Décryptage

Pourquoi Severance est (probablement) la meilleure série actuelle

20 mars 2025
Par Guillaume Jouenne
Pourquoi Severance est (probablement) la meilleure série actuelle

Avec « Severance », il n’existe que deux cas de figure. Soit vous n’avez jamais vu la série de Dan Erickson et tout le monde autour de vous en parle. Soit vous faites partie du culte et plus personne ne vous invite nulle part de peur d’entendre pour la cinquantième fois en quoi la série est un chef-d’œuvre. Voyons donc en quoi « Severance » mérite toutes ces louanges.

Severance est une série américaine entremêlant science-fiction et de thriller psychologique créée par Dan Erickson et diffusée sur Apple TV+. Elle a été lancée le 18 février 2022 et a rapidement captivé le public. On y suit Mark Scout (Adam Scott), un employé de la mystérieuse entreprise Lumon Industries, où les salariés ont subi une procédure appelée « Severance ». Cette opération dissocie complètement leurs souvenirs personnels et professionnels : une fois au bureau, ils ne se souviennent de rien de leur vie extérieure, et lorsqu’ils rentrent chez eux, leur travail leur est totalement inconnu.

Alors que la saison 2 est en cours de diffusion (et que le niveau est encore monté d’un cran), pourquoi Severance est-elle en passe de devenir une série culte ? 

Le fond et la forme

Ce qui marque immanquablement le téléspectateur dès le premier épisode, c’est la qualité de ce show. On parle ici d’une série qui ridiculise bon nombre de longs-métrages à gros budget par son esthétique irréprochable, presque glacée, pas si loin du style d’un David Fincher, et qui propose une réalisation léchée et sans fausse note. Idéal pour épouser son style inimitable, subtil mélange des genres entre thriller psychologique, comédie absurde et dystopie.

Le scénario joue parfaitement sur ces tableaux en levant régulièrement le voile sur les nombreux mystères qui jalonnent l’intrigue. Pas besoin d’attendre la dernière seconde du dernier épisode pour encaisser une révélation, la série sait jouer avec notre intérêt. Par ailleurs, le « pitch » de départ, s’il est singulier, se révèle brillant. Pas de doute, le jeune scénariste et showrunner Dan Erickson (41 ans à peine), inconnu jusque-là, a tout d’un grand.

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Casting cinq étoiles

Et justement, qui sont les personnes impliquées sur la série ? À la production et à la réalisation, Dan Erickson est allé chercher une figure bien connue d’Hollywood, Ben Stiller, qui a fait un sacré bout de chemin depuis Mary à tout prix et Zoolander, puisqu’il est désormais impliqué sur des projets plus pointus, comme la série Escape at Dannemora. L’acteur et réalisateur est beaucoup plus que le clown de ses débuts et imprime un amour sincère du cinéma dans tous ses plans, plaçant savamment sa caméra pour nous faire ressentir l’étrangeté des situations que nous voyons.

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Mais une bonne réalisation ne sert à rien si les acteurs ne la bonifient pas. Et que dire de ce casting absolument impeccable ? Le rôle principal a été confié à Adam Scott, éternel second rôle jusque-là, qui méritait sa place au soleil tant il brillait en personnage éminemment sympathique, comme dans l’excellente Parks and Recreation.

Au rayon des têtes connues, on peut citer John Turturro, l’extraordinaire Christopher Walken et la géniale Patricia Arquette, tous les trois dans des rôles surprenants et inoubliables. Mais le vrai coup de génie tient dans ces visages moins habitués aux rôles importants, trois acteurs qui éclaboussent la série de leur talent et qu’on veut désormais voir plus souvent : Britt Lower et Zach Cherry en collègues d’Adam Scott au département du raffinement des macrodonnées, et l’épatant Tramell Tillman dans le rôle du manager navigant à la perfection entre prévenance extrême et comportement inquiétant. Un sans-faute.

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Un univers parallèle

Si Severance paraît unique dans le paysage actuel des séries TV, elle n’en est pas moins le produit d’influences parfaitement digérées par Dan Erickson et ses équipes. Premièrement, impossible de ne pas penser à Lost : Les Disparus qui avait elle-même réussi de 2004 à 2010 à accrocher des millions de téléspectateurs devant leur poste avec ses mystères en cascade. Certes la fin avait divisé, mais les créateurs de Severance ont semble-t-il un plan plus précis pour leur feuille de route.

Côté cinéma, les influences sont également prestigieuses, puisqu’on peut y voir des similitudes thématiques dans The Truman Show (de Peter Weir, 1998), Dans la peau de John Malkovich (de Spike Jonze, 1999), ou encore Eternal sunshine of the spotless mind (de Michel Gondry, 2004) ; trois films qui jouent habilement sur les questions d’identité.

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Esthétiquement, comment ne pas penser à Brazil (de Terry Gilliam, 1985) qui nous plongeait déjà dans un enfer bureaucratique inextricable, et aux extraordinaires décors du Playtime de Jacques Tati en 1967, visions prophétiques d’un monde du travail tiré tout droit du 1984 de George Orwell, jamais bien loin quand on décide de raconter une dystopie.

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Une critique acerbe du monde du travail

Les décors justement sont, dans Severance, un acteur à part entière. Presque uniformément blanc, le lieu de travail des personnages est un amalgame de salles exagérément grandes et au plafond bas, et de couloirs étroits aux très nombreux virages, donnant immanquablement l’impression d’être piégé dans un labyrinthe. vDétail amusant qui vient renforcer ce sentiment, les claviers des postes de travail ne possèdent pas de touche « echap/esc ».

Le sous-texte de Severance semble limpide : la série propose une réflexion acerbe sur le monde du travail moderne. L’idée de séparer totalement la vie professionnelle et la vie personnelle via une opération cérébrale soulève des questions philosophiques et éthiques profondes. L’obsession de la productivité, la déshumanisation des employés, l’aliénation et la manière dont certaines entreprises tentent de contrôler leurs salariés au-delà du bureau : Severance explore des thèmes éminement contemporains. 

Enfin, la série joue habilement avec nos références temporelles en mélangeant des technologies de différentes périodes, notamment les voitures ou l’informatique, participant à notre perte de repères. Et à nous rendre parfaitement accros.

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