Le cinéma fantastique de David Cronenberg dissèque aussi bien le corps humain que la psyché. Entre art de la science et sens inné du malaise, le réalisateur a créé des films qui ne laissent pas indifférent, à l’image des Crimes du futur, en salles le 25 mai, annoncé comme un grand cru particulièrement dérangeant. Retour sur une filmographie aussi chaleureuse qu’un scalpel.
Le cinéma fantastique de David Cronenberg dissèque aussi bien le corps humain que la psyché. Entre art de la science et sens inné du malaise, le réalisateur a créé des films qui ne laissent pas indifférents, à l’image des Crimes du futur, en salles le 25 mai, annoncé comme un grand cru particulièrement dérangeant. Retour sur une filmographie aussi chaleureuse qu’un scalpel.
Chromosome 3
Après près d’une demi-douzaine de films réalisés depuis 1969, David Cronenberg frappe un grand coup en 1979 avec le film d’horreur Chromosome 3. On y retrouve quelques-unes de ses obsessions récurrentes qui ne le lâcheront plus : univers psychiatrique, pustules et tumeurs qui apparaissent soudainement, effets secondaires d’un traitement médical répugnants, meurtres sadiques… Tout est déjà en place et ne demandera qu’à s’exprimer encore plus librement.
Vidéodrome
En 1983, il va en effet plus loin avec Vidéodrome dans lequel il entraîne James Woods dans l’un de ses films les plus marquants. Ici, une chaîne télévisée spécialisée dans la pornographie et la violence, diffuse un snuff movie. Le début des ennuis pour le directeur de la chaîne, mais celui de la reconnaissance pour Cronenberg. Le film est un échec public mais reçoit de nombreuses critiques dithyrambiques, dont celles d’Andy Warhol, admirateur du travail du réalisateur canadien. Il y aura donc un avant et un après Vidéodrome, nouvelle étape d’une filmographie bientôt culte, prête à sortir de la zone underground.
La Mouche
Et c’est La Mouche en 1986 qui va apporter le premier succès international de Cronenberg, après plus de 60 millions de dollars de recettes et deux millions d’entrées rien qu’en France. Jeff Goldblum et Geena Davis, en couple au moment du tournage, reproduisent leur histoire sur grand écran à la demande du réalisateur. Si ce n’est un élément perturbateur de micro-taille : une mouche. Cette dernière se glisse dans l’appareil de téléportation essayé par Goldblum et ce dernier va se transformer peu à peu en une mouche à taille humaine. La fin, pleine de bouillie et de fureur, est inoubliable…
Faux-semblants
David Cronenberg va trouver en Jeremy Irons un double de cinéma. Il lui confie tout naturellement le double rôle de frères jumeaux gynécologues partageant absolument tout et sombrant peu à peu dans la folie. Faux-semblants met en lumière quelques-unes des obsessions de Cronenberg, à savoir la perte des repères, les apparences trompeuses, la dualité, la perversion et l’ambivalence. Le film a obtenu le Grand Prix au Festival international du film fantastique d’Avoriaz en 1989 et fait partie des chefs-d’œuvre du réalisateur.
Le Festin nu
Le Festin nu est à l’origine un roman de William S. Burroughs, considéré comme inadaptable. Et pour cause. On y parle d’un exterminateur de cafards assassinant sa femme suite à une exposition à des produits chimiques, sur les conseils d’un… insecte géant. Le reste est bourré d’hallucinations, de faux semblants (on y revient) et de centipèdes à taille humaine. Un film typiquement cronenbergien, échec monumental au box-office, mais culte désormais. Ne serait-ce que pour la performance dantesque de Peter Weller, en roue libre après avoir incarné la droiture même en RoboCop quatre ans plus tôt.
Crash
Ce fut l’un des films-chocs du Festival de Cannes édition 1996. Crash, l’adaptation du livre éponyme déjà scandaleux de J.G. Ballard, a mis mal à l’aise une partie de la Croisette, tout en obtenant le prix spécial du Jury. On y suit une bande de pansexuels ne trouvant l’orgasme qu’en assistant à des accidents de voiture. Ici, on tripote des cicatrices, on admire des mutilations et on se nourrit des funestes destinées de James Dean et Jayne Mansfield. Un film froid, clinique et érotique, dans lesquels s’ébrouent joyeusement James Spader, Holly Hunter et Rosanna Arquette.
A History of violence
Après Jeremy Irons, Cronenberg trouve un nouveau double de cinéma en la personne de Viggo Mortensen avec lequel il va tourner quatre films. Parmi eux, A History of violence en 2005, thriller presque conventionnel (pour du Cronenberg) mais diablement efficace. Ou l’histoire d’un honnête père de famille qui tue un agresseur par légitime défense et signe ainsi la fin de sa tranquillité d’âme et de corps. Le film obtient plusieurs récompenses internationales et replace le réalisateur sur l’échiquier du septième art après quelques films mineurs.
Maps to the Stars
Avec Cosmopolis, Cronenberg mise sur Robert Pattinson pour devenir l’un de ses nouveaux anti-héros avides d’autodestruction. Il aide ainsi le jeune acteur à passer habilement la transition post-Twilight. Il poursuit leur collaboration avec Maps to the Stars, comédie noire et acerbe sur le milieu du cinéma bourré de personnalités sous psychotropes. On y retrouve notamment Julianne Moore, Mia Wasikowska et même Carrie Fisher dans son propre rôle.
Les Crimes du futur
En 1970, David Cronenberg signait un film intitulé Crimes of the Future. En 2022, il sort un autre film nommé Les Crimes du futur, mais ils n’ont rien à voir l’un avec l’autre. Le premier abordait une mystérieuse maladie causée par des produits cosmétiques. Le second est une dystopie glaçante sur la faculté des êtres humains à vivre sans enveloppe corporelle, capables de se métamorphoser en créatures. Viggo Mortensen rempile, accompagné de Léa Seydoux et Kristen Stewart, dans ce qui s’annonce le film le plus perturbant de ces dernières années. Le Cronenberg qu’on aime tant est de retour !