Il était l’un des premiers musiciens à avoir bâti sa carrière autour du synthétiseur. Evángelos Odysséas Papathanassíou, connu sous le nom de Vangelis, aura brillé comme claviériste d’Aphrodite’s Child puis en solo, en écrivant notamment les bandes originales de Blade Runner, Les Chariots de Feu et de 1492, Christophe Colomb. Pionnier de la musique électronique, il s’est éteint cette semaine, à l’âge de 79 ans.
Vangelis, l’homme derrière Rain and Tears
Mai 1968, à Paris. Cinq musiciens grecs doivent enregistrer un album en Angleterre. Mais leur avion est bloqué, en pleine période des barricades. Ils décident de graver sur place une chanson qui sera un tube en Europe quelques semaines plus tard : Rain and Tears.
Cette mélodie célèbre popularise le chanteur de la formation grecque, Demis Roussos. Et surtout, elle dévoile le talent de compositeur du claviériste, Vangelis, l’âme d’Aphrodite’s Child. Jeune surdoué de la musique, il s’est passionné à l’adolescence pour le clavier (et les timbales), a fait quelques incursions dans le jazz, avant de rencontrer ses quatre compètes.
Trois ans après Rain and Tears, Vangelis achève le dernier album d’Aphrodite’s Child, 6 6 6. Ce disque devient vite un étalon du rock progressif dans toute l’Europe, grâce aux arrangements de Vangelis. Mais déjà Demis Roussos et trois autres musiciens ont des envies d’ailleurs. Le claviériste décide donc de se lancer en solo, alors même que les premiers synthétiseurs sont installés dans les studios européens.
Une période londonienne fastueuse
Au début des années 1970, la place des synthétiseurs est encore réduite à la portion congrue dans la musique populaire. Certes George Harrison a livré un album entier enregistré sur cet instrument, mais ne connaît qu’un succès d’estime. Toutefois, Wendy Carlos a initié une génération de cinéphiles aux curieuses sonorités de la machine, avec la BO d’Orange mécanique puis plus tard de Shining. Véritable geek avant la lettre, Vangelis développe les réglages des premiers synthétiseurs, et livre sa première BO d’importance composée avec cet instrument, L’Apocalypse des animaux. En 1974, il quitte Paris pour Londres, où il définit son esthétique, entre pop et musique électronique, comme l’atteste son album Heaven and Hell, enregistré avec Jon Anderson, chanteur de Yes. Le son reconnaissable de Vangelis est dû à une volonté de reproduire avec le clavier des timbres acoustiques. Spiral et China, enregistrés durant cette époque londonienne, restent parmi ses plus grandes réussites, annonçant son futur travail pour le cinéma.
Vangelis, le compositeur des Chariots de feu et de Blade Runner
Déjà sollicité à quelques reprises dans les années 1970 pour illustrer des films et téléfilms, ainsi que des musiques de scène, le nabab du synthétiseur obtient l’Oscar de la meilleure musique en 1982, pour sa partition des Chariots de feu. Le thème du long métrage d’Hugh Hudson sera maintes fois réutilisé dans des publicités et pour des événements sportifs, en faisant le chef-d’œuvre iconique et lyrique de Vangelis.
Un an plus tard sort le film Blade Runner, qui paraît taillé pour l’écriture mélodique de Vangelis. Film de science-fiction autour de la notion d’humanité, le long métrage de Ridley Scott fait livrer à l’artiste grec une partition d’une parfaite beauté, avec un thème principal somptueux, et des morceaux restés associés à de grandes scènes, comme Tears in the Rain. Perfectionniste, le compositeur mettra 12 ans à sortir une version définitive de la bande originale.
Depuis trois décennies, Vangelis était moins productif, même si on lui doit quelques BO (Lune de Fiel, 1492 : Christophe Colomb ou Alexandre) et des albums comme Juno to Jupiter, paru l’an passé. Véritable pionnier de la musique électronique, il aura bâti sa carrière grâce à une vraie personnalité, faisant sonner les synthétiseurs d’une manière unique en son genre.
