Décryptage

Les Dents de la mer : pourquoi le film d’horreur de Spielberg reste indétrônable

16 juin 2025
Par Lucile B.
Les Dents de la mer : pourquoi le film d'horreur de Spielberg reste indétrônable
©Universal Pictures

« Instinct de survie », « En eaux troubles », « The Reef », « Open Water »… Ces films de requins n’ont cessé de nourrir notre squalophobie. Un long-métrage supplante pourtant toujours tous les autres. L’original, le précurseur, le redouté, l’inoubliable : « Les Dents de la mer » de Steven Spielberg. Alors que ce monument horrifique célèbre ses 50 ans le 20 juin 2025, on vous explique pourquoi c’est culte.

Vous aimez vous baigner dans l’océan, mais vous redoutez que quelque chose frôle vos pieds ? À la plage, vous guettez au large les ailerons, synonymes de dents affutées ? Vous vous demandez pourquoi ce film a autant imprégné la mémoire collective et façonné le cinéma d’horreur contemporain ? Alors à vos jumelles, chef Brody, et retour en 1975 sur la traque du grand requin blanc mangeur d’hommes.

Un scénario redoutablement efficace

Sorti en salles le 20 juin 1975 et réalisé par un tout jeune cinéaste, un certain Steven Spielberg, Les Dents de la mer, est le premier opus d’une tétralogie iconique (Les Dents de la mer, 2e partie, Les Dents de la mer 3, Les Dents de la mer 4 : La Revanche), bien que progressivement déclinante.  

Ce long-métrage est l’adaptation du premier ouvrage de Peter Benchley,Jaws, sorti l’année précédente. Un drame horrifique aquatique couché sur papier qui trouve son inspiration dans le roman Moby Dick de Herman Melville, et dans un fait divers portant sur une série d’attaques de requins ayant eu lieu dans l’État du New Jersey. 

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Primé à trois reprises (meilleur montage, meilleure musique de film et meilleur son) durant la 48e cérémonie des Oscars, le film captive par son synopsis où la revanche animale flirte avec l’horreur. 

Dans la petite station balnéaire d’Amity, un grand requin blanc menace les habitants. Après un premier drame camouflé par le maire de la ville, soucieux de préserver le calme et l’attrait touristique de l’île avant la fête nationale, une série d’attaques exigera la traque du squale. Le chef de la police Martin Brody (Roy Scheider) se lance dans une course contre-la-montre en compagnie du capitaine Quint (Robert Shaw) et de l’océanographe Matt Hooper (Richard Dreyfuss) afin de chasser le monstre sanguinaire.  

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Un lancement tonitruant  

Bien que le film semble renoncer à toucher le grand public lors de sa sortie – son affiche culte et terrifiante refroidira les plus jeunes – il sera tout de même distribué en juin 1975 sur 464 écrans. Les Dents de la mer est donc le premier long-métrage à expérimenter une sortie à grande échelle sur l’ensemble du territoire, alors que, jusqu’à présent, les films étaient diffusés ville par ville – en commençant par Los Angeles et New York. Ainsi, le film de Spielberg révolutionne l’industrie des studios en faisant de sa sortie un événement national. 

Pour couronner le tout, Les Dents de la mer sera le premier film à franchir la barre des 100 millions de dollars de recettes. Entre ses séances à l’ambiance survoltée, ses produits dérivés tendant vers l’horreur et son marketing éditorial mettant en avant le roman éponyme, Jaws devient un véritable phénomène culturel. Sa recette rentabilise pleinement son budget initial de 7 millions de dollars et l’inscrit au passage dans la légende hollywoodienne. 

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Les Dents de la mer complète son palmarès en inaugurant l’ère du blockbuster hollywoodien. Le terme – qui tire son nom des bombes lourdes employées au cours de la  Seconde Guerre mondiale par la Royal Air Force – est employé dès 1951 pour désigner les péplums. Il se généralisera en 1975 grâce aux Dents de la mer – premier « blockbuster de l’été » – qui lui apporte une nouvelle définition : celle d’un long-métrage destiné à obtenir un grand succès.  

Une cinématographie mémorable  

Les Dents de la mer et son synopsis singulier frappe également par sa cinématographie mémorable et révolutionnaire. Nombre de spectateurs ont été durablement traumatisés par ce requin tueur mangeur d’hommes. Une réputation éloignée de la réalité dont pâtissent les squales encore aujourd’hui. La scène d’ouverture, oppressante à souhait, dans laquelle la jeune Chrissie (Susan Backlinie) perdra la vie, demeure une séquence anthologique.  

À celle-ci s’ajoute quantité de scènes marquantes : l’Independence Day, le récit cauchemardesque de Quint et du cuirassée Indianapolis – la préférée du réalisateur – ou encore la mythique séquence finale qui achève enfin le prédateur dans une explosion. Des scènes mémorables qui laissent d’ores et déjà entrevoir les prémices d’un grand cinéaste en devenir.  

Spielberg surprend. Il emploie le point de vue subjectif de l’animal, cherche à réinventer le genre, et remet également au goût du jour le cinéma classique hollywoodien avec le célèbre Dolly Zoom (travelling avant et zoom) emprunté à Hitchcock, qui lui permet d’illustrer l’instant où Brody comprend qu’un enfant s’est fait dévorer. 

Dolly Zoom

Ces séquences inoubliables sont ponctuées de dialogues tout aussi marquants. Si on vous dit « You’re gonna need a bigger boat » – en français « Il nous faudrait un plus gros bateau » – vous l’avez ? On n’en doute pas, mais au cas où, on vous remet cette improvisation de Roy Sheider qui s’impose comme la meilleure réplique du long-métrage. 

Bien évidemment, le film ne pourrait être complet sans sa musique. Dans la première partie des Dents de la mer, Spielberg ne fait que suggérer l’animal – initialement en raison d’une mauvaise conception de « Bruce », le squale mécanique – le rendant tout de même, paradoxalement, plus présent que dans l’ouvrage. Le requin, véritable personnage du long-métrage, est donc conceptualisé à l’écran non pas par sa présence, mais par l’idée de celle-ci. Ainsi, l’animal prend corps grâce à un thème musical distinct, façonné par John Williams.  

Composé de deux notes volontairement minimalistes, mi et fa, ce thème – qui rendait initialement perplexe Spielberg – apporte une véritable tension dramatique au récit. Joué dans un registre grave et s’accomplissant dans un ostinato montant crescendo – à la manière de l’angoisse qui grandit en nous – le thème du prédateur marin figure la présence de celui-ci, engendrant une peur quasi viscérale chez les spectateurs.  

Williams, qui collaborera par la suite avec Spielberg sur la quasi-totalité de ses films, sera récompensé pour ses partitions pour le long-métrage d’un Oscar, d’un Golden Globe Award, d’un Grammy Award et d’un British Academy Film Award. Le compositeur – alors dans sa période symphonique qui s’étirera jusqu’en 1983 – démontre de manière saisissante l’importance de la musique dans les longs-métrages. 

Un héritage indéniable  

Les Dents de la mer sera couronné d’un succès critique et public indéniable qui fait de lui une référence dans le genre. Le long-métrage a apporté une visibilité nouvelle aux films de monstres, réinventant les codes et donnant naissance à d’autres productions orientées sur le combat entre l’homme et l’animal – comme en témoigne la licence Alien, inaugurée en 1979 par Ridley Scott avec Alien, le huitième passager.  

Le film devient également une véritable référence cinéphile, parodié dans nombre de longs-métrages et cité dans bien d’autres encore, dont le plus mémorable restera sûrement Retour vers le futur 2 (1989), avec la scène où Marty McFly (Michael J. Fox) fait face à un requin holographique faisant la promotion de Jaws 19, réalisé par un certain Max Spielberg. Une dédicace à peine voilée au long-métrage ayant fait vibrer les années 70. 

En plus d’avoir fait frissonner tous les baigneurs de l’été 75, le film a propulsé sur le devant de la scène son réalisateur de 29 ans, Steven Spielberg. Le cinéaste réalisera au cours des années suivantes nombre de longs-métrages iconiques alimentant sa filmographie : Rencontres du troisième type (1977), Les Aventuriers de l’arche perdue (1981), ou encore E.T., l’extra-terrestre (1982). Il faudra néanmoins attendre 1993 pour revoir un face à face sanglant opposant l’homme à l’animal avec le grandiose Jurassic Park, qui n’aurait certainement pas vu le jour si la franchise Jaws avait perduré.  

Jaws Gif Tumblr

En définitive, Les Dents de la mer laisse derrière lui un héritage indéniable. Et disons-le, bien que les films de requins n’aient cessé de se développer depuis, aucun n’égalera le mordant et terrifiant long-métrage de Spielberg.  

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Lucile B.
Lucile B.
Rédactrice fnac.com
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