Qu’ils soient créateurs de contenus ou simples utilisateurs, de plus en plus de professeurs de tous niveaux utilisent la plateforme TikTok au quotidien. Pédagogique ou ludique, certains y partagent du contenu en ligne pendant que d’autres s’appuient sur certaines vidéos en classe pour attiser la curiosité de leurs élèves. Une enseignante témoigne.
« Comme beaucoup, au début, je pensais que TikTok était uniquement une plateforme pour enfants. Qu’il n’y avait que des défis et challenges pas forcément très intéressants ou des vidéos d’ados qui dansent. » Manon, 26 ans, est professeure de mathématiques dans plusieurs collèges de la métropole lilloise. Elle fait surtout partie de cette nouvelle génération de professeurs qui n’hésitent plus à intégrer l’application TikTok dans le déroulé de leurs cours.
« J’ai finalement installé l’application pendant le second confinement — pour dédramatiser la chose — et j’ai été surprise de comment elle m’a très vite cernée. En l’espace de quelques heures, l’algorithme me proposait déjà plein de vidéos d’autres professeurs, notamment scientifiques. Forcément, cela m’a inspirée pour l’écriture et l’organisation de mes cours », raconte l’enseignante qui confirme diffuser de plus en plus de TikTok à ses élèves.
Des professeurs toujours plus populaires
En effet, au sein de l’Éducation nationale, ils sont de plus en plus nombreux à s’emparer de l’application pour partager des contenus, qu’ils soient à destination des élèves ou de leurs collègues. Certains sont même devenus des « stars » sur la plateforme, comme Estelle Kollar, aka @wonderwomath, professeur de collège à Nancy qui cumule aujourd’hui plus de 360 000 abonnées. « J’ai eu 100 000 abonnés en trois jours », racontait-elle d’ailleurs en novembre dernier à l’Est républicain. Autre exemple : Romain Picot, @bboy.rominou, professeur d’EPS, s’approche aujourd’hui du million d’abonnés et a même eu droit à un reportage sur Brut après avoir été connu pour avoir amené ses élèves au casting de La France a un incroyable talent. Aujourd’hui, la présence des enseignants sur TikTok est très diversifiée : toutes les matières et niveaux scolaires sont représentés.
Face à la baisse d’attention des élèves
Avec la multiplication des projecteurs et des tableaux connectés en classe, l’utilisation de contenu vidéo en cours n’est pas nouvelle. Mais TikTok semble apporter un vent de fraîcheur en classe. « Dès mes premières rentrées, il y a cinq ans, j’ai commencé à diffuser des vidéos YouTube en classe. À l’époque, il n’en fallait pas plus pour que cela passionne les élèves. Aujourd’hui, mes élèves trouvent que ce type de vidéo est trop longue, trop scolaire… Tout l’inverse de TikTok ! », remarque Manon, alors qu’elle montre une vidéo de danse lui ayant permis de vulgariser les différents types de symétrie en géométrie. La baisse d’attention des élèves a en effet été remarquée par l’Éducation nationale, à tel point que cette dernière organise désormais des séminaires pour former ses professeurs à la prendre en compte. « Aujourd’hui, je préfère diffuser une vidéo TikTok et la mettre en pause le temps que les élèves l’assimilent, plutôt que de distribuer des polycopiés. Au pire, on la repasse en boucle jusqu’à ce que la notion soit comprise », reprend la professeure de mathématiques.
Mais est-ce que ça marche ? Il suffit de discuter avec ses élèves entre deux cours pour s’en convaincre. « Moi, j’aime bien, car c’est plus ludique. Parfois on dit même à la prof : on l’a déjà vu ce TikTok ! C’est chouette, car c’est la preuve qu’on ne regarde pas que des vidéos débiles chez nous », souffle Adnan, élève de quatrième. « Et puis, ça change des autres cours où on ne fait que lire des feuilles et faire des exercices », renchérit Leeloo, sa voisine de table. « Il ne faut pas oublier qu’eux aussi sont consommateurs de ce type de contenu, ils en sont même la cible, c’est pour ça qu’ils apprécient », complète leur professeure.
Si l’utilisation de TikTok dans sa salle de classe ne rencontre pas spécialement de réticence de la part du personnel enseignant ou des parents d’élèves, elle se heurte néanmoins à un souci : le réseau informatique des établissements scolaires qui souvent bloque par défaut l’application et ses sites Web. « J’ai dû demander qu’elle soit débloquée sur mon poste de travail, s’amuse la Lilloise, avant de replonger dans l’application. C’est pour préparer mes prochains cours ! »