Du générique d’émissions culturelles à la radio au dernier « Mission : Impossible » en passant par la publicité, « Les Quatre saisons » de Vivaldi font partie de notre quotidien. A l’occasion de leur tricentenaire, retour sur la longévité de ce chef d’oeuvre que la pop culture s’est accaparée.
Il cimento dell’armonia e dell’invenzione. Tel est le titre d’un recueil de partitions d’Antonio Vivaldi, déposé en 1725 par le compositeur italien chez son éditeur. Comme l’aurait fait un producteur d’aujourd’hui pour en maximiser l’impact, Vivaldi avait délibérément placé ses « bangers » en début d’œuvre : les quatre premiers concertos pour violon, nommés Printemps, Été, Automne et Hiver, ouvrent le cahier, et ont connu dès le départ un succès considérable dans toute l’Europe.
Comme l’expliquaient sur Europe 1 les sœurs Camille et Julie Berthollet, violoncelliste et violoniste stars, à la sortie de leur album Nos 4 saisons, l’harmonie sublime des Quatre Saisons se rapproche de la pop : mélodies entraînantes et enchaînements d’accords parfaits en ont assuré la postérité jusqu’à nos jours.
Les Quatre Saisons font leur cinéma
En dehors des biopics et documentaires consacrés à Vivaldi (Antonio Vivaldi, un prince à Venise avec Michel Serrault et Michel Galabru, notamment), la musique du compositeur a été une inspiration majeure du cinéma, qui a largement contribué à la célébrité de l’œuvre auprès des profanes.
Outre des scènes d’ambiance, les quatre concertos servent de musique d’époque à des films en costume : une contextualisation inaugurée par Le Carrosse d’or de Jean Renoir (1952), se déroulant au 18e siècle.
Plus près de nous, Le Printemps, L’Eté, L’Hiver ou L’Automne ont aussi été utilisés de façon détournée : Ruben Östlund pour le générique de Snow Therapy, Park Chan-wook au moment d’une scène de torture (celle avec la partie non contondante du marteau) dans Old Boy, ou Lars von Trier à l’époque de The House That Jack Built, usent d’un symbole de l’élégance pour accompagner des scènes barbares ou triviales.
Même chose dans la série Netflix Mercredi, avec l’interprétation au débotté de l’ouverture de L’Hiver en pleine séquence de chaos.
Les Quatre Saisons permettent aussi de mettre en contraste les univers culturels des deux protagonistes d’Intouchables, notamment lorsqu’Omar Sy reconnaît Le Printemps comme étant… la musique d’attente des Assedic à Paris.
Un certain cinéma d’auteur n’a pas totalement abandonné l’impact émotionnel du compositeur italien : on ne spoilera pas le très beau Portrait de la jeune fille en feu de Céline Sciamma, mais la musique de Vivaldi y tient un rôle fondamental.
Une musique qui inspire… les musiciens
« Classique, comme cette boucle de Vivaldi · On s’bouge pour se mettre royal avec des Royalties ». Dès son premier album, Youssoupha osait le sample des Quatre Saisons, faisant de Vivaldi un « beatmaker » du rap français. Orelsan eut le bon goût de choisir une saison différente lorsqu’il enregistra No Life pour Perdu d’avance.
Mais c’est encore dans le classique contemporain que l’œuvre de Vivaldi a été la mieux (ré)utilisée. Dans les années 1990, Leonid Desyatnikov arrangeait les Quatre saisons de Buenos Aires d’Astor Piazzolla pour violon, afin de mesurer les proximités de cette œuvre de tango avec les saisons vivaldiennes.
En 2012, le compositeur néoclassique Max Richter a relu l’intégralité de ces célèbres concertos pour l’album Recomposed By Max Richter : Vivaldi, the Four Seasons, réinventant complètement l’œuvre autour de gimmicks et de boucles planantes. Un disque dont les extraits Spring 1 ou Summer 1 se retrouvent aujourd’hui dans des films comme Ballerina, ou des séries façon The Staircase…
Preuve que l’on n’a pas fini d’entendre ces merveilleuses Quatre Saisons, même trois siècles après leur sortie en partitions.
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