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Chavirer de Lola Lafon : la loi du silence

06 novembre 2020
Par Le Cercle Littéraire
Chavirer de Lola Lafon : la loi du silence
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LE CERCLE LITTÉRAIRE – Le coup de cœur d’Evy V. (Sceaux). Cléo, 13 ans, rêve d’échapper à son morne quotidien de collégienne habitant une cité, avec des parents vivant leur vie sans trop se poser de questions, parce que « c’est comme ça et pas autrement ». La danse sera son refuge, du moins le croit-elle…

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Chavirer

Le coup de cœur de Evy V. (Sceaux)

Cléo, 13 ans, rêve d’échapper à son morne quotidien de collégienne habitant une cité, avec des parents vivant leur vie sans trop se poser de questions, parce que « c’est comme ça et pas autrement ». La danse sera son refuge, du moins le croit-elle…

ChavirerDes bleus au corps… aux bleus à l’âme

La danse, discipline hautement exigeante, implique qu’il faille s’entraîner sans relâche, et brutaliser sans cesse son corps… jusqu’à finir avec les pieds en sang, et des bleus aux cuisses suite aux portés…

Cléo endurera tout, y compris les invectives de son professeur de MJC.

Jusqu’au jour où apparaît Cathy, une dame très chic qui lui dit l’avoir repérée. Cette femme lui fait miroiter la possible délivrance d’une bourse, accordée par la Fondation Galatée aux jeunes filles les plus méritantes (triées sur le volet après un parcours de sélection).

Alors, Cléo décide d’abandonner ses cours en MJC pour se consacrer à son rêve de danseuse. Mais, elle est loin de se douter qu’elle deviendra l’objet de prédateurs sexuels : les « jurés ».

De victime à coupable ?

Assez vite, Cléo, dégoûtée et traumatisée des « séances » dans les salons feutrés de Galatée (séances suggérées subtilement, sans voyeurisme), se verra proposer une reconversion en « recruteuse de jeunes danseuses ».

Dès lors, Cléo pourra-t-elle se considérer comme blanchie de la salissure du mode de sélection de Galatée, alors qu’en réalité, elle passera du statut de victime à celui de coupable ? Pour autant, peut-on vraiment penser que Cléo soit coupable, alors qu’elle a seulement 14 ans au moment des faits, et que dans les années 1980, une mineure était rarement sensibilisée à la culture du viol et au pouvoir patriarcal ?

Oubli ou résilience ?

Dans son roman Chavirer, Lola Lafon explore les fractures du corps et de l’âme (entre honte et remords), y dissèque le mécanisme de l’emprise et du « consentement », et montre que l’aveuglement de l’entourage n’a pas permis de protéger ces jeunes filles des prédateurs.

Lola Lafon questionne sans jamais juger, en nous distillant des éléments pour y réfléchir par nous-mêmes. À travers les diverses expériences de vie et de douleur de ces danseuses (que l’on suit jusqu’à leurs 50 ans), on peut se demander si chavirer implique nécessairement que l’on coule ? Ou si au contraire, la résilience est possible ? Et si oui, comment arriver à se reconstruire (faut-il « pardonner ou oublier » ?) ? Pour tenter d’y répondre, Lola Lafon utilise la voix et les points de vue de plusieurs témoins (le kiné, l’habilleuse, le régisseur,…).

Chavirer, un roman à lire à l’aune du mouvement #MeToo, pour évaluer le chemin parcouru, depuis les années 80, concernant la violence faite aux femmes !

Parution le 19 août 2020 – 352 pages

Chavirer, Lola Lafon (Actes Sud) sur Fnac.com

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