Annoncée une première fois à l’E3 2019, la suite de The Legend of Zelda : Breath of the Wild était très attendue. The Legend of Zelda : Tears of the Kingdom est finalement sorti le 12 mai 2023 sur Nintendo Switch. Découvrez notre test complet.
Notre Test
Six ans après la révolution de sa mythique licence et du jeu vidéo en monde ouvert par la même occasion, Nintendo a décidé d’offrir une suite, une première dans l’histoire de la saga, à Breath of the Wild. Un pari qui aurait pu sembler risqué si Link n’avait pas le fameux Seal of Quality tatoué sur le thorax.
Pour rappel, The Legend of Zelda : Tears of the Kingdom est disponible depuis le 12 mai en exclusivité sur Nintendo Switch. Ce test ne comportera aucun spoiler, et l’intégralité des screenshots ont été pris dans les trois premières heures de jeu pour ne pas gâcher votre plaisir de découverte.
Une princesse ne fait pas d’effort
Commençons par la première des évidences, que toutes les joueuses et tous les joueurs de Breath of The Wild connaissent. Comme son prédécesseur, Tears of the Kingdom est un jeu d’une profondeur si abyssale qu’il serait absurde de prétendre pouvoir en juger toute la substance, même après plusieurs dizaines d’heures de jeu. Les possibilités octroyées par les nouvelles mécaniques de gameplay offrent à l’univers du jeu ce qui fait la caractéristique du notre : il est infini. Une notion dont il faut avoir conscience avant de se lancer dans l’aventure, mais qu’il est difficile d’appréhender avant d’avoir soi-même parcouru les plaines d’Hyrule, son ciel et ses profondeurs.
Quelque temps après les événements du précédent opus, on retrouve Zelda et Link dans un Château d’Hyrule libéré du joug de Ganon. Mais alors qu’ils explorent en amoureux des sous-sols dont personne ne soupçonnait l’existence, notre princesse réveille malgré elle un mal qui semblait paisiblement attendre son imprudence. La voilà emportée dans une chute vers les abysses, que Link parvient lui à éviter grâce à l’aide d’une entité qui semble venir tout droit du plus lointain passé d’Hyrule.
Rebelote, notre légendaire aventurier se réveille à la ramasse, privé de ses armes et tétons à l’air, avec pour ultime mission de retrouver la princesse et accessoirement, de sauver le monde. De quoi imaginer que le scénario nous réserve sensiblement la même histoire que d’habitude. Et si c’est globalement vrai sur le fond, la forme a de son côté été retravaillée, et nous accompagne avec beaucoup plus d’attention. D’abord, Link va devoir mener une enquête sur la disparition encore toute fraîche de Zelda, ce qui nous offre une narration bien plus directe et moins diluée dans les flashbacks.
Ensuite, un gros effort a été fait sur la mise en scène de cette narration, accompagnée par des cinématiques bien plus denses que d’habitude, avec des doublages français plutôt réussis, qui nous permettent de garder les deux pieds bien ancrés dans le récit, même en accumulant les heures de balade. Cette petite révolution ne vient cependant pas entamer certaines traditions immuables. Link est toujours muet, et vous n’échapperez pas aux bulles de dialogues pour l’ensemble des intrigues secondaires, qui offriront une jolie saveur rétro aux trentenaires, mais qui pourront rebuter les plus jeunes.
Rassurez-vous, même si la narration prend une place plus importante dans cette suite, vous n’aurez pas à attendre longtemps avant de profiter de cette sensation unique qui fait tout le sel de cette nouvelle formule des jeux Zelda, et serez rapidement lâché dans la nature, avec vos sens comme seuls outils ou presque pour vous guider. Dès le prélude, on retrouve intact ce sentiment inimitable de tout comprendre seul, alors qu’on est bel et bien guidé par un level-design prodigieux, qui nous embarque au travers de quatre premiers sanctuaires qui feront office de tutoriel pour les nouveaux pouvoirs de Link, sur lesquels nous reviendrons.
Vient ensuite le retour en Hyrule, terrain de jeu suffisamment familier pour que l’on y retrouve certaines habitudes, et suffisamment bouleversé pour qu’on garde le sentiment de la découverte. Le bruit des pas de Link dans l’herbe, le souffle du vent dans les feuilles, la chaleur du coucher de soleil… Il est impossible d’énumérer tout ce qui rend cet univers si organique qu’il offre une immersion sans pareil.
On retrouve rapidement les bons réflexes, en prenant le plus souvent possible de la hauteur pour trouver un point d’intérêt sur lequel on s’empresse d’apposer une balise de reconnaissance pour ne pas le perdre de vue. Mais sur la route de cette trouvaille, combien d’autres attireront notre attention pour nous dévier de notre route ? La moindre découverte est une aventure unique et une histoire qui vaut la peine d’être racontée. Faites le test. Comparez avec précision vos trois premières heures dans Hyrule avec un.e ami.e aventurier.e. Vous n’aurez pas le sentiment d’avoir joué au même jeu. Et pourtant.
D’autant que dans Tears of the Kingdom, toutes les joueuses et les joueurs seront confronté.e.s au même constat vertigineux. Les plaines d’Hyrule ne seront plus votre seul bac-à-sable, et il faudra aussi en explorer les cieux, au travers des îles Celestes, et les profondeurs, dont la découverte provoque sensiblement le même choc que dans le seul autre monde ouvert capable d’atteindre ce niveau d’intelligence dans sa construction, à savoir le dernier bijou de From Software Elden Ring.
Mais si la libre exploration du monde est bien au cœur de l’expérience, ce nouveau Zelda parvient toujours à proposer de nouvelles manières de jouer, grâce à un gameplay retravaillé pour pousser cette nouvelle formule révolutionnaire dans ses retranchements.
« Et si je construisais un très grand pont ? » Einstein, 2023.
Sauvé de justesse par un représentant d’une civilisation disparue, Link a récupéré un nouveau jouet dans l’opération. Son bras droit lui offre désormais quatre nouveaux pouvoirs : Rétrospective, Infiltration, Amalgame et Emprise. Le premier d’entre eux permet d’inverser le mouvement d’un objet, pour le faire revenir à son point de départ. Une merveille de développement qui offre beaucoup de possibilités, que ce soit en combat ou dans l’exploration du monde.
Infiltration permet comme son nom l’indique de s’infiltrer dans un plafond pour atteindre le niveau supérieur. De quoi profiter toujours un peu plus de la verticalité offerte par le level-design de Tears of the Kingdom, mais aussi et surtout de sortir sans frustration des immenses grottes qui pullulent partout dans les différentes régions d’Hyrule, une autre nouveauté qui vient augmenter, encore, la taille du terrain de jeu.
Comme dans le premier opus, l’objectif de Nintendo est clair : chacune de vos prises de décision doit être le départ d’une nouvelle aventure, différente de la précédente. Et pour respecter ce dogme qui relaie la routine au rang de vilain péché, oui, les armes se brisent toujours aussi rapidement. Une mécanique qui s’était révélée frustrante pour beaucoup, votre serviteur y compris, sans que l’on ne se rende compte au départ à quel point cette dernière était essentielle à l’expérience de jeu. En guise de consolation, le pouvoir Amalgame permet de modifier l’intégralité des armes et des boucliers du jeu, en y ajoutant toute sorte de composants récupérés dans la nature.
Là encore, les possibilités sont si vastes qu’il est impossible d’en voir le bout avant des centaines d’heures de jeu. Une pierre au bout d’un gros gourdin, des cornes de bokoblin sur une lance, un lance-flamme sur un bouclier… Testez tout, tout le temps, sans jamais vous restreindre à « économiser » vos plus belles inventions, tant la prochaine sera encore plus surprenante. Et si la mécanique d’Amalgame sur les armes et les boucliers pourra se montrer un peu rébarbative à la longue, elle est en revanche absolument réjouissante en ce qui concerne les flèches, qui peuvent accueillir à peu près tout et n’importe quoi pour s’améliorer, et vous offrir par la même occasion des découvertes jouissives.
Mais au rang des épiphanies vidéoludiques, rien n’arrivera à la cheville de l’Emprise, le pouvoir qui permet d’assembler des objets ensemble, à l’infini. En ajoutant aux matériaux déjà existants, et ce dès le début du jeu, des artefacts tels que des lance-flammes, des petites montgolfières ou tout simplement des roues, on se rend rapidement compte de l’immensité des possibilités qui s’offrent à nous, que ce soit pour construire un moyen de locomotion, ou simplement une structure pour nous aider à atteindre tel ou tel point d’intérêt.
De quoi provoquer un sentiment assez unique, qui représente très bien à lui seul ce que ce titre à de différent par rapport aux autres grandes réussites de l’industrie : on passe son temps à mettre au point des stratagèmes pour atteindre un objectif, en étant persuadé de ne pas être en train de faire ce que le jeu attend de nous. On triche, absolument tout le temps, et la moindre réussite nous offre la merveilleuse sensation régressive de ne pas s’être fait attraper, tout en nous donnant le sentiment d’être un ingénieur surdiplômé. Pourtant, on vient juste de passer quarante minutes à aligner bêtement des troncs d’arbres pour construire un pont aussi ridicule que gigantesque. Mais on est arrivé de l’autre côté, et personne ne nous a grondé. En maitre du monde et de la physique, on part s’occuper du problème suivant, l’égo gonflé à bloc. Quel bonheur bon sang.
Toutes ces mécaniques nous serviront à nous déplacer dans l’immensité du monde, à fracasser des camps remplis d’ennemis pour ouvrir un coffre, mais aussi à résoudre les énigmes des sanctuaires, qui font bien sûr leur retour en Hyrule. Ces puzzles, répartis partout sur la map, sont comme dans le premier opus un pur bonheur à parcourir, tant ils viennent imposer un autre rythme à votre aventure. Indispensables à votre progression, ils permettent de renforcer l’endurance et la vie de Link, pour garantir le sentiment d’avoir une progression linéaire, alors même que notre héros possède déjà tous ses pouvoirs après deux heures de jeu.
Dans Breath of The Wild, certain.e.s regrettaient que ces fameux sanctuaires aient remplacé ce qui était la signature de la licence jusqu’à sa révolution : les donjons. Et si la structure reste inchangée ici, avec toujours un petit nombre de donjons à proprement parler, ces derniers sont bien plus vastes et travaillés. Leur mise en scène et ce qu’ils apportent au scénario du jeu devraient ravir les fans de la licence, tant on y retrouve de vielles sensations, qui c’est vrai, pouvaient manquer dans le premier opus.
D’ailleurs, dans ces donjons, qui permettent de vous repérer dans l’avancée de la quête principale, comme dans le reste du jeu, notons que la difficulté a sans doute augmenté d’un cran. Et si l’on considère que BTOW était déjà un jeu difficile, Tears of the Kingdom l’est sans aucun doute un peu plus, notamment car certaines de ses mécaniques sont un peu plus compliquées à réaliser manette en main. Mais le jeu est tellement permissif, qu’il y a toujours une manière de contourner ce qui vous pose problème, sans jamais vous laisser bloqué dans la frustration. Néanmoins, bien que le titre sera un superbe spectacle à regarder pour les plus petit.e.s, elles ou ils n’iront pas bien loin sans aide.
Nintendo Switch : A link to the Past
Vous l’aurez compris, parcourir le monde d’Hyrule et son histoire, en profitant de nouvelles mécaniques de jeu absolument parfaites, est un bonheur de tous les instants. Et malgré l’enchantement provoqué à la fois par la nostalgie d’une licence aussi historique et par la hype générée par une sortie tant attendue, on ne peut pas s’empêcher de constater le retard technique qui se creuse entre la Nintendo Switch et ses concurrentes. Clipping, aliasing, chutes de framerate, la petite console hybride de 2017 a bien du mal à cacher ses limites.
Face à ce constat, il y a deux manières de voir les choses. Soit on se positionne comme un consommateur attentif, qui considère que Nintendo lui doit un hardware de meilleure qualité, au nom d’on ne sait quel principe. Soit on se positionne comme une joueuse ou un joueur expérimenté.e, qui a bien du mal à comprendre comment il est possible de fabriquer un jeu aussi performant, beau (oui), grand et intelligent, tout en le faisant tourner sur une machine de 2017. Et en découvrant les nombreux témoignages de développeurs à travers le monde, qui les uns après les autres relatent leur incompréhension devant ce qui semble être une prouesse technique exceptionnelle, on comprend rapidement que la deuxième position est plus glorieuse que la première.
La direction artistique est toujours aussi sublime et parvient à garder sa cohérence dans tous les décors du jeu, bien aidé par sa maîtrise de la physique, qui vient donner vie à chaque recoin de la map. Le tout est merveilleusement accompagné par un sound design délicieux, jusque dans ses moindres détails, et des musiques enivrantes, qui savent aussi laisser place au silence, pour nous laisser seul avec la nature.
Dans l’ensemble, The Legend of Zelda : Tears of the Kingdom est une réussite absolue, et un aboutissement pour la nouvelle formule révolutionnaire de la saga. Grâce à une narration plus fluide et à des mécaniques de gameplay qui laissent toujours autant de place à la créativité, Nintendo est parvenu à réussir l’impossible défi de faire mieux que la fois précédente. Nous voilà partis pour des centaines d’heures à parcourir un monde ouvert aussi immense que sublime, qui sera le théâtre d’aventures uniques dont nous serons les seuls auteurs.
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The Legend of Zelda : Tears of the Kingdom est disponible depuis le 12 mai 2023 sur Nintendo Switch.