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Le fou Hallier, 20 ans déjà : portrait de Jean-Edern Hallier

23 mars 2017
Par Melanie C.
Le fou Hallier, 20 ans déjà : portrait de Jean-Edern Hallier
©dr

En 1997 disparaissait un trublion des lettres françaises. Jean-Edern, foulard au cou, voix grave, plume acérée, est devenue une figure légendaire, le dernier vrai transgressif, capable du meilleur, et surtout du pire. Vingt ans après sa mort, retour sur l’itinéraire d’un dandy provocateur.

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Une vie de controverse

« Le malheur des procès que l’on me fait c’est que ce sont des faux procès ; j’ai commis beaucoup plus de fautes que ce que vous pouvez imaginer, mais pas celles qu’on me reproche… » Ainsi a été l’existence médiatique de Jean-Edern Hallier, qui a fait de sa vie une œuvre romanesque (à retrouver dans la biographie Jean-Edern Hallier, l’idiot insaisissable signée Jean-Claude Lamy). Né borgne, fils d’un général, celui qui se surnommera lui-même le « Chateaubriand de l’ordure » avait pourtant bien commencé, s’intégrant au cours des années 1950 au monde des lettres. Avec Jean-René Huguenin et Philippe Sollers, il a ainsi créé Tel Quel, une revue d’avant-garde ayant défendu le Nouveau Roman, mais dont il s’éloigna bien vite.

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Frustration

Il y a une faille, chez ce grand esprit diplômé d’Oxford et terriblement ambitieux : son échec à imposer définitivement une œuvre. Ni Les Aventures d’une jeune fille, qu’Hallier destinait au Médicis, ni Le Grand Ecrivain ou La Cause des peuples, qu’il aurait bien vus remporter le Goncourt, n’ont reçu ces prestigieuses récompenses. De là va naître une certaine rancœur à l’égard des nobliaux de l’aristocratie littéraire, qui prendra la forme de nombreuses piques cinglantes tout au long de sa carrière. Pour autant, comme romancier, Jean-Edern Hallier ne sera pas avare d’œuvres talentueuses et stylisées, comme Fin de siècle ou Le Premier qui dort réveille l’autre, parus dans les années 1970.

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Pamphlétaire

Romancier, essayiste, diariste (voir Carnets impudiques), c’est véritablement en tant que polémiste qu’il s’épanouit, installant son personnage de dandy gouailleur dans le paysage audiovisuel français. Outre son célèbre pamphlet à l’égard de Valéry Giscard d’Estaing (Lette ouverte au colin froid), celui rédigé contre François Mitterrand alors que celui-ci l’avait trahi et mis sur écoute (L’Honneur perdu de François Mitterrand), Jean-Edern Hallier n’a jamais hésité à mettre en avant une verve collective.

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Aréopage d’héritiers

C’est ce qui l’a amené à fonder (avec Bernard Thomas) en 1969 L’Idiot International, un journal satirique à l’origine ancré à gauche qui disparait dès 1972. En 1989, Jean-Edern le relance, s’entourant de jeunes plumes dynamiques qui feront parler d’elles : Houellebecq, Nabe, Beigbeder, Taddeï, Besson, Dantzig, Sportès… Durant les cinq années qui suivent, il anime donc cette joyeuse bande hétéroclite réunie par l’amour de la littérature et un certain goût pour l’irrévérence. En 1997, trois ans après la fermeture de L’Idiot, il décède dans de troubles circonstances alors qu’il circule à vélo à Deauville. Et si aucuns de ses anciens « collègues » n’a pris la place qu’il tenait dans le monde médiatico-littéraire, nombre d’écrivains et polémistes peuvent se réclamer du sillon qu’il a lui-même creusé durant trente ans.

Article rédigé par
Melanie C.
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