Décryptage

Comment Oshi No Ko a marqué toute une génération

14 septembre 2025
Par Vincent Bresson
Le manga “Oshi No Ko” a été adapté en anime et en série live action.
Le manga “Oshi No Ko” a été adapté en anime et en série live action. ©Animation Digital Network

Contre toute attente, le manga Oshi No Ko a conquis la planète en dévoilant les dérives du show-business japonais. L’œuvre, qui s’achèvera en fin d’année, a bien été aidée par un anime de haute volée.

À sa sortie en 2020, difficile de prédire un succès planétaire au manga Oshi No Ko. Après tout, qui pourrait s’intéresser aux dessous du monde impitoyable du show-business japonais ? D’autant plus que l’histoire est elle-même un peu tirée par les cheveux. Grosso modo : après l’assassinat d’une célèbre idole japonaise par un fan obsédé, ses deux enfants – réincarnations de personnes l’ayant connue dans leur vie précédente – cherchent à comprendre les secrets entourant sa mort.

L’univers des idoles reste, pour le public occidental, un milieu rarement exploré de l’intérieur. Et le lecteur doit d’autant plus s’accrocher qu’Oshi No Ko est à la croisée de l’idol drama, du fantastique, de la critique sociétale et de l’enquête policière. Un inventaire à la Prévert qui a de quoi rebuter – ou rendre accro. La conclusion du manga sera dévoilée en novembre, mais l’œuvre est déjà devenue emblématique.

Casser les codes

Demon Slayer, Jujutsu Kaisen, L’attaque des titans… La concurrence était féroce à son lancement, mais Oshi No Ko est l’un des mangas les plus vendus de sa génération. Au Japon, il est même le quatrième le plus écoulé de l’année 2023 grâce à une promesse : briser les codes et mélanger les genres, quitte à dérouter.

Les éléments surnaturels, comme la réincarnation, se superposent vite à une intrigue réaliste. La pression sociale et le culte des célébrités sont, au Japon, des réalités bien palpables. Se risquer à présenter les dessous peu reluisants de cette fabrique de stars était transgressif, et donc potentiellement bankable.

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Oshi No Ko s’est donc appuyé sur une grande profondeur pour accrocher le lecteur autour d’un univers fait de paillettes qui ne lui est pas familier. Mais les thèmes abordés, eux, se révèlent finalement assez universels. La recherche de gloire, la beauté et la fragilité des liens familiaux, la toxicité des réseaux sociaux et les relations amicales feintes ne sont pas seulement propres à l’industrie japonaise du divertissement, mais peuvent être transposées à notre propre société, voire à nos propres vies.

Et si ce pari s’est révélé gagnant, c’est aussi parce qu’il épouse les tendances de l’époque. Le cadre rigide de l’univers du manga, dans lequel les auteurs sont souvent invités à respecter une ligne éditoriale stricte, est de plus en plus transgressé.

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Les récents succès de Frieren, Chainsaw Man ou Sakamoto Days dessinent une voie qu’Aka Akasaka, le scénariste, n’a pas hésité à emprunter. La réputation de l’auteur, également derrière le succès de Kaguya-sama: Love is War, a d’ailleurs bien aidé le manga à faire parler de lui à son lancement.

Le buzz de l’anime

Bien consciente de la place prise par les plateformes de streaming dans nos vies, l’industrie du manga mise plus que jamais sur ses anime pour faire décoller ses ventes papier. Et Oshi No Ko ne fait pas exception à la règle. L’attention portée à son adaptation sur petit écran est d’ailleurs l’une des clés de son succès.

Le premier buzz autour de l’anime a de quoi surprendre. Ce n’est ni sa patte graphique, ni même le contenu de l’œuvre qui ont propulsé le titre en haut de l’affiche… mais son opening. Les génériques d’ouverture et leurs chansons sont particulièrement appréciés par les fans. Un manga sur les dessous du business de l’industrie musicale se devait forcément d’être à la hauteur.

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La production a donc décidé de donner le micro à Yaosobi. Si le groupe n’évoque pas grand-chose au public français, ce duo de J-pop est très célèbre au Japon. Leur chanson, Idol, explose avant même la sortie officielle de l’anime. Elle devient si virale qu’elle se transforme en défi TikTok. Deux ans plus tard, elle cumule plus de 600 millions de vues sur YouTube.

De nombreux internautes finissent même par découvrir l’anime par sa chanson. Pour parachever ce buzz, cette adaptation continue de bousculer son petit monde en proposant un premier épisode de la durée d’un film. Une heure vingt durant lesquelles les auteurs cachent l’intrigue principale, avant de la poursuivre dans un format plus classique, autour de 25 minutes par épisode.

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Oshi No Ko est passé du statut de curiosité éditoriale à celui de référence générationnelle en cinq ans. Ses étoiles s’éteindront en décembre avec la parution du 16e tome, mais elles continueront de briller longtemps dans l’imaginaire des mordus de bande dessinée et d’animation japonaise. Parfois, les plus beaux succès naissent des paris les plus audacieux.

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