
C’est l’histoire d’un scandale qui a bouleversé l’Angleterre. Saluée par la critique, cette œuvre donne une voix aux oubliés de la bureaucratie.
C’est la série à ne pas manquer. Diffusée le 27 mars sur Arte et disponible en replay jusqu’au 24 juin, Mr Bates contre le Post Office a été saluée par la critique lors de sa sortie sur ITV en janvier 2024. Cette production britannique en quatre épisodes retrace l’un des plus grands scandales judiciaires de l’histoire contemporaine du Royaume-Uni.
Plus de 700 sous-postiers, accusés à tort de détournements de fonds, se sont vus ruinés, licenciés, parfois emprisonnés ou poussés au suicide, à cause d’un logiciel informatique défectueux, Horizon, imposé par la Poste britannique au début des années 2000.
Un logiciel défaillant et des vies brisées
Le scandale éclate en 2003, mais les premières alertes remontent à l’introduction du système censé moderniser les comptes des bureaux de poste. En réalité, le programme multiplie les erreurs : des milliers de livres sterling disparaissent sans explication.

Pourtant, la direction refuse d’admettre toute faille. « Condamnés sans preuve, sur base de chiffres erronés, rappelle La Libre, certains ont purgé des peines de prison et tous ont vu leur nom et leur réputation ruinés. »
L’histoire de Jo Hamilton, de Lee Castleton ou d’Alan Bates incarne la mécanique d’un cauchemar kafkaïen : « Des peines de prison, des ruines et des suicides », résume Xavier Leherpeur sur France Inter, qui évoque « un David contre Goliath version moderne ».

C’est justement Alan Bates, sous-postier gallois, qui initie le combat. Incarné par Toby Jones, il réunit en 2009 d’autres victimes pour monter une action en justice. Le scandale, peu médiatisé jusque-là, gagne en visibilité avec la série. « Cas rare de conséquence directe de la diffusion d’une œuvre de fiction, souligne Télérama, le succès de cette minisérie sur la BBC a permis d’améliorer l’indemnisation des victimes du scandale. »
Une série engagée
Le show n’élude rien : ni l’ampleur du désastre, ni l’arrogance bureaucratique qui l’a rendu possible. Gwyneth Hughes (au scénario) et James Strong (à la réalisation) adoptent une narration chorale d’une « grande sensibilité », selon La Libre, « remarquable » selon France Inter, pour faire entendre toutes les voix.

Toby Jones livre une performance saluée à deux fois dans le rôle-titre. « Il devient un organisateur acharné de ceux faussement accusés, qui ont perdu leurs moyens de subsistance, leur réputation, leur liberté et, dans certains cas, leur vie », décrit The Guardian. À ses côtés, Monica Dolan est « formidable » dans le rôle de Jo Hamilton, écrit le Los Angeles Times.
Ce réalisme, certains critiques le comparent à un épisode de Black Mirror. « Le premier épisode est difficile à suivre, note The Guardian. L’injustice est si flagrante qu’elle vous noue l’estomac. » Et pourtant, c’est bien une série d’utilité publique : « Ce n’est pas un spoiler que de dire qu’au final, ce ne sera pas l’histoire de Goliath écrasant David. […] Le tollé général a conduit à l’introduction de nouvelles lois pour accélérer les indemnisations », complète de son côté le quotidien américain.
Une œuvre unanimement saluée
Encensée par tous, Mr Bates contre le Post Office a reçu quatre étoiles de la majorité des critiques. Portée par une direction artistique soignée, un jeu d’acteurs sobre et poignant, et une mise en scène sans pathos, cette série devient une pierre angulaire du débat public. Comme l’écrit France Inter : « Tout est lamentablement véridique dans cette tragique histoire ». Sur Arte, la fiction retrouve ici pleinement son rôle de contre-pouvoir.