Décryptage

50 ans de culture Hip-Hop – Partie 5 : 2013-2023

23 mai 2023

・ Par Christophe Augros

50 ans de culture Hip-Hop - Partie 5 : 2013-2023

Sur cette décennie, le rap américain disparait presque du paysage hexagonal tandis que le rap français devient la nouvelle variété, mené par une toute nouvelle génération d’artistes. Les autres disciplines de cette culture (graffiti, danse et DJ) ressurgissent étonnamment d’un passé lointain.

Changement de paysage

Avec l’éclatement des modes de distribution de la musique, le rap américain passe en digital sur les plateformes type Itunes. Sa présence sur supports physiques est de plus en plus rare. Du coup, les maisons de disques se concentrent davantage sur leurs marchés locaux. Priorité donc au rap français. Les contrats sont revus à la baisse, les objectifs aussi. Le disque d’or passe de 100 000 copies à 50 000.

New Generation Mc’s

Kaaris, Scylla, Lomepal, Orelsan (Casseurs Flowters), Niro, Médine, S.Crew, Vald, Soprano, l’Algérino, Bigflo & Oli, Nekfeu, TSR Crew, SCH, PNL, Jul, Damso, Alpha Wann, Laylow sont désormais les artistes rap ayant l’adhésion d’un large public. Kery James (dernier MC) et Booba sont toujours là ainsi que Youssoupha. Ali offre également un superbe album sur le label 45 Scientific. Exit NTM, Assassin et la génération des 90’s. Dans l’ensemble, les motivations ainsi que leurs textes et compositions n’ont plus rien à voir avec ceux de leurs ainés. La forme d’expression est bien le rap mais le fond s’est soit radicalisé soit centré sur des sujets personnels dans lesquels le public peut s’identifier. Le rap s’est uniformisé. Il est devenu la nouvelle variété. L’auto-tune corrige les erreurs. Là où un rappeur enregistrait un titre en une prise d’une voix puissante et charismatique dans les années 1980, un artiste n’a plus besoin d’avoir un bon flow ou un bon phrasé…Bref ! le rap est entré dans la paysage quotidien du grand-public.

Retour de la culture Hip-Hop

Paradoxalement, on assiste à un retour de la culture dans son ensemble. Les trains, RER, TER ou métros reprennent des couleurs après plusieurs années de tranquillité. Tags et graffitis fleurissent à nouveau dans les transports et sur les murs. DJ Snake, né en 1986, revendique ses origines hip-hop. Avant d’être DJ, il peignait des graffitis dans la rue. Les C2C, quatre fois champions du monde des DJ DMC en équipe (du jamais vu pour des Français) remettent à leur façon l’art du Djiing en haut de l’affiche et font des émules. Cette fusion entre des membres de Hocus Pocus et de Beat Torrent aboutit à la sortie de l’album Tetra qui leur rapporte 4 Victoires de la musique en 2013.

Côté danse enfin, l’évènement Juste Debout crée en 2002 connait un succès grandissant dans les années 2000 pour devenir une rencontre internationale incontournable dans les années 2010. Elle révèle de nombreux danseurs surdoués tels les Twins, les jumeaux français Larry et Laurent Bourgeois. La danse Hip-Hop atteint un niveau supérieur, bien loin de l’époque des Rock Steady Crew ou New-York City Breakers. Plus rapides, plus techniques (plus en tout en fait), les danseurs font preuve d’une créativité très impressionnante. Le Breakdance devient une discipline olympique : incroyable ! Enfin, le retour du support aussi incroyable qu’imprévisible vinyle attire à nouveau de jeunes DJ en herbe.

Conclusion et suite

50 ans après la première fête du DJ Kool Herc à New-York, un mouvement vu par beaucoup comme éphémère à son arrivée à profondément transformé monde de la musique et société. La publicité et le monde de la mode ont largement puisé dans calligraphie et look hip-hop. Cette culture multiraciale a également recomposé la société française. Le hip-hop a été un formidable ascenseur social. La danse est désormais reconnue et intègre les J.O. Les plus doués des graffiti artistes sont reconnus dans le monde entier et leurs toiles se vendent parfois à des prix à 5 ou 6 chiffres. Jonone (ancien du groupe 156), Mode 2, 3D et d’autres en sont d’illustres exemples. Quant au rap, malgré les restructurations en maisons de disques, les mutations des modes de distributions et les évolutions technologiques, il est toujours là. Point.