Deux ans après une première saison qui a autant divisé les fans de Tolkien qu’un troll par l’épée d’Isildur, Les Anneaux de pouvoir revient dès le 29 août pour une saison 2 sur Prime Video. Mais les nouvelles aventures de Galadriel, Gandalf et Sauron réussissent-elles à faire oublier les précédentes polémiques ?
« Tolkien doit se retourner dans sa tombe. Tous les personnages masculins sont soit lâches, soit débiles, soit les deux. Seule Galadriel est courageuse, intelligente et gentille. » Pas certain que les dirigeants d’Amazon aient apprécié la sortie d’Elon Musk sur X (ex-Twitter) en 2022 à la sortie de la saison 1 des Anneaux de pouvoir. Et si Warhol aimait à dire que « n’importe quelle publicité est une bonne publicité », on se doute bien que Jeff Bezos, patron d’Amazon et accessoirement plus gros concurrent de Musk, s’en serait bien passé.
Le problème pour ce préquel du Seigneur des Anneaux prenant place sur la Terre du Milieu plusieurs millénaires avant les aventures de Bilbon Sacquet, c’est qu’Elon Musk n’a pas été le seul à tirer à balles réelles sur la série événement de Prime Video. Mais pourquoi tant de haine au pays des nains et des elfes ?
La série qui valait 1 milliard
Avec un budget colossal d’un milliard de dollars, dont 465 millions rien que pour la saison 1 (soit 58 millions par épisode), Les Anneaux de pouvoir a, dès son annonce, gagné le titre de « série la plus chère de tous les temps ». Attendue au tournant par les puristes de la tolkeniosphère, la première salve promettait dès l’acquisition des droits d’adaptation en 2017 que « l’argent serait vraiment à l’écran ». Façon de dire que les fans en auraient pour leurs frais ; eux qui attendaient impatiemment une suite à la trilogie du Hobbit. Et ils n’ont pas été déçus.
Résumons les forces en présence : une première série en streaming pour l’œuvre de Tolkien, les jeunes Gandalf et Galadriel combattant un Sauron encore à forme humaine et des moyens de production quasi illimités… a priori pas de quoi fouetter un orque. Mais c’était sans compter sur ce combat surgi de nulle part entre la diversité et l’anti-wokisme primaire.
Règlement de comptes à Wokiste Corral
Dès sa sortie, la saison 1 a subi un « review bombing » taxant la série de trahison. Outre des critiques tièdes sur la faiblesse de l’intrigue ou la libre adaptation des scénaristes, c’est le casting inclusif mettant en avant une femme (Galadriel, incarnée brillamment par Morfydd Clark) et des acteurs et actrices de couleur (on pense notamment à la princesse naine Disa jouée par Sophia Nomvete) qui semblent avoir posé problème à la sphère viriliste d’Internet. Comme si l’on pouvait encore, en 2024, s’étonner qu’un elfe soit incarné par un acteur noir (Ismael Cruz Córdova) alors même que – pour rappel – les elfes n’ont jamais existé. Pas plus que Valinor ou l’œil de Sauron.
Le bémol, au-delà des critiques adressées par les fans hardcores de mythologies nordiques (et donc adeptes de héros masculins blancs et souvent blonds), c’est que ces milliers de commentaires agressifs postés sur Reddit et sur X (propriété d’Elon Musk, anti-wokiste de premier ordre) ont presque fini par éclipser les 100 millions de spectateurs de la saison 1 (meilleur lancement pour une série Prime Video). Et avec eux, l’intrigue principale permettant de mieux comprendre les origines de la création des anneaux de pouvoir.
La saison 2 : fin du polémicmac ?
En huit épisodes, la saison 2 tente de faire oublier toutes les déconvenues en refusant de changer son fusil d’épaule. Les partis-pris de la saison 1 sont assumés, et c’est tant mieux. Les héros principaux (le jeune Isildur et son père, l’elfe Arondir, le prince Durin, etc.) sont évidemment de retour, et les « minorités » occupent toujours une place importante avec notamment Tar-Míriel jouée par l’impeccable Cynthia Addai-Robinson, Nori et Poppy de la tribu des Piévelus et même les orques chez qui l’on devine une humanité inattendue.
Quant au mystérieux magicien tombé du ciel, dit « l’étranger », dont tout le monde a compris qu’il s’agissait bel et bien de Gandalf le jeune, il apparait dans cette saison 2 comme le migrant ultime, cherchant son chemin pour découvrir son nom et croisant sur sa route des tribus d’origines africaines ou indiennes l’aiguillant vers sa propre identité.
Et la Terre du Milieu, finalement, illustre parfaitement ces migrations forcées de peuples en mouvement pour fuir la guerre à venir entre les elfes, les nains, les orques et Sauron. Une thématique plutôt actuelle, donc.
Ceux qui n’ont pas accroché à la première salve pour des raisons de « vraisemblance historique » passeront leur chemin. Les autres, beaucoup plus nombreux, engloutiront rapidement ces huit heures de fantasy elfique à cheval entre Khazad-dûm, Númenor et Eregion, la cité elfique où le forgeron Celebrimbor jouera un rôle clé.
Car si la trilogie du Seigneur des Anneaux était un plat de résistance pour les gros mangeurs (de Hobbit) et celle du Hobbit un dessert (pour les enfants), alors la série des Anneaux de pouvoir continue de se regarder comme un digestif. Nul besoin de trop réfléchir : la trame scénaristique est conforme aux attentes, l’action est au rendez-vous, les héros sont attachants même si hélas, ils manquent un peu d’humour.
Évidemment, cette nouvelle salve n’échappe pas aux travers de toutes les saisons 2 – on pense notamment à celle de House of the Dragon : coincée entre les prémisses de la saison 1 et les cliffhangers à venir dans la saison 3 (déjà confirmée), elle déroule le voyage de chacun des héros sur un tapis roulant certes bien rythmé, mais qui devrait frustrer les plus impatients.
Mais, en s’inspirant des spin-offs réussis autour du Mandalorien, notamment en entremêlant sur des séquences courtes très TikTok les aventures de chacun des protagonistes, Les Anneaux de pouvoir sauve malgré tout la mise et relance l’intérêt pour cette série en cinq saisons qui devrait donc théoriquement se terminer… en 2030. On est donc loin d’en avoir fini avec ces histoires de bagues qui font tourner la tête de tout le monde.
Tolkien ou la série sans fin
Et que les fans de Tolkien se rassurent : 51 ans après sa mort, la franchise semble très loin d’être enterrée. Outre Les Anneaux de pouvoir, ils pourront également découvrir en salle, dès le 11 décembre prochain, Le Seigneur des Anneaux : la guerre des Rohirrim, un film d’animation du très respecté Kenji Kamiyama et centré sur Helm Hammerhand, le roi du Rohan.
Quant à Gollum, il devrait lui aussi revenir sur grand écran dès 2026 avec Andy Serkis dans le rôle principal et Peter Jackson à la coproduction. Alors, où s’arrêtera donc cette passion du grand public pour le précieux et ces tireurs de flèches à oreilles pointues ? Sans jeu de mots, seuls ceux et celles qui iront jusqu’au bout le sauront.
Les Anneaux de pouvoir, saison 2, dès le 29 aout sur Prime Video.