Amélie fait sa rentrée, comme chaque année, armée de son plus beau chapeau et de sa plume érudite. Son nouveau livre, Soif, n’est pas une ode au champagne (comme elle pourrait l’écrire), mais un roman inspiré de son héros d’enfance… Jésus.
« C’est le roman de ma vie »
La romancière belge, aussi fantasque qu’excentrique, ne pouvait décemment pas avoir un ami imaginaire banal. À deux ans et demi, la jeune Amélie découvre Jésus Christ, lequel deviendra le héros de son enfance : « ça a été un coup de foudre »*. En cette rentrée littéraire 2019, elle décide de livrer à ses lecteurs sa vision personnelle du personnage biblique, son Personal Jesus, dans un « roman impossible », qui se déroule majoritairement sur la croix. « C’est le roman de ma vie » déclare-t-elle en présentant Soif.
Écrite à la première personne, cette Passion du Christ toute nothombienne s’ouvre sur le procès d’un Jésus fragilisé et retrace les événements tragiques qui en découlent. « À aucun moment je n’ai essayé de coller à une réalité historique », insiste la romancière. En s’inspirant des codes de la tragédie grecque, elle ressuscite celui qui a habité son imaginaire enfantin, suivant les passages obligés du mythe certes, mais résistant toujours à son éducation religieuse stricte : « Mon amour pour le héros Jésus était fort parce qu’il a résisté à tout ça ». Elle construit, un personnage dont la révolte arrive trop tard, alors qu’il a les mains clouées sur la croix… les yeux à la fois tournés vers sa fin proche et son passé.
« Pour éprouver la soif, il faut être vivant »
On retrouve dans ce Soif des thèmes chers à l’autrice, dont celui de la paternité. Les romans d’Amélie Nothomb sont peuplés de relations parents-enfants problématiques, mais dans ce dernier roman elle admet pousser le thème à son extrême. En témoigne la relation unissant Jésus et Dieu le père : « il y a beaucoup d’histoires de paternité et de maternité problématiques dans mes derniers romans, mais là je crois qu’on a quand même le comble… Jésus et son père, c’est vraiment la paternité ultra problématique »
Bien entendu, nul besoin d’être spécialiste des Écritures saintes ni même d’être croyant pour s’emparer de ce roman. La plume délicatement érudite et la verve colorée d’Amélie Nothomb déroulent avec talent la Passion du Christ et en font l’un des romans très attendus de cette rentrée : « J’ai écrit ce livre ingénument. Je voulais montrer l’incarnation du Christ, à quel point cet homme est incarné. Il est venu pour enseigner l’amour. Cet amour, je l’appelle soif. » Et, « pour éprouver la soif, il faut être vivant. »
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Paru le 21 août 2019 – 160 pages
* Propos d’Amélie Nothomb recueillis pendant la réunion de présentation de rentrée littéraire, organisée par les éditions Albin Michel à la Maison de l’Amérique Latine (Paris) le 27 mai 2019
Visuel d’illustration : Jean-Baptiste Mondino