Les éditions du Cavalier Bleu font paraître ce jeudi 26 mai la première étude d’ampleur consacrée à la littérature lesbienne française, Écrire à l’encre violette. L’occasion de (re)découvrir la richesse d’un corpus encore largement méconnu.
C’est à un parcours chronologique dans les méandres des littératures qui mettent en scène et en récit les amours lesbiennes qu’invitent les chercheuses Aurore Turbiau, Margot Lachkar, Camille Islert, Manon Berthier et Alexandre Antolin dans Écrire à l’encre violette.
Et mettre en scène le lesbianisme en littérature a longtemps condamné les autrices au silence : il faut attendre le début du XXe siècle pour que soient publiées des œuvres ouvertement lesbiennes. Autant que les amours qui se vivent encore souvent dans la clandestinité, ce sont donc logiquement les thèmes de l’ailleurs et du secret qui traversent ces textes.
Mais l’énergique militantisme féministe et lesbien a rapidement rendu possible le foisonnement de cette littérature, qui s’est alors (re)construite autour des enjeux de transmission de la (contre-)culture lesbienne. À mesure que les structures militantes se mettaient en place et s’organisaient, les textes semblent ainsi avoir gagné en intensité politique.
Dans une démarche aussi thématique qu’historique, Écrire à l’encre violette fait aussi apparaître que les littératures lesbiennes sont bien loin de former un ensemble uniforme. Elles s’emparent en effet de tous les genres – en témoignent le chapitre consacré aux littératures lesbiennes de l’imaginaire et les réflexions plus ponctuelles sur le roman policier, ou sur les romances, par exemple.
Surtout, ce texte informé et intelligent permet de mettre en valeur le dynamisme contemporain de ces littératures, et les enjeux qui les traversent. Les grands noms – Renée Vivien, Colette, Simone de Beauvoir, Violette Leduc, Michèle Causse, ou encore Monique Wittig – côtoient ainsi les autrices contemporaines que sont Fatima Daas, Pauline Delabroy-Allard, Wendy Delorme ou Virginie Despentes.
À l’image de celles qui les ont précédées, les littératures lesbiennes contemporaines, aussi aventureuses que conscientes de leur histoire, se révèlent en mesure de bousculer les normes et les cadres – et d’ouvrir de nouvelles perspectives littéraires et politiques.
En invitant à (re)découvrir ces littératures, Écrire à l’encre violette permet aussi d’envisager leur diversité et leurs spécificités. Préfacé par Suzette Robichon et postfacé par Catherine Gonnard et Élisabeth Lebovici, cette ample étude s’impose comme une référence indispensable.
Écrire à l’encre violette. Littératures lesbiennes en France de 1900 à nos jours, d’Aurore Turbiau, Margot Lachkar, Camille Islert, Manon Berthier et Alexandre Antolin, Le Cavalier Bleu, 292 p., 20 €. En librairie depuis le 26/05/2022.