Sélection

À la découverte de la littérature indienne

08 juin 2022
Par Melanie C.
À la découverte de la littérature indienne

Partir à la découverte de la littérature indienne, c’est explorer un monde aussi vaste, multiple et foisonnant que le pays. Diversité linguistique – l’Inde compte 22 langues – mais aussi des cultures, des paysages, des couleurs… Un choc des cultures pour nous, lecteurs de l’Occident, mais une expérience tellement enrichissante, irriguée par ces problématiques politiques, sociales et culturelles dont, le plus souvent, on ignore tout. Bon voyage !

Kabuliwallah-et-autres-histoires
Kabuliwallah et autres histoires de Rabindranath Tagore

Écrivain mais aussi compositeur, dramaturge, peintre et philosophe, libre penseur à la créativité débordante, Rabindranath Tagore revendiquait son droit à l’imagination délivrée de toute morale. Prix Nobel de littérature en 1913, il nourrissait ses nouvelles et poèmes de son esprit multi-facettes, entre quête de sacré, réflexions artistiques, sociales et politiques… À l’image de ce Kabuliwallah et autres histoires, formidable recueil de nouvelles aussi brillantes que dramatiques qui nous plongent au cœur du Bengale et de Calcutta, sa ville natale.

L-equilibre-du-monde

L’Équilibre du monde de Rohinton Mistry

Considéré par beaucoup comme le chef-d’œuvre absolu de la littérature indienne, ce magnifique pavé s’impose en tout cas comme l’un des très grands romans de l’Inde contemporaine. Celle des années 1970, après qu’Indira Gandhi eut décrété l’état d’urgence, suspendant libertés publiques et élections. L’Équilibre du monde de Rohinton Mistry suit ainsi les trajectoires de quatre personnages – une veuve, un étudiant et deux intouchables – réunis par les hasards de la vie. En filigrane, la fresque d’une société de castes aux réalités impitoyables. Une œuvre essentielle à qui veut découvrir la littérature indienne.

Les-enfants-de-minuitLes Enfants de minuit de Salman Rushdie

Salman Rushdie est de ceux qui ont su transcender leur nationalité pour devenir citoyen du monde. L’écrivain n’en a pour autant jamais oublié ses racines qui irriguent profondément son œuvre : de ses Versants sataniques à son étonnante variation sur les Mille et une nuits dans Deux ans, huit mois et vingt-huit jours en passant par ses incontournables Enfants de minuit, son chef-d’œuvre. L’histoire de ces enfants nés à cette heure fatidique de l’entre-deux-jours, le 15 août 1947, quand l’Inde se délivrait de la couronne britannique pour gagner son indépendance. Des mômes qui se retrouvent alors dotés de pouvoirs « spéciaux » ! Un récit multi-récompensé, dense, burlesque et poétique, empreint du « réalisme magique » latino-américain. Indispensable !

Un-ocean-de-pavots

La Trilogie de l’Ibis d’Amitav Gosh

Mondialisation et migration, circulations des hommes et des ressources, des langues et des idées… Des thèmes chers à l’essayiste et écrivain Amitav Gosh, lui le licencié d’histoire et docteur en anthropologie sociale. Dans son ambitieuse Trilogie de l’Ibis – Un océan de pavots, Un fleuve de fumée et Un déluge de feu –, il nous emmène du Bengale à Hong-Kong et Canton, au fil du commerce de l’opium entre l’Inde et la Chine, au milieu du XIXe siècle. Une immense fresque historique aux ramifications infinies avec, pour point d’intersection, l’Ibis, un ancien bateau négrier reconverti dans le transport de coolies (ces travailleurs agricoles d’origine asiatique) vers l’île Maurice. Un fascinant dialogue entre la fiction et l’histoire pour un incroyable voyage.

Le-Dieu-des-Petits-RiensLe Dieu des petits riens d’Arundhati Roy

Activiste pacifiste, essayiste pamphlétaire, Arundhati Roy consacre sa vie à combattre, le verbe haut et la plume à la main, les ravages du nationalisme hindou et les atteintes aux droits de l’homme – et des femmes ! En 1992, elle se lançait dans son premier roman pour l’achever en 1996. Son titre ? Le Dieu des petits riens, récit inspiré de sa vie et notamment de son enfance au Kerala, en Inde du Sud. On y suit le destin tragique de Rahel et Estha, deux jumeaux dont l’enfance innocente se retrouve confrontée au monde des adultes, des castes et des interdits. Un livre foisonnant auréolé du prestigieux prix Booker Prize en 1997. À lire également, le second roman d’Arundhati Roy, Le Ministère du Bonheur Suprême publié 20 ans plus tard, en 2017 !

Fuir-et-revenir

Fuir et revenir de Prajwal Parajuly

En 2020, l’écrivain Prajwal Parajuly, membre de la petite communauté des Indiens népalais, faisait une entrée remarquée et remarquable sur la scène littéraire avec son tout premier roman, Fuir et revenir. Il y raconte avec un humour corrosif les retrouvailles contrariées d’une famille compliquée à l’occasion de l’anniversaire d’une redoutable matriarche. Alors que chacun des membres a fui et construit sa vie dans un pays étranger, tous reviennent à Gantkok, dans l’État du Sikkim, au nord-est de l’Inde. Une réunion à laquelle il leur est impossible de se soustraire mais dont ils craignent tous, pour des raisons diverses et variées, de ne pas sortir indemnes. Un livre drôlement malicieux qui aborde avec le plus grand sérieux les questions de castes, d’identités culturelles et sexuelles.

Joothan
Joothan d’Omprakash Valmiki

Joothan ou l’autobiographie d’un intouchable. Omprakash Valmiki y déroule sa vie, de son enfance jusqu’à la maladie qui finira par l’emporter en 2013. Sa vie de dalit, ces individus hors-castes, relégués professionnellement à des activités impures, socialement à l’humiliation. Il décrit avec force et détails le fonctionnement cruel de ce système de castes, pourtant interdit par la Constitution depuis 1950, soit, ironie du sort, l’année de naissance d’Omprakash Valmiki. Un système capable de mettre au banc toute une partie de la société. Un livre écrit en hindi, véritable pilier de la littérature dalit, auquel nous saurions trop vous conseiller de joindre Salaam, recueil de nouvelles toujours signé d’Omprakash Valmiki et toujours aussi saisissant sur cette « Inde invisible ».

Le-tigre-blanc

Le Tigre blanc d’Aravind Adiga

Il est aussi question d’un intouchable – de fiction – dans Le Tigre blanc d’Aravind Adiga. Et de l’ascension impensable qui l’amènera à s’extirper de l’Inde des « Ténèbres » pour prendre sa place dans l’Inde des « Lumières ». Dans ce premier roman, Aravind Adiga dresse le destin de Balram Halwai, surnommé « Le tigre blanc », sorte de Rastignac oriental prêt à tout – vraiment à tout – pour se hisser jusque dans la Silicone Valley locale. Un roman noir d’une puissance formidable, un livre dont le désespoir pourrait nous écraser mais dont l’humour teinté de cynisme nous tient en haleine tout du long.

*Copyright visuel : Guillaume BRIARD via Unsplash

Article rédigé par
Melanie C.
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