Alors que le 8 mars est célébrée la Journée internationale des droits des Femmes, on vous propose de piocher dans vos classiques et de (re)lire Le Carnet d’or qui fit de Doris Lessing l’une des icônes féministes du siècle dernier, même si l’auteure s’en est toujours défendue. Son héroïne, pourtant, demeure un parangon de liberté et un exemple à suivre.
Pourquoi ce roman est culte ?
Lorsque paraît Le Carnet d’or en 1962, Doris Lessing ignore qu’elle vient de signer là son chef d’œuvre. Pour elle, il s’agissait surtout de coucher sur le papier tous ses espoirs politiques déçus, elle la femme engagée aux aspirations révolutionnaires. Elle s’est fabriquée un alter-ego, Anna Wulf (inspirée de Virginia Woolf, l’une de ses auteures de prédilection), une jeune femme qui écrit et se retrouve confrontée au syndrome de la page blanche. Ce qui fait la particularité du roman, ce n’est pas tant l’histoire en elle-même que sa structure. En effet, Lessing s’est essayée à une technique de défragmentation, entre style sophistiqué, roman dans le roman, collages, digressions, extraits de presse, journal intime, autoréférences… technique qui a renouvelé le genre. En effet, Anna Wulf écrit sur quatre cahiers de couleurs différentes où elle couche ses idées : noir pour sa vie d’écrivain, rouge pour la politique, jaune pour la fiction et bleu pour l’introspection. Au final, l’ensemble des cahiers revêt la couleur or et forme le récit proprement dit. Une déstructuration qui a fait du Carnet d’or un succès public et critique, obtenant le Prix Médicis étranger lors de sa parution en France en 1976 et qui fait partie des cent meilleurs romans de langue anglaise d’après le Time.
Pourquoi ce roman est d’actualité ?
Quand Le Carnet d’or est édité, on compare très vite Doris Lessing à une Simone de Beauvoir britannique, tant le personnage d’Anna Wulf s’inscrit dans une mouvance féministe éprise de liberté et fuyant les conventions. Un rapprochement dont s’est pourtant toujours défendue la romancière. Rarement un roman mettait autant en avant et avec autant de détails intimes la psyché féminine, ses tourments, ses aspirations, ses désirs, ses engagements, ses fantasmes. « J’ai toujours voulu décrire mon époque. Mais cette tentative suppose que ce filtre que constitue le regard d’une femme sur le monde, ait la même valeur que le filtre masculin » dira-t-elle quelques années plus tard. À l’heure où l’égalité homme-femme est toujours un débat, où le mouvement #metoo a remis sur l’échiquier les revendications féminines jusqu’à les faire gronder dans le monde entier, où des gouvernements (comme celui du Brésil) tentent de remettre l’hégémonie masculine au centre de tout, Le Carnet d’or est un étendard à lui seul. Celui d’une femme qui revendique sa liberté de penser et d’agir, celui d’inspirer ses lectrices à la suivre et celui d’écrire son propre carnet d’or, qui servira lui-même de modèle…
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Parution originale en 1962
Traduit de l’anglais par Marianne Véron
Le Carnet d’or, Doris Lessing (Le Livre de Poche) sur Fnac.com
Aller + loin : 1 mois / 1 classique, la bibliothèque idéale
Photo d’illustration : Roger Mayne/National Portrait Gallery, London
