
La production britannique repousse les limites du réalisme télévisuel. Derrière sa réalisation, un travail d’orfèvre mêle prouesses techniques et préparation minutieuse.
Depuis le 13 mars, Adolescence s’impose comme une proposition radicale dans le paysage des séries et Netflix a frappé fort avec cette mini-série britannique en quatre épisodes, créée par Stephen Graham et Jack Thorne.
En suivant le destin de Jamie, un adolescent de 13 ans accusé du meurtre d’une camarade de classe, le show s’appuie sur une mise en scène immersive, sans artifice. Chaque épisode est filmé en un unique plan-séquence, une prouesse technique qui renforce son réalisme brut. Décryptage de trois éléments qui font de ce programme une œuvre singulière.
1 Un tournage sans filet : l’art du plan-séquence
Dès les premières minutes, on comprend qu’Adolescence va imposer un rythme : chaque épisode d’une heure se déroule en temps réel, sans coupes, plongeant le spectateur dans une tension constante. Un choix loin d’être anodin. Philip Barantini, le réalisateur, revendique cette approche immersive, où l’absence de montage contraint à tout voir, sans échappatoire. « Je voulais influer inconsciemment le spectateur, l’empêcher de détourner le regard », a-t-il confié au Monde.

Cette continuité ininterrompue n’est pas qu’un défi technique ; elle façonne aussi l’intensité dramatique. Les acteurs et l’équipe technique ont répété pendant des semaines pour synchroniser chaque geste et dialogue avec la précision d’une chorégraphie millimétrée. « C’est bien plus complexe qu’il n’y paraît, cela demande des mois de préparation, des semaines de répétitions et une équipe incroyable pour orchestrer chaque étape », a expliqué le cinéaste à Tudum.
2 Un défi technique relevé grâce aux drones
Outre l’usage du plan-séquence, la série a poussé l’expérimentation plus loin encore avec des transitions audacieuses. Dans le deuxième épisode, une scène voit la caméra s’élever grâce à un drone, parcourir une distance de 500 mètres avant d’être récupérée au sol par un opérateur. Ce tour de force logistique permet une fluidité inédite, reliant deux espaces distincts sans interruption.

La séquence a nécessité 14 prises au lieu des dix prévues, le vent ayant rendu la manœuvre difficile. Stephen Graham raconte au Monde : « Moi, [j’étais] dans le camion, il [fallait] attendre que la caméra revienne à terre, que l’équipe la détache du drone, que je leur ouvre la porte et qu’ils montent à côté de moi ».
3 Un entraînement digne du théâtre
Chaque épisode a nécessité trois semaines de répétitions. Plutôt que de répéter l’intégralité d’un épisode, l’équipe procédait par blocs de cinq minutes, intégrant progressivement dialogues, placements et axes de caméra. Une fois un segment maîtrisé, un autre s’ajoutait, formant une séquence toujours plus longue.

Une fois les répétitions terminées, chaque épisode était tourné deux fois par jour : une prise le matin, une autre l’après-midi. L’objectif était d’obtenir plusieurs versions et de laisser au réalisateur le choix de la meilleure. Cette approche, proche des répétitions théâtrales, a renforcé l’authenticité et l’intensité dramatique de l’ensemble de l’œuvre.