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Ludovico Einaudi et la transe

03 juin 2015
Par Frédérique
Ludovico Einaudi et la transe
©dr

Que ceux qui associent Ludovico Einaudi à des solos de piano « ambient » et minimalistes abandonnent ici tous leurs a priori : le musicen italien donne dans la transe ! Celle de l’Italie du sud, la tarentelle ou pizzica comme on dit là-bas, dans le Salento. Et croyez-moi, ça déménage !

Que ceux qui associent Ludovico Einaudi à des solos de piano « ambients » et minimalistes abandonnent ici tous leurs a priori : le musicien italien donne dans la transe ! Celle de l’Italie du sud, la tarentelle ou pizzica comme on dit là-bas, dans le Salento. Et croyez-moi, ça déménage !

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Les habitués de nos pages ont peut-être lu la chronique de Julien, sur la tarentelle. Il y présente notamment le Festival La Notte della tarenta (La nuit de la tarentule), qui a lieu chaque été dans les Pouilles (extrême sud de l’Italie). Cette manifestation et la fondation qui la produit visent à maintenir et valoriser la culture régionale dont la pizzica, cette danse frénétique sensée guérir des piqures de tarentule, est un peu le symbole. Lors de la dernière soirée, carte blanche est donnée à un musicien, qui, à la tête de l’orchestre du festival, livre sa vision de la tarentelle. Le but n’étant pas de coller au plus près du sujet, mais au contraire de l’élargir, dans la créativité et la diversité. Après Joe Zawinul en 2000 et précédent Goran Bregovic invité en 2012, l’hôte de 2010 et 2011 était Ludovico Einaudi. Ce piémontais élève de Luciano Berio ne s’est pas privé pour métisser ces musiques proches de la transe (comme en témoigne le très beau clip). Et pour ce faire, il a invité de nombreux artistes de tous horizons géographiques et musicaux. The Tarenta Project, album fait de live et de studio, synthétise ce travail et livre une facette méconnue de Ludovico Einaudi.

                                    

Sous la férule du musicien, les tarentelles prennent des couleurs africaines avec Ballaké Sissoko (Tarenta, Nazzu Nazzu, Tonio Rima/Rirollada). Le joueur de Kora, coutumié des projets transverses, est une vielle connaissance puisqu’il a déjà collaboré en 2003 avec Einaudi pour l’album Diario Mali. Les arrangements flirtent aussi avec l’Orient quand interviennent le kamenche de Cafer Nazlibas et le darbuka de Oray Yay (Nar I-Se). En tout, plus d’une vingtaine de musiciens, instrumentistes et chanteurs, classiques ou traditionnels, ont participé au projet. Mercan Dede aux percussions et échantillonnages et Justin Adams à la guitare électrique contribuent à ancrer ces arrangements dans un 21e siècle cosmopolite et bigarré.

festival-notte della-tarenta

Ludovico Einaudi revient parfois vers ce que l’on connait comme sa patte personnelle : des intro au piano minimalistes, qu’il déploie ensuite grâce au chœur et à l’orchestre, leur donnant ainsi un souffle épique. À bien y regarder, la musique de Ludovico Einaudi n’est pas complètement étrangère à la tarentelle : les deux ont en commun ce côté répétitif, planant pour l’une et conduisant à la transe pour l’autre… Dans ces collages et ces contrastes entre la musique âpre voire parfois brutale du Salento et les arrangements riches et sophistiqués du compositeur, on se dit aussi que le maitre Luciano Berio, dont Einaudi semblait s’être éloigné depuis longtemps, n’est en fait pas si loin que cela. On pense à Voci, Coro, ou aux Folk Songs

Ludovico Einaudi n’est donc pas seulement ce compositeur « d’easy listening » dont les titres sont utilisés comme BO de films ou de publicités, il est aussi un compositeur et chef d’orchestre créatif et original, qui s’est laissé « prendre » par la frénésie de la tarentelle ! Entrez dans la danse !

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Frédérique
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