L’entreprise spécialisée a accepté plusieurs restrictions pour son outil dans le cadre d’un règlement judiciaire. Elle ne pourra notamment plus le vendre aux sociétés privées.
Critiquée par rapport à sa base de données dans plusieurs pays, y compris en Europe, Clearview AI vient de conclure un accord mettant un terme à une procédure judiciaire entamée il y a deux ans. En mai 2020, l’Union américaine pour les libertés civiles (ACLU) et d’autres associations avaient intenté une action en justice contre cette entreprise spécialisée dans la reconnaissance faciale. Elle l’accusait d’avoir violé une loi de l’Illinois sur la confidentialité des données biométriques à plusieurs reprises.
Adopté en 2008, ce texte exige que les sociétés collectant, enregistrant ou obtenant l’identifiant biométrique (empreinte numérique, scan de l’iris…) d’un résident de l’État informent d’abord cette personne et obtiennent son consentement écrit. Ayant construit sa base de données en aspirant des milliards d’images de personnes sur Internet sans les informer et sans leur accord, Clearview AI ne l’a pas respecté. Avec le règlement conclu le 9 mai, l’entreprise a accepté plusieurs restrictions concernant son outil de reconnaissance faciale. Elles garantissent qu’elle est en accord avec la loi de l’État.
Des restrictions bien accueillies
Le règlement, qui deviendra effectif une fois approuvé par le tribunal, limite l’utilisation de la base de données de Clearview AI aux États-Unis. Pour commencer, l’entreprise n’est plus autorisée à accorder un accès payant ou gratuit à sa base à des entités privées dans l’ensemble du pays. Cela inclut des entreprises privées et des particuliers. Il lui est également interdit de la rendre accessible aux entités gouvernementales et privées de l’Illinois pendant cinq ans. Les forces de l’ordre de l’État ne pourront ainsi plus utiliser la base de données de la société.
Clearview AI devra, en outre, conserver un formulaire de demande de désinscription sur son site Web pour les résidents de l’Illinois. Il leur permettra de s’assurer que leurs données faciales ne pourront pas apparaître dans les résultats de recherche de l’entreprise, mais aussi pour les utilisateurs au sein des forces de l’ordre. La firme va d’ailleurs investir 50 000 dollars pour payer des publicités sur Internet faisant la promotion de ce mécanisme de désinscription.
Malgré ces restrictions, le règlement a été bien accueilli par la firme : « Cet accord est une immense victoire pour Clearview AI. Cela ne change rien à son modèle économique actuel », a déclaré l’avocat Lee Wolosky au nom de la société auprès de l’AFP. Il a assuré qu’elle allait continuer à étendre son offre commerciale en accord avec la loi. Pour l’ACLU, le règlement « démontre que des lois strictes sur la confidentialité peuvent fournir de réelles protections contre les abus ». L’action en justice avait en effet été lancée au nom de groupes représentant des survivants de violences domestiques et d’agressions sexuelles, des immigrants sans papiers, des travailleurs du sexe actuels et anciens et d’autres communautés vulnérables. Des personnes particulièrement touchées par la surveillance à l’aide de la reconnaissance faciale.