Hollywood avait tort. Vous croyez vraiment que si les extraterrestres nous attaquent ils nous laisseront une chance de gagner ? Ils connaissent notre manière de penser et ils savent comment nous exterminer. A l’issue de la 1e vague, l’obscurité fut. A la 2e, seuls les chanceux réchappèrent. La 3e, elle ne laissa en vie que les malchanceux. Et dans le sillage de la 4e, une unique règle devint loi universelle : ne faites confiance à personne.
À moins de passer tout le printemps dans un abri antinucléaire, il va être difficile d’ignorer la parution de La 5e Vague. Bientôt toute la presse va en parler comme du nouveau Hunger Games.
Cette fois au moins, la comparaison aura du sens car j’aimerais bien un jour que l’on m’explique pourquoi Hunger Games a été si souvent comparé à Twilight. Parce qu’il s’agissait des deux seuls titres jeunes adultes que les journalistes connaissaient peut-être ?
Une adaptatation au cinéma
Enfin bref, passons. Cette fois, la raison de cet intérêt journalistique est simple : les droits cinématographiques de la trilogie ont été achetés par Tobey Maguire (surtout connu pour son rôle de Spider-Man mais de plus producteur de films), Sony Pictures et GK Films (World War Z, Argo, Dark Shadows…). Pourtant l’achat des droits cinématographiques de toutes les nouvelles séries jeunes adultes à paraître est devenu tellement répandu que cela ne devrait plus nous interpeller même quand les noms sont prestigieux. Alors qu’est qui suscite un tel engouement autour de la parution du nouveau livre de Rick Yancey ? Tout simplement l’enthousiasme de la majorité des agents littéraires américains qui se sont accordés à présenter la trilogie comme l’un des meilleurs projets du moment. Le résultat a été immédiat : à l’international, le manuscrit de La 5e Vague a donné lieu à des enchères historiques pour une trilogie jeunes adultes.
Des livres
En France c’est la collection R qui publiera La 5e Vague. La collection est toujours une des rares à faire l’effort d’offrir au public français une publication simultanée quand il s’agit de la parution d’un livre qui représente un évènement international. Cette fois encore, les éditions Robert Laffont ont bien l’intention d’offrir à cette excellente fresque post-apocalyptique un lancement exceptionnel.
Jusque-là, Rick Yancey était surtout connu pour Les extraordinaires aventures d’Alfred Kropp et pour The Monstrumologist, une série horrifique jamais parue en France. La 5e Vague s’adresse cette fois à un public nettement plus âgé. D’ailleurs, le livre aurait tout à fait sa place dans le rayon Science-fiction. Ce sont des propos du physicien Stephen Hawking qui ont inspiré Rick Yancey. Parce qu’après tout, si les extraterrestres nous rendent visite un jour, rien ne nous indique qu’ils le feraient dans un but purement amical. Et même si leurs intentions étaient bonnes, Stephen Hawking estime que le résultat serait semblable à celui produit quand Christophe Colomb a débarqué en Amérique, c’est-à-dire un résultat pas vraiment positif pour les indiens.
Des extraterrestres pas vraiment sympathiques
De toute façon, dans La 5e Vague les extraterrestres sont absolument antipathiques. Ils sont surtout nettement plus intelligents et ils disposent donc d’une avance technologique considérable. Et puis surtout, qu’elle arrogance de notre part d’imaginer qu’ils pourraient penser comme nous ! Vous croyez vraiment que si les aliens nous attaquaient, ils nous laisseraient une chance de gagner ? A part dans les films hollywoodiens, ils n’y aura pas de bataille héroïque où l’humanité s’unit contre l’envahisseur et gagne de justesse à la fin. Et ni les Avengers ni le Doctor Who ne viendront nous sauver à la dernière minute.
Dans La 5e Vague, ils nous observent depuis longtemps et ils ont méthodiquement préparé les étapes de notre extermination. Tout a commencé avec une impulsion électromagnétique pour mettre tous nos appareils hors service. Ce n’était que la première vague. La deuxième fut encore plus mortelle et raya de la carte toutes les villes côtières. Quand à la troisième elle consista simplement à créer une pandémie. La quatrième apporta le silence.
L’histoire
C’est à l’aube de la cinquième vague que commence le récit de Rick Yancey. Dès les premières scènes d’ouverture haletantes, il donne le ton. On y découvre Cassie, une jeune fille qui s’efforce de survivre dans ce monde post-apocalyptique où elle ne peut plus avoir confiance en personne. Tout au long de cette aventure épique, Cassie se révélera être une héroïne forte et courageuse. L’invasion a obligé la jeune fille insouciante à devenir responsable et combative. Après les vagues, seuls les plus déterminés ont leur chance. Et Cassie ignore encore ce que sera la cinquième vague.
Cette perte d’innocence est le sujet principal de La 5e Vague. Et pas seulement pour Cassie. Car qu’est ce qui fait notre humanité ? La confiance, l’entraide, l’espoir ? Que deviennent les hommes si on leur retire cela ? Cassie, elle, devra faire des choix entre confiance et paranoïa, entre courage et désespoir.
Un récit choral
Elle ne sera pas la seule narratrice. L’intrigue de Rick Yancey croise les points de vue de plusieurs personnages qui seront amenés à croiser le chemin de Cassie (où qui l’on déjà fait). Chacun de ces personnages a une importance capitale à sa manière. Ce n’est qu’à la fin que l’on découvre à quel point leurs destins et leurs parcours sont imbriqués, et surtout, à quel point l’intrigue de Rick Yancey à été pensée dans les moindres détails bien au delà de ce premier tome. Il faut d’ailleurs beaucoup de talent pour offrir une vraie fin à un premier tome. Généralement les auteurs s’en servent pour développer leur univers et leurs personnages au risque de laisser des lecteurs sur leur faim. Mais pas Rick Yancey.
Pour en revenir au récit à plusieurs voix, il donne beaucoup d’énergie à l’histoire. Même si l’intrigue ne manque pas de dynamisme, le découpage des chapitres est percutant et original. Son écriture est très cinématographique. Outre une ouverture très marquante, il utilise beaucoup de flashbacks pour mettre en perspective ce monde inhospitalier et sans espoir, et l’univers douillet et protégé dans lequel les personnages vivaient sans s’en rendre compte avant les premières vagues.
Rythme, originalité et richesse du contenu
Tous ces éléments concourent à donner à La 5e Vague un rythme et une originalité impressionnants. C’est bien plus qu’un thriller apocalyptique, c’est à la fois un hommage aux classiques de la science-fiction et une modernisation réaliste et exaltante où la manipulation se joue sur plusieurs degrés. Car après tout, La 5e Vague vague n’est pas le seul roman à imaginer un monde ravagé par les extraterrestres (ou les zombies, ne soyons pas sectaires). D’ailleurs tant qu’on ne la pas lu, le roman de Rick Yancey n’a pas de raison de se démarquer plus qu’un autre.
Surtout alors que Les âmes vagabondes de Stephenie Meyer sort sur les écrans (avec un succès assez mitigé apparemment). Sauf que l’histoire de Stephenie Meyer est une histoire d’amour sur fond de fin du Monde alors que La 5e Vague raconte une fin de l’humanité plausible et la façon dont une poignée de survivants s’efforce de continuer à avancer en espérant que leurs actes ne font pas partie des plans de cet ennemi qui a eu des milliers d’années pour nous observer et anticiper nos réactions dans les moindres détails. Un ennemi d’autant plus puissant qu’il n’a toujours pas dévoilé son vrai visage.
En jouant avec l’idée que l’humanité se fait des extraterrestres, Rick Yancey place non seulement la barre très haut mais il signe effectivement l’un des meilleurs romans de l’année. Bien au-delà de tout ce qu’il avait écrit jusqu’à maintenant.
La 5e Vague n’est pas seulement un page-turner redoutable et efficace, c’est un vrai bon roman accessible et fascinant de la première à la dernière ligne.
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