus beaux rôles, collant au plus près les éclats sombres de son personnage. La rencontre de Cage avec le cinéma indépendant a occasionné des quolibets pas toujours immérités, mais le film de David Gordon Green est une brève goulée d’espoir en plein milieu de la partie la moins reluisante de sa carrière.
Mandy
Nicolas Cage n’est jamais autant efficace que quand un personnage possède a priori toute la démesure qu’il peut lui injecter. Démonstration avec Mandy, film d’action/horreur où un homme sans histoires lâche la bête en lui pour se venger d’une secte qui lui a pris sa femme. Panos Cosmatos pousse tous les leviers de l’ultraviolence, imité par un Nicolas Cage plus taré que jamais dans un rôle de vengeur lysergique qui sait aussi passer une émotion inattendue. Un rôle portant la marque du déchirement de l’acteur, alors en pleine séparation, mais aussi la lente fin de sa malédiction. La critique et une partie du public jouent enfin le jeu, tandis que Cage se montre désormais moins négligent dans ses choix de carrière.
Color Out of Space
Il y a des similitudes entre les styles grandiloquents de Nicolas Cage et de Lovecraft. Voir l’acteur dans Color Out of Space, adaptation d’une nouvelle de l’auteur, fait bizarrement sens. En fermier confronté aux changements surnaturels autour de lui depuis la chute d’une météorite, Nicolas Cage joue sa partie désormais bien rôdée de comportements volcaniques et de cabotinage exaltant pour un film louchant autant du côté de l’horreur Lovecraftienne que des pulps.
Pig
Nicolas Cage se lance dans une grande quête pour retrouver… son cochon kidnappé. Ça vous fait rire ? Nicolas Cage le prend très au sérieux dans Pig, de Michael Sarnoski. Sa performance est brute et maximaliste comme toujours, mais au service d’une inattendue fable sur la perte et le chagrin, à l’image de son personnage esseulé et perdu. L’une de ses plus belles performances, où Cage rappelle que, même sans le naturalisme de mise, il peut se montrer aussi bouleversant que ses collègues plus traditionnels.
Un talent en or massif
Bruce Campbell, Jean-Claude Van Damme, Chuck Norris… comme nombre de ses confrères un peu déviés, Nicolas Cage a aussi joué son propre rôle. Dans Un talent en or massif, Nicolas Cage joue donc Nicolas Cage, acteur à la dérive embarqué dans une mésaventure aussi allumée que lui à base d’espionnage pour le compte de la CIA. Joyeusement méta, hilarant et crépitant d’énergie magnétique, le film de Tom Gormican est une belle lettre d’amour à l’acteur et une excellente comédie d’action. S’inscrivant dans le succès critique de ses derniers films (à défaut de conquérir le public), on assiste bien à un jubilatoire comeback de Nicolas Cage, à jamais l’alien d’Hollywood.